Toujours 2 - Fin

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Le froid la réveilla. Une fine pellicule de sueur glaçait sa peau. Il faisait toujours aussi sombre, mais plus un bruit ne résonnait. Nulle musique, nul feulement de plaisir sauvage, rien que le silence. Elle étendit le bras pour ne rencontrer que le vide. Daniel n’était plus là. Une angoisse sourde monta dans sa poitrine, serrant son muscle cardiaque comme un étau. Elle le chercha du regard, mais ne vit que l’entassement inanimé des corps dévêtus. Elle se redressa fébrilement, sortit de la chambre. « Daniel ? » appela-t-elle d’une petite voix. Justine ne percevait que les souffles alanguis des dormeurs, qui partout exposaient à l’air libre viandes génitales et ventres couverts de semence morte. Un charnier. Un charnier vivant et suintant, véritable cimetière de la médiocrité des mœurs. Elle sentait l’humidité lui piquer les yeux, tandis que la peur enfonçait ses griffes dans ses intestins. Elle fit plusieurs fois le tour de l’appartement, clamant le prénom de son amant puis le hurlant hystériquement. « Daniel ! Daniel ! ». Sans réponse. Daniel était parti. Elle avait envie de fuir en courant, fuir ces lieux maudits, ces damnés murs oranges et cette multitude amorphe. Elle voulait rentrer chez elle, elle voulait que le jour se lève. Reprenant ses esprits, elle réunit un ensemble bigarré de vêtements qu’elle enfila au hasard, peu importe si ce n’était pas les siens.

Résolue, elle se dirigea vers la salle de bain afin de mettre un peu d’ordre dans son apparence. Allumant la lumière blafarde, elle affronta sans hésiter la cruauté du miroir. Diantre. Sa flamboyante chevelure rousse s’était parsemée de neige pendant la nuit. Les nuits ? Ses nuits, toujours furieuses, toujours semblables. Elle allait repartir lorsque la pensée du bébé la cloua sur place. Elle s’approcha de la baignoire à gestes mesurés, puis coula un regard au fond de la bassine. L’enfant était toujours là, de grands yeux bleu pluie fixant le plafond, immobile, gris comme une charogne. Elle le prit lentement dans ses bras, le pressa contre son sein. Il ne bougeait pas. C’était fou comme il ressemblait à Daniel ce gamin. Elle se recroquevilla sur le carrelage, des gouttes salées lui tombant des yeux. Elle voulait juste rentrer chez elle, dans son salon aux murs orange. Pourquoi personne ne la laissait rentrer chez elle ? Elle voulait que le jour se lève. Que le soleil revienne et chasse le noir. Alors, se balançant d’avant en arrière sur le dallage gelé pour mieux bercer le nouveau né, Justine chantonna une comptine de son enfance. Elle attendait l’aube.

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