Ma LU

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Allongée sur un lit, repeint par tes soins en bleu canard en plein mois d'août. C'était la fin de notre année de terminale et nos partions sur des chemins différents. Toi, tu resterai en Normandie pour faire médecine. J'aurais pu le deviner lorsque je t'ai rencontrée pour la première fois, discrète, avec tes mains fines et tes gestes aux paroles posées, un sourire bienveillant toujours aux lèvres. Moi, je partirai, loin, pour repartir de zéro.

C'étais la fin de ta protection, de ta présence rassurante au quotidien. Depuis deux ans, tu me protègais, du monde mais surtout de moi-même. Je n'avais jamais eu de protection, tout le monde voyait en moi la fille forte et sarcastique, sans voir que je sombrais petit à petit. Tu as été la gardienne de mon corps celle qui me forcait à manger, celle qui me forcait à ne pas me faire de marques. Chaque fois que je revenais les bras ensanglantés, tu ne te fachais jamais. Avec une délicatesse ultime tu nétoyais les plaies, sans me gronder, ni abandonner mon cas. À de multiples soirées, tu as été là quand je m'abandonnais à l'ivresse, je voyais dans tes yeux la souffrance que cela te faisait de m'entendre dire tout ses projets pour partir, pour t'abandonner; mais inlassablement tu me serais dans tes bras, collais ton front contre le mien, me fixant dans les yeux à travers mes larmes de désespoir.

J'ai souvent senti le souffle me manquer dans ces moments, je voyais en toi ce que personne d'autres ne m'apportaient. Tu croyais en moi, tu me faisais me sentir belle, à travers tes yeux je voyais quelqu'un qui en valait la peine. Je détestais mon corps mais tu en prenais soin, je ne valais rien à mes yeux et tu listais mes qualités, je n'avais plus d'espoir et tu rallumais sans cesse la flamme.

En cette après-midi chaude d'août, ton copain et une de nos potes endormis à nos cotés; on se fixait. C'était l'une des dernières fois où on partagerait cette osmose. Je ne voyais que tes lèvres qui avaient délivrées tant de fois des baisers sur mon front. Je ne sais pas ce à quoi toi tu pensais mais l'envie irréprésible d'embrasser la seule personne pour qui je continuais d'essayer et de vivre, me faisais vibrer.

On s'était souvent appeléé et parlée au téléphone et par message. Tu m'envoyais un bisou chaque soir pour me dire bonne nuit et éviter les mauvais rêves, on s'aimait comme de vrais amis, des soeurs, des amantes, je n'en sais rien. On se désirait, mais comme pour partager le trop pleins d'amour qui nous animait. On désirait ce que l'autre voyait en nous, j'aimais l'image de moi qui flottait dans tes yeux et tu devais apprécier que quelqu'un voit plus qu'une fille gentille en toi. Tu étais mon essentiel, sans toi, je n'aurais pas tenu.

En regardant tes lèvres, le désir d'échanger ce baiser, juste un baiser était brûlant. Mon coeur battait à tout rompre, nos corps se touchaient, on se rapprochait et nous savions que c'était mauvais; que cela pouvait gacher notre amitié, et rajouter des préoccupations dont aucune de nous deux n'avaient besoin.

Les deux autres finirent par se réveiller avant qu'une décision soit prise, qu'un acte soit posé. Je suis partie dans la soirée, te remerciant encore pour toute ton aide qui m'avait tant sauvée pendant ces deux années. A ton habitude, tu m'enlaça et me fit des baisers des plus tendres sur le front et les joues.

Tu commença ton année et moi, je partis pour commencer la mienne. On continua à s'appeler, sachant toutes les deux au fond de nous que ce moment aurait pu changer notre amitié a tout jamais.

Encore aujourd'hui je me demande parfois ce que ce baiser aurait changé, s'il aurait été le début d'une grande histoire d'amour ou la fin de notre relation si particulière et si précieuse à mes yeux. Une seule chose est sure, je t'aimais et continue de t'aimer et cela sans pouvoir qualifier l'amour que je te porte.

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