Qui est le véritable tortionnaire ?
- Trahir la Reine est passible de la peine capitale, et nous l'assumons, de torture.
Elle connaissait la Loi. Et pourtant, elle l'avait brisé.
Brisée, c'est ce qu'elle allait être. Remplie de désarroi.
Trahie par une simple lettre. Elle se maudissait.
Elle faisait face à la foule qui se précipitait pour contempler le spectacle, elle déglutissait. La torture était-elle physique, mentale, ou les deux à la fois ? Ces gens n'avaient-ils rien de mieux à faire que de s'émerveiller de son châtiment, que d'apprécier sa douleur, et attendre sa mort ?
Quelle terreur pour elle, que d'être attachée ainsi à ce poteau... pourquoi donc appréciaient-ils de voir ces horreurs ? Quel plaisir pouvaient-ils en tirer ?
La foule acclama le tortionnaire qui venait de monter sur l'estadre.
Elle maudissait bien plus ces gens que son tortionnaire ou la Reine elle-même et ses stupides Lois. Elle maudissait le fait d'adhérer à la douleur d'une personne et de s'en réjouir.
Il allait la charcuter comme un vulgaire animal.
Dans tout son être, lui faire du mal.
Ces gens immondes regardant ce spectacle immoral.
Comme un spectacle tout à fait banal.
L'homme s'approchait de ce visage de désespoir. Il caressa sa joue, il se demandait quel supplice il pouvait lui faire subir. Devait-il lui brûler le visage, lui enlever la peau, lui crever les yeux ? Il ne savait que choisir pour faire souffrir cette femme. Alors il se tourne vers la foule, et haut et fort clama :
- Comment puis-je trancher une si délicate fleur ? Peuple, choisit donc !
Certains sifflaient de lui couper la langue, d'autres les oreilles, certains voulaient qu'on lui fasse couler de la cire dessus... le tortionnaire opta pour lui trancher la langue, sous une condition. Alors vers elle il se tourna, et un poème il demanda.
- Récite une poème de ta belle langue, s'il ne plaît pas je te la trancherais.
Oh, vous qui regardez cette horreur,
Qu'est-ce que vous fait son malheur ?
En tirez-vous bonheur ?
D'être là, admirateurs.
C'est toute la douleur du monde qui s'effondra sur elle quand son tortionnaire ouvrit sa bouche et arracha sa langue avec des ciseaux adaptés nommés "arracheur de langue".
Le poème n'avait certainement pas été du goût du peuple.
Elle crachait du sang, son visage devenait rouge. La foule criait de joie mais elle ne parvenait plus à distinguer les sons. N'était-ce pas assez que de l'humilier, il fallait lui faire du mal ?
Il semblait bien, car sa peine ne faisait que commencer. Elle voulait hurler, insulter et maudire cette foule, sans y parvenir. Essayant de gesticuler dans tous les sens, retenue par les sangles... son coeur battait la chamade, elle avait peur.
Elle vit encore le tortionnaire s'approcher, que voulait-il cette fois ?
Il prit sa main et lui trancha le doigt. Encore, encore de la souffrance, le sang coulait en abondance. La Reine, la haine, sa peine, la tenait en haleine.
Qu'allait-il lui arriver encore, le supplice allait durer des heures et elle n'était là que depuis quelques temps. Elle aurait préféré la mort. Là tout de suite, elle souhaitait disparaître de ce monde, déjà elle n'en pouvait plus... la souffrance de la torture pour le simple plaisir, n'était-ce pas ignoble ?
Toujours là, à profiter,
Ne pouvez-vous donc pas arrêter ?
Laissez-donc ça terminer,
Mais jamais vous n'oublierez.
Ce n'était pas encore assez pour la foule, le tortionnaire tour à tour la torture s'accélérait. Elle était de plus en plus douloureuse, et de plus en plus violente.
Il tranchait un doigt, puis un autre, encore un autre... et quand il n'y en avait plus, il tranchait la main. Fort heureusement, elle en avait deux. Deux fois plus de plaisir pour cette foule en délire, délirant de crauté. Deux fois plus de douleur, pour une pauvre femme en pleurs, pleurant de tout son coeur.
Il s'affairait comme un expert à lui faire éprouver cela, il s'avait comment la tenir en vie le plus longtemps possible, comment la détruire du mieux. Une torture physique extrême, trancher, saler les plaies, seins déchirés par l'utilisation de l'araignée espagnole... Et tout ça, se concluant par l'humiliation de rester ainsi à la vue de tous, dans une cage de fer... avant que les corbeaux ne viennent se repaîtres de sa chaire exposée.
Difficile de la reconnaître après cet acte barbarèsque. Elle n'avait plus d'yeux, plus de langue, plus de mains, plus de peau... tondue sur le crane, marquée au fer chaud, découpée, massacrée. Recouverte de blessures.
Voilà ce que c'était, la torture... être humilié, être détruit... ne plus être.
Vous êtes restés à la voir souffrir ?
C'est d'une réelle tristesse,
Il suffisait d'arrêter de lire,
Pour qu'enfin la torture cesse.
Annotations
Versions