#34
J’ai perdu ces derniers jours le goût d’écrire. Plus précisément, j’ai perdu le goût de me mêler du monde. Chaque fois que je regardais l’écran de l’ordinateur pour avoir un aperçu de ce qui se passait, j’éprouvais une grande angoisse. Comme une vague nausée accompagnée d’un souffle court. Comme d’habitude, les nouvelles n’étaient pas bonnes. Et mes minces tentatives pour essayer de changer les choses se sont heurtées à l’inertie globale.
Très rapidement, mes maigres réserves d’énergie et de courage se sont vidées. Ne restait plus qu’une apathie de circonstance et une sensation d’échec face à ce vaste monde qui poursuivait sa route nonchalamment.
Je me suis donc réfugié dans des mondes de fiction, m’enterrant encore plus profondément dans la lecture et les jeux vidéos, pour oublier l’univers. Il n’y avait plus que moi et d’autres univers, finis, immobiles et dans lesquels je pouvais me plonger. Chaque fois que je sortais de mon apnée béate et que je regardais à nouveau le monde que j’avais quitté pendant quelques heures, je le retrouvais inchangé. Chaque fois, je replongeais encore plus profondément.
Je sais bien que je ne pourrai pas maintenir ce comportement indéfiniment. Il faudra bien à un moment que je reprenne le combat pour transformer le monde et le faire ressembler un peu plus à ce que je voudrais qu’il soit. Mais pas tout de suite. Pour l’instant, j’ai besoin de me reposer, en immersion complète afin d’oublier tout ce qui me déplait.
Je reprends mon souffle, loin du tumulte et de l’absurdité.
Je me confine hors de mes murs.
Je rêve éveillé.
Laissez-moi.
Je sais que bientôt, j’en aurai assez des univers fictionnels et des plaisirs artificiels. Mais j’ai juste besoin d’un peu de répits.
On ne peut pas faire face au monde tous les jours sans chanceler de temps en temps.
Annotations
Versions