Nous sommes nous égarés?
Avant que le sommeil ne nous sépare, je prends ta grande et douce main dans la mienne.
La forêt féérique que nous traversons, m’inquiète. Je te sais valeureux, mon tendre ; tu sauras me protéger des mystères qui nous entourent. La végétation luxuriante pousse avec célérité. Des clématites odorantes aux couleurs du Bifröst, l’arc en ciel de nos espoirs, s’enroulent sauvagement aux troncs de grands arbres à tête humaine. Ces cent sorcières au regard phosphorescent me sourient en ricanant. Tu me serres encore plus fort contre ton corps. Des oiseaux de feu, hurlants des plaintes d’outre-tombe, passent au ras de nos chevelures. De ta chemise de lin, tu protèges la mienne. Vers quel royaume allons-nous ? Vanaheim, le royaume des Vanes de Freyja ; Álfheim, royaume des elfes de lumière ; Jötunheim, royaume des géants ; Niflheim, royaume des glaces ; Muspellheim, royaume du feu ; Nibelheim royaume des morts ?
Cela doit être Svartalfheim le monde souterrain, le royaume des elfes obscurs qui ont été bannis par Odin du Midgard. Il me fait si peur que lorsque mes pieds s’enfoncent légèrement dans les tapis de mousse violette, je crois être aspiré. Des champignons immenses ventre de biche aux taches virides jaillissent sur des troncs pourrissants et putrides. Des iules géants rampent sous les feuilles mortes jonchant l’humus bleu de prusse. Plus rien n’est reconnaissable. Des cris déchirants vrillent nos tympans. Les lisières et les clairières ont disparu. Nous ne voyons poindre plus aucune percée lumineuse. Pas une magicienne pour nous indiquer une issue à ce cauchemar. Mon âme se désespère. Mon corps s’étiole. La mort me serait plus douce que cette vie infernale dans ce monde monstrueux. Il n’y a que ta présence, mon amour, qui me donne un peu de force pour tenir à cette existence effroyable. Il règne dans cette contrée, une ambiance d’antichambre des enfers. Où est le chemin du paradis ? Des cris bien plus présents et humains viennent vers nous.
Se croyant seuls, des hommes hurlent, parlent et rient très fort. Ils ne sont pas de mon cauchemar. Ils déambulent sur le chemin de terre que nous connaissons bien. Sortis de notre sommeil post-coïtal, nous nous rhabillons rapidement et marchons à quelques dizaines de mètres d'eux.
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