60. La bonne et la mauvaise nouvelle

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Hugo

Je regarde Oriane partir avec son fils et une nouvelle fois, je me dis que c’est vraiment la femme parfaite, avec tout ce qu’il faut de caractère, de charmes pour m’attirer totalement. Quelle idée de me laisser envouter comme ça par une femme mariée et dont le mari n’est autre que mon boss. Franchement, j’aurais pu me débrouiller autrement !

— Hello Hugo ! Tes papiers sont tous signés depuis dix minutes et le spectacle est terminé ! Tu peux retourner à ton bureau, maintenant. Promis, s’il y a du nouveau entre les deux, je te tiens au courant ! me chuchote Fabienne à mi-voix.

Je rougis car je me suis fait prendre dans mon rôle de voyeur qui souhaitait être discret mais je me dis que ça aurait pu être pire. Si elle savait que j’étais surtout venu pour admirer la jolie brune qui m’a fait voir tant d’étoiles ce weekend…

— Merci Fabienne, tu es un ange ! J’espère que c’est moins chargé pour toi, cette semaine.

— Oulah, c’est beau de rêver ! Tu pleurerais si tu voyais ma liste de tâches pour la semaine, mon chéri, rit-elle.

— Il va tous nous épuiser à la tâche, répliqué-je en lui envoyant un baiser de la main. Bon courage !

— Merci, espérons qu’il reste de bonne humeur. Bon courage à toi, Joli Cœur.

Peut-être que je devrais l’inviter elle-aussi à un petit show du Lord. Je suis sûr que ça lui plairait de me voir me déshabiller. Vu comment elle me regarde alors que je suis tout habillé, je pense qu’elle en perdrait la vue si elle pouvait m’observer nu. Cette pensée un peu farfelue me met encore plus de bonne humeur, surtout depuis que j’ai compris que Louis n’allait pas être avec Oriane ce soir. Si j’attends que Robin aille se coucher, peut-être que j’arriverai à convaincre ma jolie amante de m’inviter à nouveau à partager une étreinte charnelle et sensuelle ? Je m’imagine déjà pousser la porte de sa chambre et venir la rejoindre dans son lit où elle m’attendrait nue… Caresser sa peau toute douce, parcourir ses courbes divines… échanger des baisers de plus en plus sensuels jusqu’à ce que l’on…

— Hugo ! Arrête de rêver et viens dans mon bureau !

Mince, le mari est rentré et le rêve s’est arrêté brutalement. Et quand je vois le visage fermé de Louis, j’avoue que j’y retournerais bien, dans mes songes. Encore une fois, il est frustré de sa situation de couple et c’est nous qui allons prendre…

— Je ne rêvais pas, Louis, j’étais en train de réfléchir à la stratégie pour la maison de maître de la rue Saint-Nicol. Tu crois qu’il faut la mettre à dix ou quinze pourcents au-dessus du prix qu’on vise ?

J’essaie de faire comme si j’étais réellement en train de penser à ça et de revenir exclusivement au travail, cela permettra peut-être de diffuser un peu l’énervement de mon boss.

— Non, c’est trop. Il y a trop de travaux à prévoir pour prendre ce risque. Tu devrais te contenter de l’évaluation de base. Elle a du potentiel, possible que les offres fassent grimper le prix et que les potentiels acheteurs se battent pour l’avoir. Tu as eu cette idée encore endormi devant ton petit déjeuner ou quoi ?

J’ai envie de lui répondre par des onomatopées du genre “Gnan gnan gnan gnan”, mais je me retiens et reste respectueux. D’autant plus que mes idées au petit déjeuner que j’ai pris en face de son épouse étaient beaucoup moins ennuyeuses que ces ventes qu’il faut faire pour continuer à faire rentrer l’argent dans les caisses.

— Non, Louis, pas du tout. Je vais faire comme tu proposes, j’avais juste besoin de l’avis de mon responsable. Et comme ça, si après on est en dessous des deux cent mille qu’on visait, tu ne pourras pas dire que c’est de ma faute. Tu voulais me voir ?

— Oui. J’ai besoin de me décharger un peu et maintenant que tu as fait tes preuves dans l’entreprise, je pense pouvoir te confier des clients plus… complexes, dirons-nous, me répond-il en faisant glisser une pile de dossiers devant moi.

Je regarde un instant la pile sans la toucher et constate que le premier nom est celui d’un adjoint au maire qu’il voulait absolument traiter.

— Je ne comprends pas, Louis. Ce sont tes dossiers, ça, non ? Tu veux que je gère ces affaires alors que je suis le dernier arrivé dans la boîte ? Pourquoi tu ne demandes pas à Etienne ? Ou à Vianney ?

— Parce qu’ils ne comprendraient pas. Toi, tu sais par la force des choses dans quelle galère je suis avec ma femme. Il faut que je trouve du temps pour le perso, mais je te filerai un coup de main si besoin. Je connais la plupart des clients pour les avoir déjà rencontrés, d’autres parce que je leur ai déjà trouvé un bien. C’est une bonne occasion pour toi de te démarquer à l’agence. Tu bosses bien, sinon je ne te les aurais pas refilés, ultimatum ou pas.

Je suis pris entre différents sentiments. D’abord, la fierté que mon travail soit reconnu. Il a beau me critiquer énormément au quotidien, il doit quand même penser que je suis quelqu’un en qui on peut avoir confiance et j’aime bien être apprécié comme ça. Je me sens aussi un peu obligé d'accepter parce que j’ai ce sentiment de culpabilité en moi, que j’oublie totalement ou presque quand je suis avec son épouse, mais dans mon cerveau un peu embrouillé, j’ai l’impression que ça pourrait presque être une compensation du fait de le rendre cocu. Et enfin, je me dis que si c’est moi qui me mets à bosser comme un malade, ça va me laisser moins de temps pour équilibrer ma vie entre mes répétitions et mes spectacles, mon bénévolat aux Restos que j’ai un peu négligé ces derniers temps, mes sorties avec Oriane si je veux les maintenir et les cours de langue des signes que je veux commencer à suivre.

— Je suis touché de la confiance que tu me fais, Louis, vraiment. Mais si tu me donnes plus de responsabilités, il va falloir que le salaire suive. Je ne vois pas pourquoi je travaillerais plus sinon… mais tu as sûrement réfléchi à ça, non ?

— Je ne te donne pas plus de responsabilités, mais plus de clients. Les commissions te reviendront en cas de vente, je crois que c’est déjà pas mal, non ?

— Et je suis censé trouver le temps de faire ça quand, alors ? Sans augmentation, je te rappelle que mon contrat est à trente-cinq heures. Je ferai donc le maximum pour organiser sur mes horaires habituels.

Je n’aime pas quelle image de moi je renvoie, mais les enjeux d’équilibre avec ma vie personnelle sont importants et je n’ai pas envie de transiger dessus. C’était une des raisons principales de mon arrivée à l’agence où les salaires ne sont pas exceptionnels, alors si je n’ai plus les avantages qui vont avec, ce sera sans moi.

— Tu comptes ouvrir ta propre agence un jour, Hugo ? Parce que je peux t’assurer que ce n’est pas avec cette mentalité que tu y parviendras. J’ai conscience que je te demande un effort, mais c’est l’histoire de quelques semaines, le temps qu’Oriane me laisse rentrer à la maison, soupire-t-il.

— Parce que tu penses qu’après, si tu reprends les choses comme avant, elle va accepter ? lâché-je sans vraiment réfléchir avant de parler.

— Non, mais je ne vais pas foutre en l’air des années de travail non plus. Je vais faire des efforts, mais il ne faut pas pousser. Un avis à donner là-dessus ? termine-t-il en me lançant un regard noir.

— Non, je n’ai pas d’avis là-dessus, désolé, grommelé-je, un peu gêné. Je vais regarder ça, Louis, mais sache que si c’est trop, je reviendrai à la charge pour une augmentation. J’aime beaucoup travailler ici, mais si ça devient trop compliqué, je n’hésiterai pas à me renseigner pour aller voir ailleurs.

— Je vois. Je ne te pensais pas aussi arriviste, cingle-t-il en allant se poster devant la fenêtre, les mains dans les poches. Tu devrais éviter ce genre de discours devant ton patron, quand même. Bien que je puisse le comprendre… En revanche, évite de dire ça devant Vianney, parce que lui ne sera pas aussi compréhensif.

— J’ai une vie perso, Louis. Je ne veux pas occulter ce qui est vraiment important. J’adore mon travail, mais je ne veux pas non plus tout sacrifier pour lui.

Contrairement à toi et à ce que tu es en train de faire avec Oriane. C’est sous-entendu entre nous, personne ne fait la remarque mais je suis convaincu que, comme moi, il a la même idée en tête.

— Je vais aller m’occuper de ces dossiers et je ferai tout ce que je peux pour les mener à bien. En ça, tu peux avoir confiance en moi.

— J’en prends note. Tu peux disposer.

Encore une fois, j’ai envie de lui faire une réponse moqueuse, du genre, “Oui, mon bon roi”, mais je reste sage et m’éclipse discrètement. J’ai besoin de ce travail et la mission qu’il me donne est intéressante. Et puis, vu que je le fais cocu, autant que j’essaie d’améliorer la dimension sur laquelle il se concentre en ce moment, à savoir son travail.

Je m’installe à mon bureau et passe le reste de la matinée à parcourir les dossiers qu’il m’a remis. Franchement, ça me semble faisable en m’organisant bien, même si je pense que ce sont les impondérables qui vont me mettre en difficulté sur l’organisation de mon temps. Lorsque midi trente arrive, je me force à me lever pour me rendre dans la petite salle de pause. J’écris immédiatement un petit message à Oriane :

— Ce soir, j’ai cru comprendre que tu serais encore célibataire. Une fois ton petit ange au lit, tu crois que je peux passer te voir ?

En attendant sa réponse, je lance la petite vidéo du cours de langage des signes que j’ai téléchargée pour essayer d’impressionner la jolie brune. Je sais que c’est un peu puéril, mais j’ai eu envie d’essayer. De toute façon, ça ne sera pas perdu. Peut-être qu’un jour, je décrocherai une vente auprès d’une personne muette comme ça ! J’interromps cependant la vidéo dès que je vois la notification de la réponse d’Oriane.

Je te manque déjà ? Nous nous sommes pourtant quittés il y a quoi, cinq heures ? Je ne dis pas non pour ce soir, mais pas trop tôt. Ce sont les vacances et c’est soirée Disney… Disons après 22 h, si c’est bon pour toi.

— Parfait, je viens pour 22 h 30 et tu m’envoies un message s’il faut que je repousse. Et promis, à l’aube, je repars. Mais pas avant d’avoir profité de ton joli corps, Miss Normandie. :)

Je souris niaisement, tout heureux qu’elle ait accepté ma proposition. Je n’y croyais qu’à moitié, avec la présence de son fils sous son toit. Mais si elle a dit oui, c’est qu’elle est sans doute plus accro qu’elle le dit. Et ça, c’est la bonne nouvelle du jour !

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