Arrive le virus du siècle et le confinement mondial ou autrement dit : comment faire face à soi-même dans 35 m2. Finies les tentatives de socialisation, bienvenue dans le virtuel. Les jours passent et se ressemblent : dessin, écriture, yoga, bouffe, balade, lecture, bouffe, appel téléphonique ou appel vidéo, série, tisane, dodo. Je connais par cœur mon périmètre de 1 km, j’ai tout quadrillé, ratissé, observé. De temps en temps je prends le soleil sur mon balcon et j’entends des bribes de conversation:

«C’est fou, hein ?

– Oui, y’a un chat !

– Bon allez, on s’en va...

– Papa, j’ai enlevé le sac...

– Gabriel, ce sont les fleurs de la mairie...

– Bah moi, je suis sorti me chercher des clopes...

– ...parce que les abeilles, ça pique...

– ...comme ça, tu fais une soirée, les mecs dépensent des chèques...

– Attends Lilas, attends !

– T’imagines, trois semaines, c’est insupportable...

– On était Martin, Gabin, seuls dans mon village l’été et on se faisait chier alors on faisait des conneries...

– Rien à foutre !

– Quoi, quoi, quoi, quoi ? T’es mal élevé !

– Elle veut m’attraper...

– Fais voir tes chaussures, t’as un caca d’oiseau...

– On les voit tous ces connards...

– J’ai même vu un ventilateur devant une porte...

– Mais c’est un repas de Noël que tu lui as préparé à ta fille...

– Gladys, oui...

– Il est là, le bonheur, il est là ! »