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Le soleil s'inclinait peu à peu face à la lune. Bientôt, l'appartement serait englouti par les ténèbres de la nuit. Le moment idéal pour passer à l'acte. L'instant approprié pour s'introduire discrètement chez autrui. Tout bon cambrioleur le savait.

En temps normal, les volets se fermaient automatiquement et la lumière artificielle gagnait en intensité. Le salon n'était jamais englouti dans le noir complet, le jeune propriétaire n'aimait pas cela. Mais ce soir-là rien ne s’était déroulé comme d'habitude. Les fusibles, trop usés, n’avait pas plus résisté.

Une petite lampe de torche s'alluma, projetant un faible faisceau de lumière. Les piles sûrement. Peu importait, il jeta un bref coup d'œil dans la buanderie, mais n'y trouva rien d’intéressant. Il en profita pour y cacha son propre sac.

Ensuite, il passa devant la salle de bain, la porte légèrement entrouverte.

À l’intérieur, Alexian tâtait l'air à la recherche de sa serviette. Sa voix continuait d'enchaîner des fausses notes au compas de « Ça (c'est vraiment toi) », de Téléphone. Son corps se déhanchait : deux fois sur la droite, une fois sur la gauche, puis il tournait sur lui-même.

À l’extérieur, l’intrus s'enfonçait un peu plus dans le couloir, la torche discrètement orientée vers le bas. Il venait de repérer sa cible au son de sa voix. Il poursuivait son chemin.

Alors qu’il entrait dans la salle à manger, la petite lampe rendit l'âme. Et merde ! J’ai oublié de vérifier les piles, s’agaça-t-il intérieurement. Fort heureusement, la lumière de la lune éclairait suffisamment la pièce pour s'orienter. Tandis qu’il la sondait, les informations circulèrent dans sa tête. Il fouilla le bureau et l’ordinateur en premier. Rien.

L'ombre marmonna dans sa barbe, quelques mots à peine audibles. Il ne trouva pas de bibliothèque dans la salle à manger, elle se trouverait forcément dans la chambre. Ce type de meuble révèle bien des secrets sur son possesseur. Mais il savait déjà tout, ses recherches sur sa cible l’avaient renseigné à outrance.

À pas de chat, il se faufila jusqu’à la chambre d'Alexian. La pièce était nettement plus sombre, la visibilité quasi nulle. Les piles de sa lampe torchee ayant rendu l’âme, il s’équipa de son portable et activa la fonction « flash ».

De sa main libre, il parcourut les multiples rangées de papiers classées dans un tri-tout au pied du bureau. Il n’y trouva rien d'utile non plus.

L'énervement et le stress l’envahissaient. Il ferma les yeux et secoua la tête. Il devait chasser ce mal. Sa respiration ralentit, quand un bruit l’alerta. Le téléphone de la victime. Il entendait Alexian se précipiter pour prendre l’appel.

- Allô. Oui Betty. Je suis sur le point de partir. Aucun retard, promis. Tu me connais...

Alexian raccrocha. Il était sorti dans la salle de bain d'un pas pressé. Le malfaiteur ne devait pas être repéré. Dans le cas contraire, il serait obligé de l'éliminer sur le champ. Sa mission était de récupérer une clef USB au contenu compromettant. Rien de plus. Il n'avait pas reçu l'ordre de tuer, mais, avait-il reçu l'ordre de le garder en vie s'il se faisait repérer ? Non. Il en avait juste besoin pour trouver le support.

Il entendit la voix du Russe se rapprocher. Le voleur n'avait plus le temps d’échafauder un plan. Il se jeta à plat ventre derrière le lit. Banal, mais efficace.

Alexian, son caleçon pour seul vêtement, traversa la pièce sans allumer la lumière. Il accéda à son dressing et tria ses chemises, une chance pour l'intrus. Les ceintres grincèrent sur la barre de fer. L'intrus profiterait de ce bruit pour couvrir une sortie inespérée de ce piège. Un coup d'œil vers la porte de la penderie, un autre vers celle de la chambre salon, puis l’homme déguerpit.

Dans la précipitation, la torche tapa contre sa cuisse, se rallumant. La lumière se refléta un court instant dans un miroir. Alexian reçut le faisceau en pleine face. Dans un mouvement de recul, il se protégea brusquement le visage.

Trop tard... L'intrus n'avait plus le choix. Sa cible devrait mourir aussitôt l’objet trouvé.

- Qui est là ?

La voix d'Alexian gronda. Il ne voyait rien. Il crut vraiment que sa voix pourrait impressionner.

- Répondez ou j'appelle la police !

La lumière du dressing se coupa subitement, l'appartement replongea dans le noir. Le Russe avança pas à pas, avec une prudence décuplée. À hauteur de la bibliothèque, sa main droite explora l’étagère centrale, puis il s'arma d'un coupe-papier en bois qu'il serra aussi fort que possible. Les arrêtes de l'objet se dessinaient dans sa paume. Sa respiration devenait incontrôlable.

Il fit un nouveau pas. La porte de sa chambre était juste là, à quelques centimètres. Il bloqua les appuis et pivota sur sa droite pour frapper aussi fort que possible. Personne.

- Je... Je sais que vous êtes là.

Silence.

Alexian s’autorisa un bref regard vers son ordinateur. Il n'était plus en veille. L’intrus l’avait fouillé et dans sa précipitation, le programmeur ne s’en était pas aperçut. Le jeune homme se précipita vers le bureau, son arme improvisée déposée sur la table. Eureka, son projet révolutionnaire n’avait pas disparu.

Typhon dandinait dans l’appartement. Le chat était imperturbable. Son miaulement eut à peine le temps de frôler ses tympans qu'Alexian dut parer avec maladresse un coup de pied en direction de sa tête. Sa hanche percuta le bureau. Il se rattrapa comme il le put.

L'agresseur ne laissa aucun répit à sa proie et tenta de nouveau de l'atteindre. Plusieurs coups de poing partirent en un éclair. Les chocs furent brutaux, la victime encaissa avec difficulté. Un craquement se fit entendre., figeant Alexian, le nez en sang. Cassé, sans doute. Malgré cela, il réprima un cri de douleur.

Sa fierté de mâle s'exprima. Il se rua sur l’intrus, prit son bassin entre ses mains, le projeta violemment contre la baie vitrée. L'homme ricocha et s'écrasa sur le sol. Malgré cela, il eut un sourire en coin. Alexian en profita pour récupérer son coupe-papier. Le jeune essaya de le frapper avec, mais fut rapidement désarmé.

Un nouveau coup dans l'estomac étouffa Alexian. Il sentit toutes ses tripes monter et redescendre d'un mouvement sec. Il tituba avant de s'appuyer sur l'une des chaises hautes près du bar. Il en attrapa une avec difficulté et la lança. Son jet atterrit loin de sa cible. Sa vue se troublait sous l’effet des coups, ses jambes ne le tenaient plus.

Avec nonchalance, l'intrus dégagea à coups de pieds ce qui encombrait son chemin. Il progressait d’un pas déterminé. Il claqua le visage d'Alexian d’un puissant revers de main. La tête du jeune garçon percuta avec violence le mur. Son corps s'écroula dans un bruit lourd.

Étalé sur le sol, Alexian sombra.

***

Peu à peu, le jeune garçon retrouva ses esprits. Ses sens lui envoyaient sans relâche des vagues informations. Il ne parvenait pas à les décrypter. Paradoxal pour un tel expert en la matière. Il était encore dans les vaps, bien trop pour pouvoir comprendre ce qui l'attendait.

Il tenta de bouger ses bras, mais des liens serrés le maintenait sur la chaise, tout comme ses chevilles. Toute possibilité de s’échapper s’envolèrent. Ses membres s’engourdissaient, il se trouvait à la merci de son bourreau.

Que lui voulait-il vraiment ? Ça ne pouvait pas être cette clef USB, il y avait forcément une autre raison. Seul lui savait ce qu'elle contenait. À moins que...

L'homme s'approcha de sa victime et gifla son visage pour la faire réagir. Alexian était perdu, son corps ne répondait plus. Un bruit d'eau coulait, des pas sur le parquet ; ces sons le ramenaient lentement à la réalité.

Son réveil ne fut pas assez rapide pour son agresseur. D'un mouvement sec, il lui déversa un sceau d'eau fraiche sur la tête. Alexian se raidit. Sa respiration se bloqua. Vite de l'air. Vite !

Le pauvre se mit à hyperventiler. Rien à faire, il manquait encore d'air. La panique se lisait sur son visage. Sa bouche s'ouvrait toujours plus grande, aspirant un maximum d'air qu'il expirait immédiatement. Peu à peu, sa respiration s’apaisa.

Ses yeux découvrirent avec horreur le spectacle en préparation. Son tortionnaire disposait sur la table basse du salon plusieurs instruments. Plusieurs seringues, une batte en fer, un taser. Il y ajouta une paire de ciseaux et deux couteaux qu’il prit dans la cuisine. Le plus petit avait ses faveurs.

Aucun doute sur ses intentions. Alexian détourna le regard, cherchant à maîtriser la panique qui pressait son cœur à vouloir le faire exploser.

- Inutile d'essayer de défaire tes liens, ces nœuds se resserreront à chacun de tes mouvements.

Comme pour tester la véracité des propos, Alexian bougea les avant-bras. Les cordes se rétractèrent, clouant les membres du jeune homme. Des traces se dessinèrent sur sa peau.

- Je t'avais prévenu, soupira le tortionnaire. Tous les mêmes.

- Que me voulez-vous ? balbutia l’otage. Je n'ai rien à vous donner.

La paume de la main gifla le visage du garçon. Sa tête resta bloquée un moment sur sa gauche.

- Ne me mens pas, sale petit con ! J'ai horreur de ça ! Putain, tu me fous les boules un max !

Cigarette à la main, le fumeur saisit le visage de sa victime, le redressa et lui souffla dessus un nuage de fumée. Alexian ne pipa mot. La lumière projetée dans sa direction l'empêchait d'identifier son agresseur. Cette silhouette... Il aurait juré qu'il la connaissait.

- Tu vas m'écouter attentivement, je ne répète jamais les règles du jeu. Si tu es coopératif, je tacherai de ne pas te faire trop souffrir. Je n'ai pas un mauvais fond.

Un sourire ironique s'esquissa sur ses lèvres.

- Dans le cas contraire, reprit-il, je m'attacherai à te faire ressentir la douleur comme jamais. J'espère que tu as en toi assez de courage pour t'accompagner à travers ce dernier voyage.

Alexian cherchait à masquer sa peur. Un regard sévère, une mâchoire serrée. En vain. Son corps tremblait sans cesse. Un cri brisa le silence. Le premier d’une longue série.

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