Chapitre  8 : Celle qui est inquiète

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Lorsque la porte s'ouvre, je me retourne aussitôt. Je n'ai plus d'ongles à force de les ronger et je me retiens de faire tout un tas de recherches sur le web. J'ai aussi hésité à appeler Laura, Cathy ou Caro, mais j'ai peur de les inquiéter tant que je n'ai pas plus d'infos.

Je me décompose en voyant le médecin entrer.

Gabriel.

Qu'est-ce qu'il fout là ?

Interne, qu'il avait dit ! Il avait oublié de préciser le service.

Il me dévisage avec autant de surprise que moi.

— Athéna ?

J'acquiesce. Je ne sais pas quoi dire d'autre. Mes joues se colorent de rouge. La situation ne pourrait pas être plus embarrassante.

Il se racle la gorge comme pour se concentrer, me serre la main puis s'installe derrière le bureau. Il a enfilé un masque de professionnel. Je ne sais pas comment il fait.

Il lit mon dossier, relève son visage.

— Vous êtes enceinte de 12 semaines et vous avez eu des pertes de sang aujourd'hui ? C'est bien cela ?

Le vouvoiement et le ton sérieux me prennent de court. J'hoche la tête. A-t-il eu le temps de calculer que j'étais déjà enceinte quand on a passé la soirée ensemble ? Je ferme les paupières. Je suis vraiment maudite. Quelle était la probabilité que je retombe sur lui dans ces conditions ?

— Bien, je vais vous ausculter. Déshabillez-vous et installez-vous sur le lit, les pieds dans l'étrier.

Les mains tremblantes, je retire mon pantalon et ma culotte tachée. D'un coup, j'oublie toute cette rencontre fortuite et je me concentre sur la seule chose qui m'importe : comment va mon bébé ?

Il enfile des gants et me prévient qu'il doit insérer un spéculum. J'essaie de ne pas me crisper comme il me le conseille, mais ce n'est pas chose facile. Surtout vu le stress qui m'habite. (vérifier l’exactitude de l’examen)

— Il faut savoir que les pertes de sang ne sont pas inhabituelles pendant une grossesse. Vous avez bien fait de venir, reprend-il. Même si la quantité est raisonnable. On va vérifier que tout va bien avec une échographie.

Je hoche la tête. L'espoir revient en moi. Il déverse un liquide froid sur mon bas-ventre puis appose un appareil dessus. Aussitôt, un bruit sourd BOUM BOUM BOUM résonne dans la machine. C'est le bruit le plus merveilleux que j'ai jamais entendu. J'ai envie de caresser ma peau là où est mon bébé. Je me retiens, mais je laisse glisser une larme.

Gabriel ne semble pas prêter attention à mes émotions et se concentre sur l'embryon visible à l'écran. Il ressemble un peu à un têtard avec sa grosse tête. Il a déjà des bras et des jambes qui gigotent dans toutes les directions. Mon têtard. C'est la deuxième fois que je le vois et j'éprouve déjà pour lui un amour inconditionnel.

— Il semble en pleine forme, annonce Gabriel. Je vais vous arrêter quelques jours pour vous reposer. Par contre, il faut revenir si cela se reproduit. Vous pouvez vous rhabiller.

Gênée maintenant que je suis rassurée, je me rends compte qu'il a vu mon vagin pour la deuxième fois. Et que j'aurais clairement préféré que ce soit dans d'autres conditions. Au moins, je devrais être tranquille maintenant, il ne risque pas de me recontacter après cette entrevue.

Quand je m'assois à nouveau sur la chaise, il me tend un arrêt de travail. Puis il jette un coup d’œil à la porte fermée.

— Tu savais déjà que t'étais enceinte l'autre soir ?

Je hoche la tête, les joues empourprées.

— Et le père ?

Je me mords la lèvre.

— Désolé... ça ne me regarde pas après tout, dit-il en se grattant la gorge.

— Non, c'est bon... je... Il n'y a pas de père.

— Hein ?

Ses yeux écarquillés me dévisagent. Il doit croire que je suis totalement fêlée. Je déglutis.

— Je me suis faite inséminer en Belgique.

Sa bouche s'arrondit de surprise.

— Oh, je vois.

Un silence gêné s'installe.

— C'est courageux de faire un bébé toute seule, finit-il par déclarer.

Il se lève de son siège et m'attend près de la porte.

— Prends soin de toi, me souffle-t-il avant d'ouvrir.

— Merci, je chuchote.

C'était le rendez-vous médical le plus étrange de ma vie.

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