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Une caravane traversait les dunes de sable brûlant malgré le feu du soleil se réverbérant sur le sol en créant son lot d’illusions et de mirages, mais le méharé les guidant avait appris à reconnaître le vrai des les dérives de l’esprit. Il était né dans ce désert, y avait vécu la plus grande partie de sa vie et savait qu’il y mourrait. Le sable faisait partie de lui et de son âme, de sa culture et de sa religion, et bien qu’ayant reçu l’éducation des Seigneurs en Eurasie, il avait pris le parti de revenir sur ses terres natales afin de suivre les règles ancestrales de son peuple, les guidant à travers cet âge perdu sans foi ni esprit, respectant au mieux les traditions transmises de bouche de chef à oreille de chef.
Perdu dans ses pensées, réfléchissant à l’avenir de son peuple à travers ce désert dont le seuil de radiations dues à la Guerre Thermonucléaire Globale et à la Guerre Interstellaire était redevenu acceptable pour l’homme, un reflet lumineux inattendu sur sa gauche le tira de ses réflexions. Arrêtant sa monture et la caravane, l’homme descendit de son chamodaire pour se diriger vers une petite dune, tandis qu’une jeune méharée le rejoignait en remontant la colonne après avoir lancé sa monture au pas de charge.
— Père, que se passe-t-il ? Ce n’est qu’une dune ! *
Sans un regard pour la cavalière, le vieil homme répondit du ton des sages.
— Le Dieu des Sables nous fait un cadeau. Il serait impoli de le refuser. *
Soupirant, la jeune femme le laissa faire et entreprit de lancer une bardée d’ordres à ses hommes. Il commençait à se faire tard, et mieux valait commencer à installer le bivouac pour la nuit. Toute occupée à ce qu’elle entreprenait, elle ne vit pas le chef marcher vers la dune puis se mettre à courir avant de tomber à genoux et creuser frénétiquement le sable. Ce ne fut que lorsqu’il l’appela qu’elle se tourna enfin vers lui pour observer les raisons de son excitation. Continuant de creuser, le vieil homme était en train de déterrer un corps de grande taille enfoui aux côtés d’un immense sac antigrav éteint. Courant le rejoindre accompagnée d’hommes vaillants, la jeune femme entreprit de creuser elle aussi, libérant une tête aux lèvres desséchées, aux yeux creusés et aux paupières closes tout en s’extasiant.
— C’est un géant ! Un Géno-modifié des légendes ? *
— Je ne sais pas… Il me paraît un peu petit pour ça…*
— Mais… Et le matériel à ses côtés ? *
— Ça, il n’y a pas de doutes à avoir, c’est une armure empirique…*
— Regarde, père, ses lèvres bougent…*
Incrédule, le doyen se pencha pour écouter, ne comprenant pas comment cet homme pouvait avoir survécu. Il avait visiblement été enseveli par la tempête de sable, et cette dernière avait duré presque trois semaines. Quand enfin son oreille frôla les lèvres parcheminées, il entendit cette voix rauque de s’être trop tue, avant de blêmir et de se redresser en tremblant de tout son corps.
— Chef… Père ! Que se passe-t-il ? On dirait que tu as subi un mauvais sort…*
— Presque, ma chérie, presque…*
— Mais qu’a-t-il dit ? *
Se tournant lentement vers elle, les yeux emplis de larmes, il murmura.
— Rark le Rouge est vivant…*
*Traduit du Malgauareg
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