Des jours et des nuits
Fanny Guidez était officiellement considérée comme suicidaire et dépressive.
Cela l'amusait en réalité.
Dépressive et suicidaire, elle l'était depuis le collège.
Elle l'était depuis que ses petits camarades l'avaient prise en grippe.
Vous savez le harcèlement ?
Elle en fut l'une des premières victimes.
Mais Fanny se fortifia.
Elle apprit à survivre.
Elle apprit à être dure.
Elle apprit à être seule.
Son frère, inquiet pour elle depuis tant d'années, ne la lâchait pas.
Il l'avait installée chez lui.
Entre sa femme et ses gamins.
Fanny se sentait tellement déplacée dans cet intérieur bourgeois. Avec cette télévision écran plat, ses livres bien classés, ses jolies photographies encadrées...
Il y avait même sa photographie.
A croire que son connard de frère l'aimait.
Monsieur Parfait !
" Tu pourrais aider Elodie, Fanny, claqua son frère, un soir en rentrant du boulot. Tu ne fais rien de tes journées et Elodie doit cuisiner pour une personne de plus."
Connard de frère.
Le soir-même, Fanny était partie.
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Des jours et des nuits, dans la rue et dans le froid.
Comment survivre dans la rue ?
Se cacher, se faire oublier et apprendre à déjouer les dangers.
Fanny savait.
Mais elle aurait donné n'importe quoi pour une dose.
Une femme dans la rue était une proie.
Fanny savait se transformer en être informe et invisible. Dormir entre les voitures, contre les murs et se faire oublier.
Ne pas se laver et conserver un jean, d'une saleté repoussante.
Oublier qu'elle a été une femme.
C'était la clé de la survie.
Dans sa poche, un téléphone de 900 euros.
A y penser, cela la faisait sourire.
Cela en faisait des boîtes de raviolis...et des doses...
Qui sait ?
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