Déchirement instinctif

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L'homme s'arrêta, incertain. Il lui était difficile de se repérer dans ce décor décadent. Tout était trouble à ses yeux, rien ne semblait réellement exister. Sa vision se remplissait de brouillard. Rapidement les ténèbres l'engloutirent, le laissant sans moyen de se diriger.

Il criait, encore et encore, suppliant de l'aide. N'entendant rien autour de lui, la peur commença à s'insinuer au fond de lui, crépitant du fond de son estomac, pour se promener vers les limbes de son cœur. Sa voix s'intensifia, proclamant haut et fort sa détresse.

Après quelques minutes d'affolement, il décida de se reprendre en main. La panique ne devait pas le désarçonner de sa conscience. Il était le chef de son être, et il le resterait.

Par tâtonnement du sol, il rampa vers l'inconnu. Son chemin continua ainsi, à la vitesse d'un animal blessé. Il fallait qu'il avance, c'était une décision inévitable s'il voulait survivre. Il ne pouvait plus s'arrêter, tel était son destin.

Ses mains se rappaient continuellement contre les quelques objets qui jonchaient le sol. Des picotements se propageaient dans celles-ci, des petits débris s'étaient plantés dans sa peau. Son sang coulait doucement des ses plaies.

Il écoutait attentivement les alentours, mais rien n'arrivait à ses oreilles. Était-il vraiment seul ? Comment savoir ?

Malgré sa cécité, il ressentait une présence. C'était comme si elle se tenait juste derrière lui, le jugeant de toute sa hauteur.

Fuir toujours fuir, plus vite, ne pas faire attention à la douleur. Essayer par miracle de ne pas se cogner contre un rocher ou autre. Par malchance, il se retrouva au bord d'une falaise et tomba sans pouvoir espérer se rattraper.

Une chute infinie ; un choc violent ; des larmes traîtresses et un léger liquide carmin sortant de l'embrasure de ses lèvres. Le souffle coupé, il devait vite respirer !

Le choc le rendit insensible, le temps d'une seconde. Mais la douleur fit son chemin et le frappa brutalement. Ses os s'étaient brisés, un atroce hurlement s'éleva.

La souffrance était la seule chose qui ressortait de son corps. Pourtant, malgré ce qu'il venait de traverser, il continua, s'entortillant comme il le pouvait pour se redresser. Sa mâchoire se contracta, ses dents grincèrent. Sa carcasse s'agita tel un mort-vivant, ses membres ne cessant pas de trembler. Sa main droite était désormais hors d'usage.

Cela avait l'air impossible, une folie pure, il allait à sa perte en continuant ainsi. Mais plus rien ne pouvait l'arrêter.

Son ventre se contracta, le faisant vomir plus de sang qu'il n'en perdait déjà. Il ressemblait à une fontaine rougeoyante, faisant ruisseler sur le sol la vie elle-même. Son aveuglement, l'empêchait de voir le spectacle qui se déroulait. La déchéance d'un être humain, qui désormais se retrouvait en bas de la chaîne alimentaire, n'étant plus qu'un bout de viande saignant.

Douce fut la descente vers les enfers, tendre fut la capitulation de l'esprit torturé.

Chaque mouvement, lui arrachait des supplications, toutes différentes les unes que les autres.

La hargne de vaincre n'était plus au stade d'une simple fuite, ceci comptait désormais comme un combat. Montrer qui était le plus fort entre lui et ce qui le poursuivait.

Ô grands étaient ses rêves, ses espérances, ses souvenirs. Ceux-ci n'étaient plus que poussière dans l'instant présent.

Écraser pour dominer, dominer pour gagner, telles étaient les règles de l'humanité.

L'homme ne possédait plus rien. Il n'était plus qu'une inqualifiable créature.

Par surprise, sa jambe se fit tirer en arrière, lui faisant perdre le peu d'avance qu'il avait réussi à prendre dans son piteux état. Son corps était écrasé sous un poids dont il ne connaissait pas la provenance. Il ne sentait plus ses membres. Ils ne semblaient plus être raccordés à lui.

Il cria qu'on le lâche, qu'on ait pitié de sa pauvre âme. Aucune réponse ne lui fut accordée. Ce silence le terrifia. Bien plus que n'importe quelle réponse. Il ne cessait de gesticuler tel un vers de terre.

Un coup sec lui brisa la nuque, achevant enfin sa lutte acharnée. Sa tête retomba mollement sur le sol, sa langue pendante. Ses yeux étaient encore humides par les larmes.

Mais plus aucune lueur de vie ne ressortait de ceux-ci.

Cette chose qui le poursuivait, n'était autre que vous cher lecteur. Vous qui ne cessiez de l'observer avec insistance, essayant de l'arrêter par n'importe quel moyen. Poursuite ayant mené jusqu'à l'irréparable. Ne soyez point surpris. Ne le sentiez-vous pas au fond de vos tripes ? Sa peur qui ravissait vos papilles dans un pur délice. Cette puissance divine que vous ressentiez en le malmenant.

Il était la souris et vous le chat.

Vous n'avez pas réfléchi une seule seconde à lui confisquer sa vue ; ses membres ; sa vie. Peut-on vous qualifier de monstre ? D'insensible ? D'inhumain ?

C'est à vous de répondre à cette question.

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