Chapitre 13 - La Confrérie de Vincelard (4)

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Samedi 12 septembre 1964, château de Vincelard, Blonay

François-Xavier entra dans la salle, poussé par Dorian, et monta quelques marches pour arriver sur le podium, on entendait une douce mélodie jouée au piano, un concerto de Beethoven. Les projecteurs l’éblouirent, il finit par distinguer les confrères, une vingtaine, assis sur quatre rangs dans l’obscurité. Ils étaient vêtus tous à l’identique : une cape rouge avec un gros pendentif doré sur la poitrine indiquant leur grade, une casquette noire sur la tête. Il ne reconnut pas son père.

Il parcourut le podium jusqu’à l’autre bout, en essayant de se rappeler ce que Dorian leur avait enseigné, puis revint vers la porte. Aucun bruit, aucun applaudissement. Le chorégraphe lui fit un signe avec le pouce pour lui indiquer que c’était bien et envoya le suivant, Hiroshi, qui marcha très lentement pour ne pas tomber, empêtré dans sa longue robe.

Suivirent ensuite les jumeaux, qui provoquèrent quelques murmures dans l’assistance, Laertes, Koen, Frédéric et enfin Djibril. Les murmures furent plus forts, la plupart des compagnons ne savaient pas qu’un Noir allait être intronisé, et c’est lui qui fit la plus forte impression.

Jean-Pierre referma brièvement la porte, Dorian dit aux jeunes gens d’enlever leurs robes et de ne garder que leurs slips. FX faillit protester, mais se retint. Ce fut de nouveau lui qui passa le premier. Les confrères restèrent muets, on les avait remis à l’ordre après le passage de Djibril. Les autres suivirent dans le même ordre.

FX ne pensa même plus à protester lorsque le chorégraphe leur dit d’enlever leurs slips pour le dernier passage. Il sentit sa bite rapetisser et son cœur battre la chamade. Il ne pouvait plus reculer, il monta sur le podium, le traversa d’un bout à l’autre, trop rapidement. Il respira profondément lorsqu’il eut terminé et regarda défiler ses compagnons avec un petit sourire. Les jumeaux se massèrent même le pénis pour provoquer une légère érection avant de monter sur le podium, déclenchant des rires dans l’assemblée.

Après le passage de Djibril, Dorian leur dit de remettre leurs chaussons, mais pas leurs slips, et d’attendre quelques minutes, le temps que les confrères délibérassent et fissent leur choix, il se rendit dans la salle et ferma la porte.

— Nous sommes tous vivants, dit Frédéric, le ridicule ne nous a pas tués.

— Parle pour toi, dit FX, ce n’était pas si facile pour moi. Je pense que vous êtes tout le temps à poil dans votre école et que vous baisez sans arrêt.

— On doit aussi étudier de temps en temps.

Jean-Pierre rouvrit la porte, ils montèrent les huit sur le podium. Les confrères les applaudirent chaleureusement, puis la lumière se ralluma et les projecteurs s’éteignirent, quelqu’un ouvrit les volets. Un homme au premier rang se leva et prit la parole :

— Merci Messieurs pour ce défilé, je sais que ce n’était pas évident. Je me présente : je suis le Gouverneur, Edmond, le propriétaire du château et des vignobles. Nous nous appelons par nos prénoms, sauf lors des cérémonies où nous utilisons nos titres. Je vous demanderais de vous présenter.

Dorian traduisit rapidement pour les non-francophones, les novices déclinèrent leurs prénoms. Le Gouverneur présenta ensuite les officiers de la confrérie :

L’Échanson, son fils Jean-Pierre, chargé des repas et des boissons ;

Le Tabellion, Charles, le père de Frédéric, chargé des aspects juridiques ;

Le Chambellan, Urbain, le chauffeur de Charles, chargé des chambres ;

Le Culottier, Francis, le tailleur, chargé des habits d’apparat et des costumes ;

Le Maître de Cérémonie, Dorian, le chorégraphe, chargé de la mise en scène ;

Le Conseiller au Trésor, Hubert, le banquier père de François-Xavier, chargé de la pompe à phynances ;

Le Prévôt, Georges, le directeur du gymnase où était allé Frédéric, chargé de faire régner l’ordre et la discipline, surnommé aussi le Père Fouetteur ;

Le Chancelier, Séverin, le photographe qui avait vendu l’appareil à Koen, chargé des archives de la confrérie ;

L’Officier de Santé, Arthur, l’urologue de la clinique Beaumont, chargé de l’hygiène ;

Les Bâtisseurs, Graf & de Bruson, les architectes, chargés du décor des alcôves, dont personne ne connaissait les prénoms ;

Le Connétable, Martin, le masseur des architectes, titre honorifique puisqu’il n’avait aucune fonction ;

Le Préfet de Berne, Franz, chargé des relations avec les confréries amies en Suisse alémanique, il se promettait d’organiser plus souvent des échanges ;

Le Chantre, Alexandre, le pianiste, chargé de l’ambiance musicale ;

Le Poète, Yehadiel, l’ange déchu, chargé des écritures.

Il y avait encore quelques autres arpètes et compagnons qui ne furent pas présentés.

Le Gouverneur monta sur le podium, fit lever l’assemblée. Il était accompagné du Maître de Cérémonie qui tenait une boîte contenant quatre pendentifs. Il les passa au cou des innocents en leur disant :

— Au nom de Priape et de Bacchus, je vous intronise dans la Confrérie de Vincelard au grade d’Arpète !

Il posa sa main sur leurs couilles, avant de leur donner l’accolade. Il fit ensuite prêter serment à tous, les invitant à respecter les confrères, à respecter le règlement et à ne divulguer à personne quelles étaient les véritables activités de la confrérie.

L’Officier de Santé monta ensuite sur le podium, rappela les règles d’hygiène et l’usage obligatoire du préservatif pour les pénétrations. Il examina ensuite les génitoires des arpètes et des conviés, dégagea le méat et l’ouvrit, pour vérifier qu’ils n’avaient pas de maladies vénériennes. Il s’assura aussi qu’ils n’avaient pas d'hémorroïdes.

Le Maître de Cérémonie donna ensuite lecture du déroulement de la première ronde :

L’arpète François-Xavier serait avec le Gouverneur et l’Échanson dans la première alcôve pour un voyage en Grèce Antique ;

Le convié Hiroshi serait avec le Chantre et le Culottier dans la deuxième alcôve pour un voyage en Angleterre ;

Les conviés Sacha et Vania seraient avec les Bâtisseurs et le Connétable dans la troisième alcôve pour une expérience scientifique ;

Le convié Laertes serait avec le Chambellan et le Maître de Cérémonie dans la quatrième alcôve pour un voyage dans l'espace ;

L’arpète Koen serait avec l’Officier de Santé et le Tabellion dans la cinquième alcôve, la clinique ;

L’arpète Frédéric serait avec le Poète et le Prévôt dans dans la sixième alcôve, l’Enfer ;

L’arpète Djibril serait avec le Chancelier dans la septième alcôve pour un voyage à Hollywood.

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