Carte postale (Writober jour 17)

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C'est en m'aventurant dans le grenier de la maison familiale que j'ai découvert ce carnet au contenu beaucoup plus hétéroclite que je ne le pensais. Dissimulé dans une boîte à chaussure, elle-même rangée dans une grande malle, elle y avait consigné l'intégralité de sa vie. Une existence d'adolescente énamourée, de femme encore innocente, de compagne puis d'épouse en réalité plus clairvoyante qu'il n'y paraissait, et de mère en constant apprentissage. Des photographies diverses, des étiquettes... et une carte postale. La seule et unique du recueil. Celle d'une plage sur la côte atlantique. Celle d'une plage qu'elle adorait parcourir chaque été avec nous. Pieds nus dans le sable mouillé, ses éternelles spartiates à la main, elle s'évertuait à nous en vanter la beauté simple tandis que notre propre adolescence nous désabusait de cette cohue permanente et surfaite. Je la revois insister auprès de mon père sur le côté extraordinaire de cette carte. "Mais, mon chéri, tu ne comprends pas ! Ce cliché nous offre une vue imprenable sur un banc de sable vierge de tout passage ! Il n'y a personne et l'eau est calme ! C'est comme une scène de film coupée au montage, une scène qu'on ne verra jamais si d'autres personnes décident égoïstement de la garder confidentielle ! C'est une fenêtre secrète sur un instant fugace, un pied de nez à la course du temps ! Comme si on immortalisait une femme en train de se maquiller ; c'est un moment très intime" La course du temps... C'est justement lui qui l'avait rattrapée...

Le coeur serré, j'accroche cette carte postale à un coin du miroir surmontant ma coiffeuse. Elle sera ma fenêtre personnelle sur un passé révolu mais pourtant bien vivant dans ma mémoire. Un pélerinage de souvenirs. Des souvenirs à la pelle. Une pelleté d'images. Je promène un instant mon regard sur mes traits et entreprend de maquiller mes yeux à sa façon. "Des yeux de biche et une femme devient un trésor pour elle-même !" C'était sa définition de l'amour inconditionnel que toute femme se devrait d'appliquer... S'aimer nue dans le sens le plus complet pour apprécier avec légèreté tout artifice décidé... Ainsi embellie, j'ai l'impression de lui ressembler.

Alors, je me perds à nouveau dans la particularité de cette image qui l'attirait... et je comprends...

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