Seconde 16

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Je veux que tu m'apprennes à pleurer d'amour et que les stries de notre émoi tracent un fil conducteur entre mes pages raturées. C'est si simple : je veux que tu dévores la moitié de mon être indigeste et qu'il n'en reste qu'un dernier fragment à supporter, car le fardeau d'une personne complète est immense et l'est plus encore lorsqu'il est instable, déséquilibré.

Je veux mourir pour toi, mourir, n'être plus moi. J'espère disparaître entre tes bras, que ton coeur de coton m'engloutisse comme un nuage de chair, qu'il ne reste que mon torse expirant contre le tien, poitrine contre poitrine. Peine contre paix, que l'un aspire l'autre et que tout se mélange, que tu ne regardes pas mon imprécision de trop près mais qu'on l'admire tout de même un peu de loin et que tu m'avoues, enfin, après des années, l'aimer.

Je veux me défaire de mes cassures et te laisser les utiliser, en tisser des guirlandes d'histoires. Il faudrait que toute soie simple, été comme hiver, couvre le chaos nocturne et les jours de glas imprévisibles, quand la mort, quand la peur, quand les corps brûlent et se décomposent, embrassés trop passionnément par le soleil. Il faudrait qu'immatériel, tu m'enlaces et que charnel, tu m'effaces.

Je rêve de modestie et de délicatesse comme je crève de n'être rien de tout ça. Le poignard d'une fausse gloire, plongé entre mes côtes, meurtre inachevé - le sera-t-il un jour ? - te rebute. Je le conçois comme je me maudis d'être une sorte de mensonge dépourvu de tout jusqu'à la saveur de l'interdit.

Je gratte le miroir, n'en récolte que de la poussière et n'ai même pas ton regard peiné pour me souffler : "Tu ne vois même pas ton propre été, c'est bien regrettable.". Je parle, n'ai moi-même cure de ce que je raconte ; j'aimerais qu'on ne m'écoute plus pour que ma bouche comprenne enfin qu'il faut se taire lorsqu'il n'en sort plus rien de beau, même sous-titré.  

Amour, je suis détestable, pitoyable, la plus sordide des créatures que tu laisses à rêver ; les pieds enracinés et les yeux dans le vague, pris par les courants avides d'âme humaine en pair-dition. Mais Amour, je ne veux plus pleurer mon malaise, mon spleen, mon aigreur ; je veux t'avoir entre mes bras tout morose, ambigu, déplacé que tu puisses être.

Je veux que tu m'apprennes à sourire d'amour et que la dentelle de notre émoi caresse mes doutes, tout en douceur. Ce serait si simple...

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