1 - Le vrai visage de Sybèle
Devant l’entrée d’une grande caverne au pied des montagnes, Thorin, fils de Thor, vérifiait que son fidèle marteau et son bouclier étaient bien prêts pour le combat qui les attendait. C’est une curieuse troupe qu'il avait avec lui, et si on lui avait dit qu'il se retrouverait face à une entre gobeline avec ces créatures à ses côtés, il ne l’aurait jamais cru. Il en riait intérieurement. Le tournant qu’avait pris sa vie ces deux derniers jours méritait réflexion. Le temps que ses compagnons se préparent également, Thorin le nain se remémora cette longue journée si particulière.
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Tout commença la veille, Thorin, fils de Thor, arrivait à la taverne de l’orphelin en cette fin d'après-midi. La salle était déjà bien remplie. Nombre d’habitants des souterrains venaient ici pour échapper à la misère de leur quotidien. Du haut de ses 2 étages, la taverne contenait une salle principale en bas pouvant accueillir pas loin de 60 âmes. Plusieurs tables et chaises ou bancs en bois offraient un confort acceptable pour les clients. Un bar au fond avec un vieil homme un peu aigri, Zonthair, s'il se souvenait bien de son nom, assurait le strict minimum en matière de service. Bière et soupe étaient les choses les plus commandées ici.
Le haut était accessible depuis le fond de la taverne, mais de sa longue mémoire de nain, personne n'était jamais monté. Le haut était les quartiers de la tavernière, et tout le monde respectait cela. Il connaissait bien cette grande taverne, lui-même était déjà venu ici en tant qu’orphelin, afin que la charmante tavernière Lilia lui donne une bonne soupe bien chaude et des couvertures pour passer l’hiver. Son passé n’avait pas été simple, on peut même dire que cela tient du miracle qu'il soit encore en vie.
Quoi qu'il en soit, Thorin décida de se fondre dans la masse, il avait besoin de renseignement, et visiblement, ce soir, un aventurier important allait passer à la taverne. Il commanda un tonneau de bière. Il n'était pas très riche, mais si ce soir marquait le tournant dans sa vie comme il l'espérait, il pouvait bien dépenser 1/10 de sa fortune dans de l’alcool. Une fois installé à sa table, que ce soit par cupidité pour son alcool ou par sympathie, un homme lui demanda s' il pouvait s’asseoir avec lui. Thorin accepta, mais une chose était sûre, il ne partagerait pas son alcool.
L’homme était grand, pour Thorin, sûrement une taille moyenne d’un point de vue d’une autre espèce. Les cheveux courts, il semblait sortir d’un monastère. Il possédait une tenue de moine avec un bâton de marche, qui semblait assez abimé. Thorin, en tant que grand guerrier, reconnut face à lui un homme qui avait sûrement déjà combattu aussi. Ses yeux ne brillaient pas de la flamme de jeunesse habituelle des jeunes hommes souhaitant partir à l’aventure. Là, c'était plus les yeux de quelqu’un qui avait déjà vécu beaucoup de choses. Il faisait une bonne impression à Thorin. Neiro, de son nom de moine, buvait sa propre pinte en faisant connaissance avec le nain. Ce qui fit plaisir à ce dernier qu’un homme de foi lui accorde son attention et discute autour d’une bonne bière.
Mais Thorin restait aux aguets, il n’oubliait pas la raison de sa venue ici. Et visiblement, Neiro le moine était aussi sensible à son environnement. Au moment même où Thorin apercevait une créature bizarre qu'il ne reconnaissait pas. Une jeune femme, avec la peau verte et de grandes cornes de bois qui lui sortait du front. Neiro lui cria :
- “Hey jeune fille ! Venez boire un coup avec nous !”
Choquée, la jeune tieffeline aux grandes cornes refusa d’un mouvement de tête et repartit précipitamment dans le fond de la salle. Curieuse créature, se dit Thorin, il n’en avait jamais vu ici. Il garderait cette créature démoniaque à l'œil. Au même moment, un jeune halfelin, tout juste adulte, vint se poser à leur table, une pinte à la main, il semblait avoir envie de se faire de nouveaux amis. La discussion reprit avec Neiro et l’halfelin, Loyd, qui discuta avec eux gaiement autour de bonnes bières. Cette taverne était sacrement animé ce soir, pensa-t-il.
Soudain, du coin de l'œil, Thorin fils de Thor vit la jeune créature cornue grimper les marches vers les quartiers de la tavernière. Sûrement une vilaine voleuse, se dit-il. Je devrais lui régler son compte sur le champ ! Pendant sa réflexion, à savoir si le plus grave était de monter dans les quartiers de la tavernière, interdits d'accès, ou empêcher une voleuse d’agir, une jeune halfeline, petite et rapide, avec une longue chevelure rouge sang se faufila dans les escaliers. Elle semblait armée d’une grosse massue. Quelques secondes après, un énorme “Bang” retentit dans la salle. Le tumulte environnant s'arrêta une petite seconde et repartit de plus belle, comme si de rien n'était.
Mais Thorin comprit, l’halfeline venait d'assommer la créature cornue. Une voleuse qui assomme une voleuse ? Cela en était trop pour lui, il devait intervenir.
Il se précipita dans les escaliers, avec son flux de bière sur l'épaule, visiblement Loyd, l’halfelin venu boire des coups avait vivement réagi lui aussi, c'est ainsi qu'ils se retrouvèrent tous les deux sur le palier du haut. Un long couloir avec 3 portes s’offrait à eux. Et aucune trace du corps de la créature démoniaque.
Thorin prit les devants, et ouvrit la première porte. Il vit simplement des flux de bières, des ingrédients pour la soupe, quelques couvertures que Lilia distribuait aux enfants des rues. Cela semblait être une simple réserve. Il sortit de la pièce et enfonça la seconde porte. Il entra dedans suivi de Loyd, cette fois la salle était un peu plus grande avec une jolie tapisserie au mur et...
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C'était une humiliation que Thorin, fils de Thor, préférait oublier. Ce n'était jamais agréable de se faire avoir de la sorte. Il regarda son nouvel ami Neiro, qui semblait perdu dans ses pensées aussi. Ce moine aventurier lui plaisait vraiment bien. Mais son esprit était maintenant redirigé vers cette caverne : combien de créatures vivaient à l'intérieur ? Thorin n’avait pas peur, il en avait vu d'autres, mais il se demandait si ces nouveaux compagnons seraient à la hauteur.
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Neiro fixait cette entrée caverneuse, il espérait qu'il était en train de suivre les bonnes personnes. Ces jeunes adultes semblaient bien être des orphelins des rues de Sybèle. Il ne restait plus qu'à s'assurer qu'ils n'étaient pas comme les autres, et que c'était bien eux qu'il fallait surveiller.
Il échauffa doucement ses poignets, un combat sanglant allait avoir lieu. Les gobelins ne sont pas des créatures très fortes, mais nombreuses, elles peuvent être mortelles. Avant de rentrer dans cette caverne, il se remémora le moment où tout avait si vite basculé...
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Neiro était resté en bas. Il avait été envoyé ici pour une bonne raison, et ce nain l'était peut-être. Il savait que le tournant de quelque chose allait avoir lieu ce soir, mais il ne savait pas exactement quoi ? Son monastère l’avait envoyé ici en mission, et il comptait bien la réussir. La première étape de sa mission était de trouver les orphelins. Ce nain, s'il avait bien grandi ici, même si cela semblait étrange vu ces cicatrices de combattant et sa façon d'être qui ressemblaient plus aux nains des collines de l’Est, pouvait être sa mission. Il ne fallait pas le perdre de vue.
Neiro avait entendu le premier bang, sûrement la tieffeline qui se faisait assommer, mais il avait choisi de ne pas réagir pour le moment, il ne savait pas où il mettait les pieds, et son passé lui avait appris à être prudent. Thorin semblait être un bon gaillard, prêt à aider les autres, cela lui plaisait. Il n’avait pas trop d’avis sur Loyd pour le moment, ce petit halfelin cachait des choses. En tout cas, Thorin, avec la fougue de sa jeunesse, n’avait pas hésité à monter et bizarrement Loyd l’avait immédiatement suivi.
C’est à ce moment que Neiro sentit une sensation de froid au niveau des côtes. Comme de l’acier sous sa tunique. Avant qu'il ne puisse réagir, un elfe lui dit d’une voix rauque :
- “J'ai vu les regards que vous lancez là-haut. Notamment quand la tieffeline s'est fait assommer. Je ne sais pas qui vous êtes, mais je ne vous ai jamais vu en ville, vous n'êtes pas d’ici. Montez sur le champ, ou vous sentirez ma dague s’enfoncer plus profondément dans vos côtes. »
Neiro n’avait d’autre choix qu'obéir. Il sentait que l’elfe ne rigolait pas, et surtout, qu’il était très habile. Au moindre mouvement suspect, cela pouvait être la fin de sa quête qu'il n’avait même pas commencée. Le moine monta les marches, toujours suivi par son agresseur, ce dernier le fit entrer dans la seconde porte de l'étage.
Une petite salle, avec 4 chaises, une table, des petits chandeliers et une tapisserie d’une magnifique femme, très petite, avec de beaux cheveux rouges, des yeux bleus et qui semblent s’envoler vers le ciel. Elle a une dague dans la main gauche et une bourse dans la main droite. Dans un coin de la pièce, la tieffeline, l’halfelin et le nain sont tous les 3 au sol, inconscient. Le tonneau de bière du nain roulait doucement sur le sol, Dieu merci, il était fermé, pensa Neiro.
- “Qu’est-ce que tu fous Loken ?!” Cette voix surgit de derrière la porte. La jeune halfeline à la chevelure rouge était restée cachée derrière la porte, cette fois une dague à la main, prête à tuer.
- “Calme-toi veux tu” lui répondit le dénommé Loken. “J’en ai attrapé un autre qui semble suspect.”
- “Très bien, tuons-les sur le champ et remontons monter la garde” dit l’halfeline d’un ton autoritaire.
- “Non, torturons-les pour savoir tout ce qu'ils savent. On a besoin d’informations.”
- “On s’en fout ! Ce sont sûrement des espions de là-haut. On les bute, on envoie un message fort et fin de l’histoire.”
- “On ne peut pas simplement les tuer ! On a besoin de savoir qui les envoie nous espionner !” Le dénommé Loken , le grand Elfe à la couleur de cheveux argentés, semblait de plus en plus énervé.
Le ton montait entre l’elfe et l’halfeline aux cheveux rouges. Ils ne savaient visiblement pas s' ils devaient les tuer maintenant, ou après les avoir torturés. N’arrivant pas à prendre de décision, ils décidèrent d’aller chercher conseils. Ils partirent de la pièce. Neiro reconnut le bruit d’un cadenas posé sur la porte. Ils étaient coincés ici pour le moment.
Il se précipita vers Thorin pour lui faire reprendre connaissance. Rapidement le nain revint à lui et Neiro lui expliqua la situation. Ils décidèrent d’un commun accord de réveiller la tieffeline et le jeune halfelin. Ils leur exposèrent la situation, et se présentèrent. Neiro sentait qu'ils cachaient tous quelque chose et qu'ils ne disaient pas tout. Mais lui-même avait bon nombre de secrets, il ne pouvait leur en tenir rigueur.
Quand le moment de se présenter arriva à son tour, la porte s’ouvrit à la volée, et Lilia entra. C’était une jolie femme dans la force de l’âge, de taille moyenne avec une longue chevelure blonde bouclée. Elle était vêtue d’une longue robe de soie verte, avec un joli bandana de la même couleur qui venait soutenir sa chevelure. Elle était apprêtée de plusieurs bijoux en or, aussi bien autour du cou qu’autour des poignets.
- “Que faites-vous ?! Expliquez-vous !” Elle fixa en priorité Thorin, Loyd et la tieffeline. Neiro comprit rapidement qu'elle les connaissait. Peut-être qu'ils avaient une chance de s'en sortir.
Thorin prit la parole, comme bon meneur d’hommes qu'il était :
- “On a voulu venir à la rescousse de quelqu’un qui se faisait agresser et on s’est fait agresser à notre tour !” dit-il en touchant le début de bosse qu'il avait derrière la tête.
- “Vous savez très bien que vous n’avez rien à faire là-haut ! Expliquez-moi plutôt la raison de votre présence ici ce soir. Cela fait un moment que je ne vous avais plus vu tous les 3.”
Thorin lui expliqua :
- “Pour ma part, je l’avoue, je suis venu en espérant avoir des réponses à mes questions. J'ai entendu qu’un grand aventurier passerait ce soir, et j'ai soif de connaissance. J'ai besoin de réponses.” Dit-il en toute honnêteté.
Loyd prit la parole :
- “Je recherche mon mentor, Darlik. J’ai remonté une piste qui m’a mené ici, un certain Dienosor serait de passage et j'espérais qu'il puisse m’aider à retrouver mon mentor disparu. Cela fait déjà 6 mois que je ne l’ai plus revu.”
- “Et vous deux ?” dit Lilia en regardant consécutivement Neiro et la tieffeline.
- “J’ai besoin de réponses également, je suis à la recherche de braconniers.” Balbutia la tieffeline, visiblement, les interactions sociales n'étaient pas son fort. Elle semble avoir peur dès qu’elle est en présence d’humains, pensa Neiro.
- “Pour ma part, je cherche à aider, simplement, les gens dans le besoin gente dame” dit poliment Neiro avec son plus beau sourire.
Son sourire ne semblait avoir aucun effet sur Lilia. Elle reprit en toute sérénité :
- “Bon, pour ceux que je connais, je sais que vous n'êtes pas de mauvaises personnes, et je suis même assez surprise que vous ayez réussi à remonter la piste comme quoi Dienosor était ici.” “Dieu merci, vous n'êtes pas des envoyés de là-haut, vous avez de la chance que je vous reconnaisse tous les trois.”
“Malheureusement pour vous, Dienosor est déjà reparti.” Dit-elle à destination des 3 orphelins des rues. “Si c'est des réponses dont vous avez besoin, je peux vous aider. On va dire que j’ai plutôt le bras long ici. En revanche, je vous demanderai un service avant.”
Thorin prit directement la parole :
“J’accepte, que devons-nous faire ?”
Loyd et la tieffeline acceptèrent un peu plus hésitant, visiblement, au-delà de son charisme, cette Lilia avait une force de persuasion et une manière bien atypique d’amener les gens à faire ce qu'elle voulait. Elle semblait cependant perspicace, son regard faisait très clairement comprendre à Neiro qu'elle n’avait aucune confiance en lui.
- “Comme vous le savez bien, pour ceux qui ont grandi ici du moins.” Son regard se tourna une demi-seconde vers Neiro. “Les orphelins sont nombreux dans les rues souterraines. Plusieurs meurent de faim, mais comme vous avez pu le voir, j’arrive à distribuer assez de nourriture et de couverture pour sauver la plupart d'entre vous. Étrangement, beaucoup d’orphelins ne viennent pas récupérer de la nourriture ces derniers temps. Trop peu ne reviennent plus à la taverne, et il y a si peu de raisons de rater un bon repas chaud gratuit que cela m’a inquiété.”
“J’ai donc demandé à un de mes hommes d'enquêter. Et il se trouve que des convoyeurs kidnappent les enfants des rues et les amènent à un manoir à l'ouest de la ville. Pourquoi, je n’en ai aucune idée.”
“Je vais avoir besoin de vous pour enquêter sur ce manoir qui est censé être abandonné. Sauvez les pauvres orphelins, que vous étiez vous-même, et je vous aiderai au mieux dans vos recherches personnelles.”
Les 4 aventuriers en devenir acquiescèrent, et c'est ainsi que raccompagner par Andela, la jeune halfeline aux cheveux rouges, qui avait assommé la plupart d’entre eux, qu’ils sortirent de la taverne de l’orphelin. Andela leur expliqua brièvement où se situait ce manoir. Tout à l'Ouest, à deux bonnes lieues d’ici, après les bâtisses en ruine, et elle leur souhaita tout de même bonne chance avant de repartir dans la taverne.
Ils prirent la direction du manoir. Mais Neiro avait besoin d’en savoir plus. Était-ce bien eux ? Avait-il trouvé les bonnes personnes ? Il se devait d’en apprendre plus sur eux.
- “Alors jeune tieffeline, comment doit-on te nommer ?” demande-t-il poliment
- “Je n’ai pas de nom. On ne m'en a jamais donné d'où je viens”, répliqua-t-elle simplement.
- “Oh et bien, d'où viens-tu alors ?”
- “Je ne sais pas exactement non plus, de la forêt” elle fit un drôle de geste avec ses épaules, comme pour souligner le fait qu’elle n’en avait vraiment aucune idée.
- “Mais elle se moque de nous elle ? Comment peut- on ne pas savoir d'où l'on vient, ni même à quel clan on appartient ? Dis Thorin, légèrement éméché par sa bière, tout en fronçant les sourcils. Visiblement, il semblait réfléchir profondément.
La tieffeline ne répondit pas. Elle semblait bouder devant la brusquerie du nain. Décidément, Neiro avait bien à faire à des personnes qui étaient encore enfants il y a quelques jours. La marche continua, ils passèrent ruelle après ruelle. Effectivement, les rues, si on pouvait les appeler ainsi, étaient infestées de rats et de petites créatures que Neiro n’avait jamais vues. Quelques chats de rues s'amusaient à chasser, et quelques enfants dormaient à même le sol dans l’angle des rues. Les souterrains de Sybèle ressemblaient bien à ce qu'il avait entendu récemment. Famine, mendiants, rats et détritus parsemaient le paysage. Ce n’était décidément pas un endroit chaleureux. Pauvres enfants, pensa Neiro, comment survivre dans de telles conditions…
- “Dis-moi Thorin, j'ai fini ma bière, tu ne me servirais pas un verre en gage de cette belle amitié ?” demanda Loyd, légèrement éméché également. Visiblement, tout le monde n’est pas égal face à l’alcool, pensa Neiro. L’halfelin avait à peine bu une pinte qu’il était déjà sous l’emprise de l’alcool.
- “Sache une chose, halfelin. L’alcool est une possession importante et je n’en partagerai pas sans bonne raison .” Thorin terminait sa phrase, avec la bouche à moitié remplie de bière pendant qu'il prenait son alcool directement à la source, dans son énorme tonneau.
Ils continuèrent leur route, avançant au milieu des rues sales et remplies de mendiant.
- “Ça a quel goût l’alcool ? demanda soudainement la jeune tieffeline, qui, visiblement, était devenue plus curieuse que boudeuse.
- “Tu ne sais donc pas ?” La tête à moitié dans son tonneau, Thorin rigolait à cette question soudaine et innocente. “Aller goûte un peu, mais en échange tu m’expliques pourquoi tu ne sais pas d'où tu viens.”
La tieffeline semblait tout excitée à l'idée de goûter de l’alcool. Elle prit une grosse gorgée, et toussa fortement. Ce qui fit rire les 3 hommes. Neiro était cependant très intéressé par son histoire, il avait besoin de vérifier qu'elle était bien une des personnes qu'il recherchait.
“Comme je vous l’ai déjà dit. Je viens d’une forêt. Je n’ai pas de souvenirs plus anciens que ceux de ma famille, composée de lapin, d'écureuils et de cerfs, au fin fond d’une grande étendue d’arbres. J'ai été élevé là-bas, et j'ai grandi au milieu de la nature. Malheureusement, des braconniers m’ont un jour arraché à ma forêt. Ils m’ont vendu en tant qu’esclave.” Elle semblait triste de se rappeler tout ça, visiblement, les plaies du passé n'étaient pas encore totalement refermées.
- “Mais comment tu t’es retrouvé ici ?” demanda Neiro. Que je sache, il n’y a pas de forêt dans Sybèle.
- “J’ai réussi à m’enfuir.” Expliqua simplement la tieffeline. Une lueur noire passa dans ses yeux à ce moment, remarqua-t-il. “J’ai volé l’argent de mes tortionnaires et j'ai pris le premier bateau, qui me mena à Sybèle. On m'avait promis une belle ville accueillante, qui acceptait toutes les espèces, toutes les races, et où je pourrai démarrer une nouvelle vie. Où je serai traité équitablement. On avait juste oublié de me préciser sur le bateau que cette équité serait dans les rues, démunis de tout argent, à lutter pour survivre comme tous les autres.”
Visiblement, l’alcool avait eu l’effet escompté. Cela avait dénoué la langue de la tieffeline et l’avait rendue bien plus bavarde que jusqu'à présent.
En tout cas, elle pouvait parfaitement correspondre à ce qu'il recherchait. Tout comme Thorin, il la garderait à l’œil.
Arrivés à la fin de son histoire, ils arrivèrent en face de la fameuse bâtisse abandonnée. Neiro voulut prendre les devants. Il leur demanda d’attendre le temps qu'il fasse le tour et inspecte les lieux. La vieille bâtisse avait des murs noirs de suie, abimés par les temps sans jamais avoir été entretenus. Les fenêtres, pour la plupart brisées, ne protégeaient pas les habitants du froid. Elle était assez grande. De l'extérieur on pouvait deviner un grand séjour, quelques chambres, et une pièce là-haut, ou étrangement les fenêtres n'étaient pas cassées.
Neiro eut à peine le temps d’exposer son plan : faire le tour, inspecter, vérifier s’il y avait des pièges, s'il y avait des issues de secours, que Thorin sortit son marteau et fonça tête baissée sur la porte. Il passa rapidement les petites marches permettant d'accéder au pavillon. Enfonça la porte. Et deux créatures, petites, voletantes, avec de petites ailes et des cornes sur la tête. Elles faisaient la taille de gros oiseaux, mais avec des griffes aiguisées et des dents pointues. Des diablotins, créatures démoniaques aux services de mages noirs, les attaquèrent.
Les aventuriers en devenir étaient sur le qui-vive. À peine les diablotins tentèrent de les prendre par surprise que Thorin esquiva, Loyd décocha immédiatement une flèche de son arc bien trop grand pour lui et tira dans l'œil de la première créature. La tieffeline assena un coup de bâton sur le front, pile entre ses cornes, de la seconde créature. Neiro eut juste à asséner un coup de bâton à la première, et un coup de poing à la seconde, pour voir les deux petits démons volants tombés au sol. Visiblement, leurs griffes acérées ne toucheraient personne. Heureusement, pensa Neiro, car il se souvint de ses aventures passées ou le poison contenu dans les dents et griffes de ces créatures l’avait longuement fait souffrir.
Thorin, rigola. :
- “Sacrées bestioles ceux-là !" “Pas intimidante pour un sous et pas résistante pour deux. De vrais petits poux”.
Pendant que les 3 inspectèrent l'intérieur, Neiro fit le tour extérieur. Il remarqua des traces de pas dans la boue, à l'ouest de la vieille bâtisse. Il suivit les traces et arriva à l'entrée d’une grotte, où de grosses traces de chariot étaient facilement repérables. Visiblement, les enfants qu’ils recherchaient avaient été transportés par chariot, dans la grotte, sûrement vers l'extérieur. Il décida de retourner vers la maison abandonnée pour faire part de sa découverte à ses nouveaux compagnons.
Lorsqu'il revint, il vit les 3 sortir par la porte principale et enjamber les cadavres de diablotin.
Thorin prit la parole :
- “on a inspecté, mais pas grand-chose à signaler. Une grande salle avec de la vaisselle sale et moisie, des meubles vides, poussiéreux et infestés de tiques. À l'étage, un grand dortoir avec une 20n de matelas, tous abimés, trouées et avec de vieilles couvertures dans le même état. Et enfin, une petite pièce avec 3 mini matelas, trop petits même pour le petit Loyd, et une pièce, impossible à ouvrir. Elle semble avoir été fermée magiquement. “
- “Intéressant” dit Neiro. “C'est donc bien ici que les enfants ont été transportés. J'ai trouvé des traces de boues qui mènent à une grotte. Et dedans on retrouve des traces de chariot, la grotte semble monter. Ils sont sûrement partis par là.”
- ”On les poursuit !” Dis soudainement la tieffeline, plutôt discrète jusqu'à présent. Visiblement, l'idée de voir des enfants kidnappés l’avait remonté.
Les trois autres acquiescèrent, et c'est ainsi qu'ils partirent en ce début de soirée, dans une mystérieuse grotte, en suivant les traces d’un chariot qui contiendrait potentiellement des enfants. Kidnappés par de mystérieux hommes, dans un but encore plus étrange.
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Devant l’entrée de la grotte, Neiro constata que la jeune tieffeline semblait stressée, mais également déterminée. Son regard était concentré, elle ne voyait plus rien d’autre que la grotte. Elle avait l'air prête, mentalement et physiquement. Malgré son passé compliqué et son jeune âge, Neiro avait vite compris qu’elle était spéciale.
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Le regard déterminé. Elle toucha sa corne gauche, comme avant chaque moment important de sa vie, comme pour se souvenir d'où elle venait et qui elle était. Il s'était passé beaucoup de choses en 24h, et elle ne s'était pas doutée que fouiller la taverne allait autant changer sa vie. Sa tête était toujours un peu douloureuse suite à la bosse que lui avait infligée cette halfeline aux cheveux rouges. Mais ce qui l’avait le plus marqué, c'est ce qu'ils avaient découvert dans la grotte.
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En remontant la piste du chariot, elle avait trouvé un corps d’enfant, inanimé. L’un des orphelins était mort, et visiblement, la mort n’avait pas été douce. Des hématomes marquaient l'intégralité de son petit visage, d’elfe. Il était difficile de déterminer la race de la petite créature battue à mort, mais les oreilles ne trompaient pas.
Un petit corps chétif, marqué par la faim de la vie d’orphelin et de mendiant, et marqué par les nombreux coups subits, était étalé, mort, sur le sol, dans la boue. Les joues étaient encore ensanglantées et on pouvait deviner ses traces de larmes par-dessus le sang. Une petite peluche, un petit nounours miniature fait de bois. De chêne, il semblerait reconnu-elle, jonchait sur le sol. Elle le ramassa et remarqua une écriture en elfique.
- “L’un de vous parle elfique?” Demande-t-elle en serrant les dents. La colère due à la cruauté de cette scène lui montait au cerveau. Elle n’avait plus qu’une envie : tuer. Tuer cette immonde créature qui avait fait ça. Les hommes étaient vraiment de sombres créatures méprisables sans une once de bonté en eux.
Loyd, Neiro et Thorin répondirent que non, malheureusement, aucun d’entre eux n’avait la connaissance de cet incroyable langage. Elle décida d’emporter la peluche. Un jour elle pourrait se faire traduire ce texte et comprendre, pour la mémoire de cette pauvre petite fille, ce qu'il y avait marqué dessus. C’est les pensées sombres, et le cœur encore plus que le groupe remonta la grotte. Tout était devenu bien silencieux, ils se rendirent enfin compte de l’importance de leur mission. Au bout de 2 bonnes heures de marche, ils arrivèrent à la sortie de cette grotte.
De grands bosquets et arbres marquaient la cachette de cette entrée de grotte, les traces de chariots étaient toujours présentes. Ils décidèrent de les suivre, sur une petite route de boue et de terre, et très rapidement, le groupe arriva devant un petit carrefour.
À l’Est se dessinaient les grands remparts de Sybèle. On pouvait apercevoir le palais et les tours des conseillers de la ville au loin. Une grande route pavée partait vers l’Est et menait à la ville. À cette heure tardive, elle n'était déjà plus fréquemment pratiquée. Seuls les retardataires devaient encore se trouver dessus.
Au Sud, la même route se dressait devant eux, mais dans une autre direction. Sûrement vers une autre grande ville du Sud, pensa-t-elle. Il commençait à faire sombre et ils n’avaient aucune idée du temps de trajet. Enfin, vers l’Ouest, une petite route traversait les arbres. Une petite route de terre, la même que celle d'où ils venaient. Les traces de chariot étaient encore légèrement visibles. Les ravisseurs avaient donc pris cette direction.
Ils décidèrent à l’unisson de s’engager sur ce chemin. Au milieu des arbres : des frênes, des châtaigniers, des chênes et des hêtres, l'avancée n'était pas très compliquée. Le long chemin de terre était facilement visible et les arbres n'étaient pas trop présents. Rien à voir avec ma forêt natale, se dit-elle. Ici, les arbres étaient suffisamment espacés pour distinguer les petites créatures de cette forêt. Des lapins, des biches, des écureuils, et des oiseaux, entre autres. Elle reconnut même une Talève sultane, un plumage bleu foncé et un gros bec avec une plaque frontale rouge qui avance prudemment dans les buissons grâce à de longues pattes aux doigts très effilés. Il était en train d'épier les aventuriers. Cet oiseau était très rare, il était même signe d’épreuve, si on croyait aux signes de la nature. Elle devait redoubler de vigilance, pensa-t-elle.
Les hommes discutaient entre eux, depuis ce qu'elle avait vu dans la grotte, elle avait du mal à communiquer à nouveau avec des nains, ou des hommes. Elle prit la décision de rester à l'écart pour le reste du chemin. Les traces de chariot s'amenuisaient au fil du temps, et avec l’obscurité, il était de plus en plus compliqué de les distinguer. La nuit tombait, il faudrait bientôt camper. Commenta-t-elle pour elle-même.
Quelques secondes plus tard, Thorin, se prenant les pieds dans une racine, cria :
- “Bordel on peut plus avancer dans ces stupides bois ! La nuit commence à devenir noir sombre. On ne pourra plus aller plus loin pour aujourd'hui. Campons !”
Les autres aventuriers acquiescèrent. Il était déjà bien tard et cela devenait insensé de continuer à avancer dans la nuit. Très rapidement, chaque aventurier sortit sa tente de son sac. Ils firent un petit feu pour se réchauffer et mangèrent une de leur gamelle. Le repas était loin d'être bon, mais ils n’avaient jamais connu le luxe de bons repas dans tous les cas. Il n'était pas si difficile de se satisfaire d’une soupe et d’un bout de pain, quand manger était déjà un luxe.
Neiro proposa qu'ils fassent des tours de garde. Ils acceptèrent tous. Elle se dit que c'était trop de prudence pour pas grand-chose, elle avait vécu en forêt, avait dormi dedans et pourtant rien ne lui était déjà arrivé. Il suffisait de bien se cacher pour éviter les prédateurs nocturnes. Visiblement, ces “aventuriers” n’avaient jamais dormi seuls dans une forêt, pensa-t-elle, un petit sourire aux lèvres. Elle prit le premier tour de garde, Thorin avait le second, Neiro le troisième et Loyd le dernier. Ils décidèrent ensemble de se réveiller toutes les 2h et de reprendre la route à l'aube.
Après un court repas, elle vit les différents hommes rentrer dans leur tente sans trop parler, ils semblaient épuisés de leur soirée. Elle décida de prendre les devants, un petit lapin se promenait pas très loin au sud.
Elle marcha quelques pas et alla discutait avec lui :
Sentiments amicaux, bienveillance, amour. Elle pensa fort à ces émotions et se remplit d’elles. Communiquer avec les animaux n’avait rien à voir que communiquer avec les humains. Il fallait transmettre des émotions, des ressentis, des images, il n’y avait pas de mot à proprement parler.
Le lapin accepta sa communication, car il ressentait qu'elle n'était pas une menace pour lui. Elle lui envoya des images de chariot, d’enfant accompagné de sentiments d’urgence, de recherche, et de ne pas savoir où aller. Le lapin lui répondit poliment en lui envoyant une visualisation d’une bourgade, au bout de cette forêt. Il lui fit comprendre qu'il n’y avait rien d’autre par ici. Elle comprit que cette ville était la seule chose au bout du chemin de cette forêt. Elle le remercia. Elle voulait passer un peu plus de temps avec lui, ce lapin lui rappelait ses origines, où elle avait grandi. C'était des sentiments réconfortants et qui lui faisaient du bien. Quand d’un coup. Elle entendit Thorin crier :
- “Au voleur ! Battez-vous ! Où est donc cette maudite créature démoniaque ?!”
Elle comprit qu'elle avait commis une erreur. En partant communiquer avec ce petit lapin et en échangeant avec lui, elle avait tout simplement oublié de monter la garde autour du camp. Ils étaient attaqués !
Elle prit ses jambes à son coup et retourna rapidement sur le camp. Loyd et Neiro sortaient de leur tente, les yeux encore gonflés dus au sommeil dont ils venaient de se faire tirer.
Une petite créature, qui semblait sortir tout droit des enfers, avec des cornes au niveau des sourcils, des dents pointues, un long nez, des petits yeux imbibés de sang et d’assez grosses cicatrices autour des yeux tenait tête au nain. Elle avait une petite dague, imbibée de sang, et Thorin avait une partie de sa jambe ensanglantée. La créature avait également une cape avec un capuchon. Elle faisait la même taille que le nain et essayait de lui asséner d’autres coups de dague.
Des sombrelins ! cria Neiro. Effectivement, une autre créature, encore plus répugnante, et cette fois, de la taille d’un humain, étaient apparues derrière le moine et lui infligea un puissant coup d'épée qui lui fit arracher un hurlement au milieu de cette forêt silencieuse.
Elle paniqua. Tout cela était de sa faute ! C'était elle qui devait monter la garde ! Elle s’arma de sa fronde et lança une pierre sur le petit sombrelin. Ce dernier se retourna vers elle, surpris de la puissance du caillou lancé. Au même moment où il se retournait, Thorin, d’un puissant coup de marteau, lui fit enfoncer sa tête au milieu de son corps. Son coup était si puissant que ses orbites sortirent de ses yeux, du sang gicla dans tous les sens sous la puissance du coup. Le petit corps tomba et une forte lumière, brillante et transcendante sortit de son corps et aveugla les aventuriers à côté. Thorin et la tieffeline eurent tout juste le temps de se protéger les yeux avant que le corps du fiélon disparaisse dans cette lumière aveuglante, en plein milieu de cette nuit noire. Il ne restait plus rien de son cadavre ou de ses vêtements, cependant, des pièces d’or et ses armes tombèrent sur le sol. Apparemment, tout disparaissait aux alentours de cette lumière, sauf le métal.
Au même moment, Loyd parvint à décocher une flèche, par derrière le sombrelin aîné, celui de la taille d’un humain normal qui combattait Neiro. Il disposait de cornes à la place des sourcils beaucoup plus imposants. Ses cornes remplaçaient également ce qui aurait dû être de la chevelure pour tout autre être vivant. Des cicatrices étaient visibles sur son visage, mais également à travers ses vêtements. Une simple cape, munie d’une capuche, lui permettait de se fondre dans le noir malgré sa couleur de peau grise.
Le sombrelin aîné hurla de douleur due à la flèche qui lui traversait la colonne vertébrale. Neiro, expérimenté au combat, se servit de ce mouvement de recul du sombrelin pour lui asséner un puissant coup de bâton au niveau des côtes. Pendant que le fiélon se baissa, dû à la puissance du coup de bâton, le moine lui asséna un puissant coup de paume au milieu de son front.
Le démon tomba, sous la puissance des coups, son corps eut tout juste le temps de toucher le sol qu'il disparut de la même façon que celui du petit fiélon. Une puissante lumière blanche et aveuglante fit disparaître tout son corps et ses vêtements, sauf ses armes, une épée courte et une dague, qui tombèrent sur le sol. Rien d'autre ne laissait penser qu’une créature démoniaque était là quelques secondes avant.
-“Putain la tieffelinne”, cria Loyd. “Qu'est-ce que tu foutais ?!”
- “À quoi tu sers bon sang ?!” Enchéri Thorin.
- “Ce n’est vraiment pas sérieux...” Laissa échapper Neiro, visiblement énervé, qu'elle n’ait pas monté la garde.
- “Je suis dé-désolé”, balbutia-t-elle. “Je discutais avec un petit lapin pour savoir si on était sur la bonne route. J-je ne pensais pas qu’on allait se faire attaquer”.
- “Et on est sur la bonne route ?” Demande sèchement Loyd.
“Oui !” Dis-la tieffeline en remontant le menton, par fierté, heureuse d’avoir une information utile à partager.
- “Alors ça n’a servi à rien vu qu'on allait là-bas dans tous les cas.” Grogna Loyd encore plus sèchement.
Les hommes retournèrent rapidement se coucher, sauf Neiro qui prit son tour de garde. La tieffeline partit se coucher, elle aussi, les larmes aux yeux. Elle détestait vraiment les hommes, les nains et encore plus maintenant les halfelins. Elle savait qu'elle avait fait une erreur, mais elle était pleine de bonnes intentions. Ils étaient méchants de lui avoir parlé comme ça. Seules les créatures de la nature pouvaient la comprendre. C’est ainsi, les larmes aux yeux qu'elle se coucha, furieuse et triste de la situation.
Au petit matin, le soleil les réveilla naturellement, quelques traces de luttes étaient encore présentes sur le sol, mais rien d’autre d’alarmant n'était arrivé durant la nuit. Les hommes avaient meilleure mine, remarqua-t-elle. Neiro et Thorin lui dirent bonjour. Visiblement, la colère de la veille était déjà passée. Loyd finissait de ranger sa tente, il lui fit un signe de tête quand elle passa à côté.
Au moins, ils n'étaient pas rancuniers. Mais elle, elle n’avait pas oublié. Elle retient bien le comportement qu'ils avaient eu face à une de ses erreurs, alors qu’elle souhaitait bien faire. Ils n’avaient pas intérêt à faire la moindre erreur, car elle ne les raterait pas.
C’est une petite heure après, que les aventuriers continuèrent leur chemin. Revigorés par un bon petit déjeuner, ils arrivèrent sans difficulté à la sortie de la forêt. Les montagnes étaient maintenant toutes proches. On pouvait distinguer au loin de longs pics avec de la neige. Ils allaient encore plus haut que les nuages. Un peu avant ces pics, de hauts plateaux étaient distinguables, remplis de neige. Et à quelques lieux des aventuriers, de longs chemins, creusés par le temps dans la montagne, permettaient d’accéder à ces somptueux paysages. La route semblait assez large pour marcher en groupe, et en même temps semblait monter assez pour fatiguer rapidement les intrépides voyageurs qui souhaiteraient s’y aventurer.
Un peu au nord de ces chemins de montagne, une petite bourgade, entourée d’une petite palissade faite avec les moyens du bord. Des arbres, des chênes et des hêtres majoritairement reconnus-elle, de taille disparate, étaient plantés, certains moins bien que d’autre, pour protéger les quelques maisonnettes de cette petite plaine.
En s’approchant du village, il vire un soldat, si on pouvait l’appeler ainsi, qui montait la garde. Un casque trop grand pour lui, et une dague qui semblait rouillée faisait de lui quelqu’un de tout sauf effrayant. Il ne les salua même pas à leur arrivée, il était en train de piquer du nez.
Le soleil était déjà à mi-hauteur dans le ciel, le chemin jusqu'ici n’avait pas été aussi court qu'ils l’avaient espéré.
En entrant dans la bourgade, elle remarqua que l'atmosphère était étrange. Les villageois n'avaient pas l’air bien, ils avaient toujours un regard traînant, paniqué, et de la tristesse, une profonde tristesse dans leur regard. En arrivant, en quelques pas, à la place centrale, ils virent de grandes potences, utilisées. 2 cadavres pendaient sur leur gauche, pendus au niveau du cou. Un homme avec la tenue d’un soldat et un demi-Orc, avec de longues dents, et de gros bras solides. Il avait également une tenue de combat. Ce qui frappa la tieffeline était le nombre d’entailles qu'ils avaient accumulées sur leur corps. S'ils n'étaient pas pendus, elle aurait juré qu'ils avaient été saignés à mort. Sur la droite, un elfe, svelte, était lui aussi pendu, il avait une longue cape tombante, une barbichette et des tatouages qui ressemblaient à des runes.
Des gens passaient autour de leur groupe d'aventuriers, mais personne ne leur adressait ne serait-ce qu'un regard. Une grande maison au nord, derrière la place, semblait indiquer l’endroit le plus important de la ville, juste après la taverne, de deux étages, légèrement fleurie qui était à l'est du village.
“Il y a une atmosphère particulière ici, les villageois ont l’air paniqués”, murmura-t-elle au reste du groupe.
“Oui, interrogeons-les pour en apprendre plus”, proposa Neiro.
Ils partirent vers l’ouest du village, en recherche d’un villageois qui accepterait de leur répondre. Malheureusement, ils semblaient tous fuir, ils finirent par tomber sur un homme, au pied de sa maison en train de passer un coup de balai. Comme les autres, il avait le regard vide. Il se laissa approcher, non par envie, mais parce qu'il ne remarquait pas ce qui se passait autour de lui.
“Bonjour, mon brave.” Salua poliment Thorin. Les autres, d’un commun accord, étaient restés derrière pour ne pas l’intimider. “Nous sommes à la recherche d’enfant, vous n’en auriez pas vu par hasard ?”
Au mot enfant, le villageois sembla encore plus triste qu'il ne l’était déjà. Il semblait avoir du mal à parler, il hocha la tête de façon négative. Thorin insista un peu plus, mais cela eut pour seul effet de le faire rentrer précipitamment chez lui, en claquant la porte au nez du nain.
Mais confiant de son charisme et de son pouvoir de persuasion, ce dernier enchaîna rapidement en trouvant un autre villageois pas très loin. Il entreprit de nouveau d’en apprendre plus, et cette fois, sur le coup de l'intimidation, le villageois parla.
“Des gobelins nous ont attaqués, et ce, à plusieurs reprises. Ils ont enlevé tous nos pauvres petits enfants...” De grosses larmes coulèrent sur ses joues.
“Le bourgmestre n’était pas en mesure de nous défendre ! Il n’a rien fait ! Nous avons vu les enfants se faire enlever sous nos yeux, impuissants, face à cette horde gobeline. “
“Ils ont été emmenés vers les montagnes à l'Ouest. Depuis, le bourgmestre fait venir des orphelins des rues de Sybèle et les échanges contre la paix avec la tribu de gobelins. Il a peur pour sa vie, ce misérable... Mais le mal est fait, nos pauvres petits enfants ne sont plus avec nous”
entendant tout cela au loin, elle se rapprocha du villageois : “Nous allons nous occuper de ces gobelins. Croyez-moi."
“Mon marteau a soif de sang”, renchérit Thorin.
“Merci, mais ne dites rien au bourgmestre, je vous en conjure, je pourrais finir pendu moi aussi si j’essayais d’intervenir.”
Aussitôt au fait de ces informations, les aventuriers se rendirent en direction des montagnes. Ils avancèrent sans trop de difficulté sur le chemin rocheux, et au bout d’une bonne demi-heure de marche, arrivèrent sur une petite plaine. Qui, visiblement, avait servi de champ de bataille récemment. Une quinzaine de corps de gobelins jonchés sur le sol. La plupart avaient été coupés en deux, et l’autre majorité avait un trou à la place de la poitrine, comme si une boule de feu les avait frappés en plein cœur. Visiblement un combat des plus sanglants avait eu lieu ici. Et il était récent, les corps étaient dans la première phase de décomposition, et le sang était encore largement visible sur le sol. Une chose cependant frappa la tieffelinne, l’intégralité des mains de gobelins avait été coupée, et d’innombrables petites traces de pas partaient vers un petit chemin de terre, à l’opposé du grand chemin de montagne.
Thorin, Loyd et Neiro étaient persuadés qu’il fallait continuer le chemin vers la montagne pour trouver les orphelins, et elle eut beaucoup de difficulté à leur faire comprendre que le petit chemin de terre était celui qui mènerait sans aucun doute à l’entre des gobelins.
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C’est ainsi que,
- Thorin, fils de Thor, un jeune nain intrépide et robuste maniant particulièrement bien son bouclier et son marteau.
- Neiro, un moine humain adulte repenti tout aussi habile avec son bâton qu’avec les arts martiaux.
- Une tieffelinne, sans nom et ne sachant pas d’où elle vient mis à part que c’est une forêt. Utilisant gauchement son bâton de combat et sa petite fronde, mais qui semblait disposer de pouvoir surnaturel.
- Et Loyd, un jeune halfelin, rêvant d’aventure et doté d’une précision hors du commun à l’arc.
Se retrouvaient tous les 4, ensemble, face à cette grotte. Dans l’espoir d’aider des orphelins de Sybèle, afin d’obtenir, en échange, des réponses à leurs questions. Ils avaient chacun un objectif bien précis en tête, et avaient besoin d’aide pour y parvenir.
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“Aller on y va ! Sauvons ces enfants !” Cria Loyd, visiblement fin prêt pour le combat qui les attendait. “Enfin Thorin, je te laisse passer devant bien évidemment”.
Thorin s’engagea sans plus tarder dans la petite fente de la grotte. Très rapidement, ils arrivèrent dans une première petite pièce, avec plein de bouts de bois, posés comme pour servir d’étagère, pensa Loyd. La manière de poser le bois sur la pierre rugueuse de la grotte n’était ni intelligente ni spécialement réussie, mais une chose était sûre, les ressources qui étaient posées ici n'étaient plus. De grands sacs de farine et de blé jonchés, vides, sur le sol également.
Sur un signe de tête les invitant à le suivre, Thorin continua en face, par le tunnel qui mènerait sûrement à la prochaine pièce. Et effectivement , en quelques minutes, ils arrivèrent dans une grande salle, avec plusieurs grandes colonnes de marbre soutenant la pierre de la grotte, une grande statue abîmée par le temps était visible au fond de la grande salle. Juste à côté, un petit gobelin avec un tablier extrêmement crasseux remuer avec une grande louche le contenu d’une marmite aussi grande que lui. Du liquide presque vert débordait et tombait sur le sol quand le gobelin tournait trop fort. Loyd distingua des mains de gobelins dans cette marmite. Ces immondes créatures n’avaient tellement plus rien à manger qu’elles s’étaient livré au cannibalisme.
2 grandes tables, d’une quinzaine de places chacune, étaient posées à droite et à gauche des colonnes centrales. Celle de droite était totalement vide, celle de gauche accueillait 5 gobelins, couverts de crasses qui mangeaient des bouts de doigts gobelins. Leurs petites dents pointues déchiraient la petite chair verte de leurs congénères.
À peine eut-il le temps d’analyser la scène, qu’un gobelin les remarqua, il pointa sa petite main couverte de terre verte et cria quelque chose dans la langue. Il était évident qu’il prévenait les autres que des intrus étaient là.
Ils ramassèrent immédiatement leurs petites dagues et coururent en direction du groupe. Thorin avait déjà son bouclier de sortie et s’était positionné entre la charge gobeline et ses nouveaux amis.
Pendant que les gobelins couraient vers eux, Loyd s’empressa de décocher une flèche sur le plus proche. Il le toucha, dans la tête, pile entre les deux yeux, exactement comme son maître Darlik lui avait appris. Il tomba sur le sol, mort sous ce coup puissant. De son côté, la tieffelinne utilisa sa petite fronde pour lancer un puissant coup de cailloux dans le torse d’un autre gobelin. Pas aussi efficace que sa flèche se dit Loyd, un petit sourire aux lèvres, mais assez puissant tout de même pour déstabiliser la petite créature et la faire tomber. Cette dernière se releva sans trop de difficulté, mais à peine eut-elle le temps de se remettre debout que Thorin lui envoya un puissant coup de marteau au niveau du crâne.
Elle tomba sur le sol, inanimée, face à la puissance destructrice du coup du nain. Mais les 4 autres gobelins en profitèrent pour encercler Thorin et tentèrent de lui asséner des petits coups de dague. Les 3 premiers virent leurs coups parés par l’armure ou le bouclier de Thorin, mais le dernier réussit à le toucher au niveau des jambes, ce qui fit rugir de rage et de douleur le brave nain. Neiro s’empressa de sauter par-dessus son ami le nain, et pendant une habile pirouette dans les airs, il infligea un puissant coup de bâton au gobelin qui avait frappé Thorin. Il enchaina avec un puissant coup de paume en plus du bâton, et le gobelin qui avait encore sa petite dague couverte du sang de Thorin tomba sous la puissance des mains du moine.
“Plus que 4 !” cria Loyd. Et au moment même où il décochait sa flèche pour tuer son deuxième gobelin, un rugissement se fit entendre du fond de la pièce qui lui fit rater son coup. Un énorme gobelin, plus grand qu’un humain, couvert de pustule et faisant pas loin de 200 kg, arrivait aussi vite qu’il pouvait, accompagné de 4 autres petits gobelins.
“C’est le boss, laissez le moi !” cria Thorin. Et joignant le geste à la parole, il repoussa d’un puissant coup de bouclier les 3 gobelins lui barrant la route pour foncer sur le chef gobelin et lui asséner un de ses puissants coups de marteau. Le monstre hurla sous la puissance du coup, mais il s’empressa d’utiliser son gros fendoir, pour rendre la pareille au nain. Dans un rugissement, il utilisa tout son poids pour asséner un coup qui fit saigner Thorin sur tout son flanc gauche. Le coup était si puissant qu’il était passé au travers de l’armure de Thorin. Ce dernier hurla de douleur sous la puissance du coup. Loyd comprit qu’il avait besoin d’aide en urgence. Il se concentra de toutes ses forces et envoya une flèche dans l’œil d’un des gobelins arrivant qui, profitant de sa blessure, le chargeait et s’apprêtait à le frapper. Il mourut sur le champ, ne pouvant faire face à la puissance des flèches de Loyd. La tieffeline prit bien soin de rester à distance également, et entama un rituel magique. Loyd avait du mal à comprendre à quoi elle pouvait bien servir jusque là. Mais ses yeux s'écarquillèrent quand il vit que le sang qui tombait de la blessure de Thorin diminuait à vue d'œil. Elle était en train de refermer la plaie à distance !
Au même moment, Neiro fit face aux 3 gobelins que Thorin avait laissés pour s’occuper du gros monstre. Il s’empressa de contrer leurs petites attaques, mais comme pour son ami le nain, l’un d’entre eux arriva à le toucher au niveau de la jambe. Rien de bien grave, mais un petit saignement commença à couler de l’entaille qu’il avait sur la jambe gauche. Il répliqua quasi immédiatement, faisant tourner son bâton en l’air, il sauta et en retombant, infligea de toutes ses forces un coup qui fit sortir un petit bout de cervelle de la créature qui avait osé le toucher.
Thorin était toujours dans son duel face au monstre, et subissait également les coups des 3 autres gobelins qui l’avaient suivi. Le duel se poursuit pendant de nombreuses secondes, chacun infligeant d'importants dégâts à l’autre. Les petits gobelins tombaient un à un sous les coups de fronde de la tieffeline et sous les coups des flèches de l’halfelin. Neiro s’en sortait sans trop de difficulté pour empêcher les gobelins de frapper les archers. Et les tuer lui-même un à un.
En quelques minutes de combat, il ne restait plus que Thorin, saignant, mais avec sa grosse plaie refermée grâce à la magie de la tieffeline, qui parait habillement les coups de fendoir de l’énorme monstre et qui lui assénait de puissants coups de marteau. D’un coup habile au niveau des rotules du monstre, Thorin le fit tomber à sa hauteur. Il s'empressa alors de l’achever, il lâcha son bouclier, prit des deux mains son marteau, et percuta la mâchoire du gros gobelin de toutes ses forces. Un bruit sourd résonna dans l’intégralité de la grotte, le bruit d’une mâchoire brisée, des dents volantes dans les airs, et l’énorme monstre qui tomba au sol, mort.
Thorin remercia la tieffeline pour ses soins. Loyd se sentit heureux. Il avait trouvé des compagnons d’aventure, et des compagnons forts ! Que ce soit Thorin, qui représentait parfaitement la force brute, Neiro, qui était vraiment expérimentée en combat et d’une agilité et puissance étonnante, ou bien cette sacrée tieffeline qui au final semblait maîtriser la magie. C’était un groupe prometteur qu’ils avaient là.
C’est avec ces belles pensées, et le sourire aux lèvres qu’il fouilla avec ses compagnons les différentes pièces restantes. Ils trouvèrent ce qui ressemblait à une chambre avec un énorme lit et plusieurs petites paillasses sur le sol. Un énorme coffre était juste en face du grand lit. Ils trouvèrent dedans 17 pièces d’or, Thorin en prit immédiatement 10, en disant que c’était pour compenser ses grandes blessures, Loyd en prit 4, et la tieffeline prit les 3 restantes. Neiro était bien plus subjugué par le reste du contenu du coffre. Une main droite d’halfelin reposait au fond du coffre. Il la mit directement dans son sac. Dans le fond du coffre, ils trouvèrent également un collier en or, ainsi que 2 petites gemmes. De jolies pierres précieuses. Thorin se proposa de garder ses trouvailles avec lui.
Ils trouvèrent également, posés dans un coin de la grande pièce, un sac d’aventuriers avec un arc long et une dague. Et juste à côté, derrière l’une des colonnes, une petite trappe avec une petite échelle.
Neiro y alla en premier, une forte odeur d’excréments parvint jusqu’au nez de Loyd. Il n’avait aucune envie de descendre là-dessous.
“Tout va bien Neiro ?” demanda-t-il, en espérant que ce dernier ne lui demande pas de descendre.
Sans lui répondre, il entendit Neiro demander à quelqu’un s'il avait besoin d’aide. Visiblement la personne était enchainée en bas, et répondit simplement que oui, en étant enchaînée et ne pouvant pas bouger, elle avait plutôt besoin d’aide.
Intrigué, la tieffeline et Thorin descendirent, Loyd se sentit obligé de les suivre et alla dans cette cave aux odeurs nauséabondes. Un horrible spectacle s’offrit à lui, plusieurs squelettes, visiblement d’enfants jonchés le sol. Un groupe de 9 enfants, silencieux, étaient dans un coin. Ils semblaient anorexiques. Et 3 gnomes étaient également présents, dans un autre coin, visiblement assez apeurés eux aussi.
Quand il se retourna, il vit que Neiro était en train de détacher une gnome, assez jeune également, mais qui semblait bien plus résistante. Nisa se présenta-t-elle à eux. Elle leur expliqua qu’elle s’était fait capturer il y a moins de 2 jours en affrontant l’intégralité des gobelins avec ses compagnons.
Pendant ses explications, Thorin, la tieffeline et Neiro distribuaient de la nourriture aux pauvres petits orphelins. Loyd en donna aux 3 autres gobelins en leur demandant d’où ils venaient.
“Nous venons de Folkor ! Nous sommes sortis de notre forêt pour vivre des aventures, mais nous nous sommes retrouvés face aux gobelins qui nous ont facilement capturés. Sans vous, on serait sûrement bientôt mort... Merci.” Et ils croquèrent à pleines dents la nourriture qui leur était proposée.
Neiro proposa à tout le monde de sortir d’ici, et d’aller à l’extérieur. Effectivement, manger avec une odeur d’excréments n’était peut-être pas le plus agréable, se dit Loyd.
Une fois dehors, Neiro et Thorin partirent ensemble prier. De son côté la tieffeline les voyant prier, se dit qu’elle devrait méditer elle aussi. Ils sont quand même sacrément étranges ceux-là se dit-il. Il en profita pour interroger les enfants, l’un d’entre eux, un jeune elfe, semblait moins apeuré que les autres.
“Alors mon grand, tu peux me raconter comment vous avez fini ici.” Demanda gentiment Loyd.
“Des messieurs armés nous ont attrapés pendant qu'on dormait dans la ville souterraine. Ils nous ont dit qu'ils allaient nous faire sortir de la ville pour nous ramener chez nos parents. Sur le chemin, Aleanor s'est mise à pleurer et ils ont dit qu'il ne fallait pas pleurer. Ils ont été très violents avec elle.” Essaya d’expliquer le jeune elfe, il avait quelques difficultés à formuler ses phrases, mais Loyd arrivait à le comprendre, c’était l’essentiel.
“Et qui vous a capturé ?”
“Un méchant monsieur avec une grosse moustache, une cicatrice à l’œil droit et des habits en fourrure, et des amis à lui.”
“Oh ! C’est l’enfoiré qu’on a croisé en venant ici !” S’exclama Thorin qui revenait de sa prière avec Neiro.
“Et effectivement, il avait l’air plutôt coriace", enchaîna Neiro, pensif.
“Ne vous en faites pas. Vous êtes en sécurité maintenant. On va vous aider” dit la tieffeline d’une douce voix. “Est-ce que vous savez ce qui est arrivé à la petite fille qui avait cette peluche ?” demanda-t-elle en gardant cette même voix douce et rassurante, et en sortant la petite peluche qu’ils avaient trouvée près du cadavre de l’enfant elfe dans la grotte.
“C’est la peluche d’Aleanor !” de longues larmes coulaient sur les joues du jeune elfe. “Ils l’ont frappé fort parce qu'elle pleurait”.
“Pauvre petite... Et qu’il y a-t-il de marqué sur le petit mot accroché à la peluche ?”
“à mon bébé Aleanor, en espérant que cette vie à Sybèle soit moins compliquée que ce que tu aurais connu chez nous. Je t'aime plus que ma propre vie ne l'oublie jamais. Maman."
“Quelle horreur” dirent Nisa, Neiro, Loyd, et Thorin en même temps ! “J’aurais préféré ne pas savoir...” murmura Thorin, le grand guerrier.
C’est dans cette ambiance pesante que Neiro proposa au groupe de retourner à Begnilo, afin d’aller confronter le bourgmestre et que les enfants puissent avoir enfin du repos.
“On le tue !” S’exclama Thorin. “Vous avez vu ce qu’il a fait aux enfants ! il mérite la mort et rien d’autre !”
“Non, on ne peut pas retourner comme ça au village”, expliqua Neiro. “On ne sait pas comment ils vont réagir, je vous rappelle qu’on a déjà vu des aventuriers pendus au milieu du village déjà”.
“Mais si on peut ! On a tué les gobelins qui les terrorisaient, allons-y et présentons nous comme les héros du village !”
La discussion continua ainsi pendant de longues et très longues minutes. Ils hésitaient entre se cacher pour la nuit et aller dès demain matin directement à Sybèle. Ou bien confronter le bourgmestre au village, quitte à risquer un autre combat. Pendant toute leur discussion, ils étaient arrivés pas très loin du village. Nisa participa à leur débat, proposant, tout comme Loyd, d’aller au village et qu’ils se présentent comme des héros, destructeurs de gobelins.
Pendant cette longue discussion, Loyd aperçut les 3 petits gnomes qu’ils avaient sauvés passer la palissade d’entrée, et très rapidement, une foule se créa autour d’eux.
“Pas le choix, allons-y", dit Loyd en leur montrant le début d’attroupement à l'entrée du village.
“OK, mais je vais tuer ce bourgmestre”, grommela Thorin, en serrant bien fort son marteau. “Et foutus gnomes. On les sauve et ils nous remercient en agissant sans nous concerter. On leur tend la main, ils nous arrachent le bras.”
Effectivement, tous les villageois étaient regroupés autour des gnomes qui racontaient leur histoire. En les voyant arriver, ils les pointèrent du doigt et dirent aux villageois : “Les voilà ! C’est eux ! Ce sont les héros qui ont tué l’armée de gobelins ! Il n’en reste plus un seul. Ils les ont tous tués et nous ont sauvés !
“Vive les héros !” “Bravo les aventuriers !” “Merci pour votre courage !” La foule composée d’une trentaine de villageois les acclamait et les applaudissait pendant qu’ils franchissaient les palissades de la ville.
“Bombez bien le torse”, leur dit Thorin. Visiblement il était assez sensible aux compliments. Quand ils arrivèrent au niveau des gnomes, un mouvement de foule eut lieu juste en face d’eux. Le bourgmestre, un vieil halfelin bien nourri, qui portait une armure bien trop grande pour lui et toute crasseuse, était accompagné de 6 de ses gardes.
“Qu’est-ce que vous avez fait ?! Pauvres fous ! Tuez les soldats ! On va les pendre pour que les gobelins sachent qu’on ne les a pas trahis “ Il semblait totalement paniqué, il attrapa gauchement sa dague avec sa main gauche. Sa main droite n’était plus là, la cicatrice semblait fraîche, comme si elle venait de se faire couper il y a peu. Loyd remarqua également que 3 soldats refusaient totalement de bouger, et les 3 autres ne semblaient pas trop sûrs de ce qu’ils faisaient quand ils avançaient vers le groupe de Loyd.
“C’est des héros !” “Vous êtes fous !” “Laissez-les tranquilles !”
Ils avaient la foule à leur avantage, au moins les villageois n’étaient pas débiles comme ce vieux bourgmestre. Loyd aperçut Neiro, s’avançant calmement vers le bourgmestre. Il fouilla rapidement dans son sac et lança, sur le sol, la main droite d’halfelin qu’il avait prise là-bas.
“C’est à vous non ?” “Ceci est la preuve que nous sommes allés dans la caverne des gobelins, et que nous avons tué leur chef, et l’intégralité de leur armée.”
“MENTEUR ! C’est impossible ! Gardes, avec moi !” Mêlant les gestes aux paroles, le bourgmestre s’élança tant bien que mal, prêt à charger avec sa petite dague. Loyd aperçut Thorin serrer son marteau, s'il le laissait faire la colère aller l’emporter et il risquait de tuer le vieil halfelin sans qu’ils puissent l’interroger. Il décocha précipitamment une flèche, et il tira dans la jambe droite du bourgmestre pendant que ce dernier trottinait vers eux. Les soldats avaient simplement refusé de bouger et de le suivre.
La flèche atteint sa cible, elle se logea dans la jambe de l’halfelin, il tituba et tomba sur le sol, face contre terre, inconscient, aux pieds de Neiro.
Un villageois sortit de la foule et s’avança vers les aventuriers.
“Merci pour ce que vous avez fait. On vous est totalement redevable. Cette immonde crapule a laissé les gobelins kidnapper nos enfants, mais lorsqu’il n’y en avait plus et qu’ils ont commencé à s'en prendre à lui, il a pris peur et il a fait venir des orphelins de Sybèle, pour s’en servir comme monnaie d’échange. Depuis, les gobelins ne nous attaquent plus, mais nous avons déjà tout perdu... Nos pauvres enfants... Et ces pauvres enfants aussi. Ils n’ont rien demandé et se retrouvent vendus à de sanguinaires petites créatures.”
“Nous allons interroger ce vieil homme”, dit Neiro en pointant du doigt l’halfelin jonchant sur le sol. “Mais avant, nous allons détacher les cadavres des pauvres aventuriers sur la place” “Loyd, tu peux le ligoter ?”
“Et moi je vais venir prier pour les âmes de ces pauvres aventuriers avec toi Neiro”, dit Thorin en rangeant son marteau.
“Pouvez-vous vous occuper des enfants pour le moment ?” demanda Neiro au villageois.
Ce dernier acquiesça, Loyd et la tieffeline partirent ligoter le bourgmestre, pendant ce temps Neiro et Thorin, accompagnés par Nisa, allèrent détacher les pendus sur la place. Quand ils arrivèrent devant les cadavres, Nisa commença à pleurer.
Quand ils revinrent dans les sous-sols de la taverne, là où Loyd et la tieffeline avaient ligoté le bourgmestre, ils leur expliquèrent que les pendus étaient les anciens compagnons de route de Nisa. Ils ont combattu ensemble les gobelins, mais elle s’est fait assommer et capturer pendant le combat, elle ne savait pas ce qui leur était arrivé.
Pendant qu’elle leur explique cela, le bourgmestre toussa, visiblement il était enfin réveillé. Nisa se jeta sur lui :
“Qu’est-ce que vous avez fait à mes compagnons ?!”
“Je n’ai pas eu le choix ! Ces fous, comme vous !, on voulu affronter les gobelins ! Si je ne les avais pas pendus et mis en évidence, les gobelins auraient pu penser que je les avais trahis et ils auraient pu me tuer. Je n’avais pas le choix !”
“Oh si vous l’aviez !” s’exclama Neiro en frappant violemment le vieil homme dans le ventre.
Ce dernier cracha du sang, et il eut à peine le temps de reprendre son souffle que Nisa lui asséna un puissant coup sur le nez. Et quelques secondes après Thorin et Loyd le frappèrent également chacun leur tour.
Il criait de douleur. Mais c’était pleinement mérité, se dit Loyd.
“Comment avez-vous trouvé ces enfants ? Qui sont les gens derrière tout ça ?” demanda Loyd, en frappant une fois de plus le vieil halfelin.
“Ce sont des cultistes !” Hurla-t-il en crachant du sang. “Des fanatiques qui prient une déesse des enfers.” De nouvelles gerbes de sang sortaient de sa bouche.
“Les gobelins semblent vouloir des enfants pour une étrange raison. Mais vu qu'on en avait plus, je me suis dit que j'allais en enlever dans les souterrains de Sybèle. À ce qu'il paraît, ça grouille d’enfants mourant dans les rues là-bas.”
“Mais quel monstre !* S’exclama la tieffeline.
“Jugez-moi si vous voulez. Mais on fait comme on peut pour survivre dans ce monde qui devient de plus en plus chaotique chaque année.” “Dans tous les cas, il y a un manoir là-bas, dans un coin des souterrains. Et ils enlèvent les enfants des rues pour les revendre. Je les ai simplement rachetés à ces cultistes.”
“Qui prient-ils ?” “Pour combien ?” S'exclamèrent en même temps Neiro et Thorin.
Le vieil halfelin toussa du sang.
“Shar, et 60 pièces d’or, c'était tout ce qu'on avait.”
Découvrant ce dont ils avaient besoin, les aventuriers sortirent du sous-sol. Une fois dehors, Loyd se dit que ça pourrait être drôle de proposer aux villageois de faire la queue pour frapper un par un le bourgmestre. Mais à peine sorti, Rodolphe, l’homme qui était sorti de la foule pour leur expliquer ce qu'il savait, prit la parole
“On aurait 2 requêtes pour vous aventurières.”
“la première, on aimerait nous faire justice nous-même et pendre le bourgmestre, si vous l’acceptez bien sûr.”
D’un commun accord, les aventuriers acquiescèrent ensemble d’un signe de tête.
“Et la seconde”, poursuivit Rodolphe, “on aimerait offrir une nouvelle vie à ces pauvres orphelins. Si j'ai bien compris, ils ne rencontreront que la misère en retournant à Sybèle. Et à cause de la lâcheté de notre bourgmestre, tous les enfants du village sont morts... On pourrait, si vous l’acceptez, les garder et leur offrir une nouvelle vie.”
“Oh ! Se serait génial” la tieffeline avait les larmes aux yeux en disant ça.
“Oui, mais comment prouver à Lilia que nous avons bien secouru les enfants ?” Réfléchit Loyd à haute voix.
“On la connaît assez bien pour qu'elle nous croie sur parole”, dit simplement Thorin. Et Neiro acquiesça.
Bien ! Dis Neiro, “gardez les enfants, et nous repartirons au petit matin pour annoncer la bonne nouvelle à Lilia".
Oh merci beaucoup aventuriers ! Vive les aventuriers ! Organisons-leur une fête à la taverne ce soir ! crièrent les villageois qui étaient encore dehors.
“Aventuriers !” Le tavernier s'avança vers eux. “Pour tout ce que vous avez fait pour nous, je vous offre gîte et couvert, pour ce soir, mais pour toutes les autres fois où vous viendrez nous rendre visite, vous êtes nos héros !”
"Et l'alcool aussi ?!” Demandèrent en même temps Neiro et Thorin.
“Bien sûr !”
C’est sur ces belles paroles que les aventuriers profitèrent ensemble d’une belle soirée festive. Ils mangèrent et burent à profusion. Au cours de la soirée, les 3 petits gnomes vinrent les remercier encore une fois, en leur indiquant de passer chez eux, a Folkor, et que c’était sur que leur peuple les récompenserait pour ce qu'ils ont fait.
Les aventuriers en profitèrent également pour faire plus ample connaissance avec Nisa. Cette petite gnome intrépide, semblait douer à l'arc d'après ses dires. Et ce serait grâce aux enseignements de son maître d’armes qui avait disparu il y a quelque temps, un grand rôdeur très fort et connu dans sa ville. Pas sa ville natale, car elle n’était pas de la région. Elle venait des forêts de Simeth. Elle était partie il y a fort longtemps pour vivre une vie d’aventure, pour découvrir le monde. Mais le monde n’était pas aussi accueillant que ses belles forêts. Elle eut du mal à survivre, et se fit aider, en arrivant dans le royaume de Nethuns par son maître : Darlik. Un puissant rôdeur qui lui apprit le tir à l’arc.
Loyd fut choqué de cette découverte, il considérait déjà Nisa comme une sœur adoptive. C’est donc tout naturellement qu'il lui proposa de les rejoindre et de faire chemin avec eux, et il lui promit qu'ensemble, ils arriveraient à découvrir ce qui était arrivé à leur maître, Darlik.
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