Prompt : Tom et Alexis sont sur le point de s’embrasser quand, accidentellement, leurs fronts se heurtent si fort que des bleus apparaissent.

***

— Donc là, c’est le do ?

— Nan, c’est un sol.

— Et ça un mi ?

— Ré.

— Raaah mais c’est trop compliqué Alexis !

— Tu t’appliques pas aussi ! T’as voulu que j’t’apprenne les bases du piano, maintenant mets-y du tien putain !

— Mais les touches se ressemblent toutes !

Et le pire, c’était qu’il y en avait quatre-vingt-huit des comme ça ! Tom prit sa tête entre ses mains, en mode Psykokwak. Il sentait le mal de crâne venir à des kilomètres, mais ne baissa pas les bras. Il balada ses yeux le long du clavier coloré de blanc et de noir, cherchant à s’imprégner de cette gamme infernale. Son index se pointa sur une touche au hasard, qui résonna dans une onde acoustique grave.

— Fa ?

— Si !

— Oui ?!

— Non, un si !

Surtout, garder son calme. Ne pas s’énerver.

— Tom, tu pars de là, le do, puis le ré, le mi, fa, sol, la, si et enfin le do. Et tu recommences. C’est pas si compliqué ?

— Pourquoi y a deux do ?

Est-ce que lui apprendre à dessiner un pingouin ou une girafe aurait été plus simple ? Certainement. Sauf que Tom avait insisté – lourdement, tous les jours, jusqu’à ce qu’Alexis craque – pour qu’il lui apprenne à jouer du piano. Ça avait l’air si facile quand son petit ami en faisait, et les notes qui en ressortaient étaient belles, harmonieuse. Magiques. Il avait envie de reproduire la même chose, parce que lui aussi voulait impressionner Alexis avec une reprise de sa chanson préférée. Mais, s’il parvenait à jouer « do ré mi la perdrix » avant d’arriver au stade de Peter Buka, c’était un bon début. Un très bon début.

Alexis abattit son poing sur les touches, dans une dissonance à se faire hérisser les poils des bras de Tom. Ses tympans n’étaient pas en reste, eux non plus. Décidément, professeur de musique n’était pas un métier fait pour lui et Tom était sans doute le pire élève qui soit ! Incroyablement beau – et mignon avec cet air troublé – mais cancre. D’ailleurs, à ce sujet, Alexis avait quelques idées de punitions, si toutefois son disciple continuait à faire n’importe quoi, mais l’heure n’était pas aux pensées déplacées.

Il prit le visage de Tom dans sa main pour le tourner vers le sien. Même déconcerté par ses yeux, Alexis éleva la voix.

— Écoutes, retiens bien et apprends !

Avec assurance et dextérité il glissa ses doigts sur le do, le ré, le mi et encore trois fois sur le mi, puis continua avec le reste des notes jusqu’à terminer la partition. Même s’il jouait une comptine pour enfant, Tom le trouvait toujours aussi sexy.

— Waouh Alexis ! Tu m’épates !

— C’est… rien de transcendant Tom. T’as regardé au moins ?

Pour lui démontrer que oui, il avait tout bien retenu, Tom répéta la même mélodie. À sa manière. Complétement éclaté au sol. Des ré mélangés aux fa, des la aux si et sans aucun rythme. Alexis voulut se frapper la tête contre le piano mais, à défaut, ce fut sa paume qui rencontra son front.

— Putain, j’en r’viens pas ! T’es un cas désespéré mon pauvre Tom.

— Et toi un mauvais prof !

— Tss, mais t’es grave insolent en fait ! J’abandonne !

Offusqué, Tom lui lança un regard qu’il s’imaginait mauvais, puis s’en alla se vautrer sur le canapé pour bouder. Alexis maugréa. Quel gamin… !

— Bah, continues à faire la gueule, moi j’vais fumer.

Une fois à l’extérieur, il ne prit pas la peine de se retourner pour accorder la moindre attention à son petit ami à travers la baie vitrée. D’un bond, Tom se releva et le rejoignit. Il se colla à son dos, l’enlaça délicatement et enfouit sa tête au creux de sa nuque.

— Alexiiis pardon, je voulais pas dire çaaa.

Il était incroyable ! Comme si ses paroles l’avaient réellement atteint. Au contraire, Alexis les avait déjà effacées au moment où il avait embrasé le bout de sa cigarette.

— Ouais, j’suis désolé moi aussi.

— On fait la paix ?

C’était quand, la dernière fois qu’il avait entendu ça déjà ? Ah oui, il devait avoir sept ou huit ans à tout casser. De souvenir, cette proposition se concluait par une poignée de mains, puis tout était oublié. Bon OK, il se prêterait au jeu. Pour Tom.

Alexis se retourna et déploya sa main vers son homme, qui se mit à ricaner.

— Non mais pas comme ça. Comme des adultes !

Ah oui ? Vu sa réaction de tout à l’heure, Tom n’en était pas encore un. Et Alexis non plus.

— Moi je te parle d’une vraie trêve.

Il avait enroulé ses bras au tour de sa taille pour le caler tout contre lui. Ses prunelles brillaient outrageusement et son demi-sourire provoqua un choc électrique. Alexis comprit.

Dans le feu de l’action, ils rapprochèrent leurs visages. Vite. Trop vite. Si bien que leurs fronts se cognèrent brusquement. L’impact avait résonné fortement, des étoiles tournaient tout autour d’eux et une petite tâche bleue commençait à fleurir sur leurs peaux.

OK, la prochaine fois, ils opteront pour la méthode enfantine.