Chapitre 39 - Scoubidous
Marianne raccrocha le téléphone, penaude. Tristan avait eu la gentillesse de la prévenir qu’il passait la soirée chez Paul. Sur un ton indifférent, elle lui avait répondu qu’il était libre de faire ce qu’il voulait. Une dizaine de jours qu’elle ruminait et qu’elle lui menait une vie impossible, avec des réflexions mesquines dès qu’elle en trouvait l’occasion. Elle se détestait quand elle faisait ça, mais c’était plus fort qu’elle. Mais elle savait qu’elle ne pourrait pas jouer cette comédie encore bien longtemps. Un jour ou l’autre, il faudrait qu’elle s’excuse auprès de lui et de Paul.
Elle s'apprêtait à fermer les volets quand elle s'aperçut qu'il s'était mis à neiger. De petits flocons tournoyaient dans les halos oranges des réverbères. Elle s'émerveilla de ce spectacle nocturne et resta le visage collé à la vitre. Elle sourit. Paul amoureux, c’était une très bonne nouvelle. Elle était si heureuse pour lui. Pourquoi ne l’appelait-elle pas pour lui dire tout simplement qu’elle était contente pour lui? Redoutait-elle qu’il la repousse? Ce n’était pourtant pas son genre de faire ça, mais plutôt le sien.
Après avoir fermé les volets, elle se fit un plateau repas devant la télévision. Une fois son dîner englouti, elle s’installa confortablement sur son lit, une tisane de thym à la main. Elle entreprit de lire un ouvrage pour un de ses cours qu’elle aurait du lire depuis longtemps. Rien que de penser à la faculté, son moral était au plus bas. Était-ce trop tard pour s’y mettre? Tristan était plus confiant qu’elle. S’ils décidaient de travailler dur, ils pourraient avoir leurs examens au rattrapage. Zofia était du même avis. Elle avait, elle aussi, insisté sur ce point.
Depuis plusieurs jours, Zofia avait été distante avec elle. Marianne avait fini par l'inviter à prendre un verre au bar de l’Ecluse. Elle s’était confondue en excuses pour son comportement excessif au Petit Marcel. Zofia lui avait alors expliqué que, même si elle avait compris sa déception vis à vis de Paul, elle avait eu tort de s'en prendre à elle. Elle en avait beaucoup souffert. Elle avait fini malgré tout par accepter ses excuses. Marianne s’en voulait de son comportement et surtout d’avoir essayé de pousser son amie dans les bras de Paul. Aussi, elle n’osait plus aborder le sujet. Elle fut étonnée que Zofia n'en parle plus mais se sentit soulagée, égoïstement.
Au bout d’une vingtaine de pages, elle eut envie de lui téléphoner. Elle attendit quelques sonneries avant de reconnaître sa voix dans le combiné. Voulait-elle la retrouver vendredi à la bibliothèque pour étudier? Est-ce que le début de l’après-midi lui conviendrait? Zofia répondit favorablement et lui proposa de la retrouver à quatorze heures. Elle lui souhaita une bonne soirée avant de raccrocher. Elle reprit son livre sans grande conviction qu’elle finit par abandonner rapidement. Elle préféra à la place sortir de dessous son lit sa boîte de scoubidous. Elle en prit un qu'elle avait tout juste commencé en début de semaine. Un porte clé en forme de tortue, aux couleurs vertes et rosées. Elle ne le lâcha plus, hormis pour une autre tisane.
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