chapitre 15

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Le visage bas, Nashran retournait chez Ogma. Ses mains tremblaient comme des feuilles même si Graan s’était fait très encourageant. Il lui avait offert tout ce qu’il pouvait après tout. Nashran n’avait eu qu’une courte entrevue avec lui et Anatola la veille. Il allait devoir se raccrocher à leurs mots pour seul espoir.

La main d’Ogma dans le creux de son dos était inflexible. Il l’avait conduit au milieu des autres jusqu’à leurs quartiers. Nashran avait eu envie de se laisser tomber de tout son poids et d’hurler pour qu’on l’aide, mais ils l’avaient déjà fait. Chacun de ces réceptacles l’avait déjà aidé et en restant là, sur le chemin, immobiles et silencieux comme une grande haie d’honneur, ils l’aidaient encore. Ogma avait dû céder à la demande de Graan, il serait libre une heure par jour. En échange, les réceptacles n'attendraient plus sur le pas de sa porte, mais ils veilleraient à ce que l’heure soit respectée. Ils n’oublieraient pas que l’un de leurs était captif.

La porte s’était fermée derrière lui et il avait eu l’impression de s’effondrer de l’intérieur. A côté de lui, Ogma pétillait de bonheur et Nashran eut soudain envie de lui faire mal.

- Je te hais.

Sans rien dire de plus, il avança dans l’appartement simplement pour s’éloigner de lui. Dans vingt-trois heures, il aurait le droit de partir, de sortir un moment seulement. Il devrait revenir également avant la fin de l’heure. Une heure. Une partie de lui en voulait à Graan pour ce marché si ridiculement petit. Une autre partie de lui comprenait parfaitement ce qu’il avait fait. Il lui avait offert une marge de manœuvre. Les réceptacles ne pourraient pas obtenir beaucoup plus, mais certaines personnes dans cet endroit avaient des vœux. La seule question était : comment convaincre quelqu’un de gaspiller un vœu pour lui ? Comment le convaincre de rentrer dans une guerre de vœux pour ses beaux yeux ? Cette marge de manœuvre n’était qu’une fenêtre, à peine une meurtrière, laissant passer le jour comme l’espoir, sans être réellement une porte de sortie. Non, Nashran n’y croyait pas réellement.

- Cela fait un moment, Nashran. Je sais que tu n’es pas très… complaisant en ce moment mais… Tu ne voudrais pas m’aider à faire naître la vie, mon cœur ?

Nashran leva le visage vers Ogma, cligna des yeux et lui fit un sourire carnassier.

- Tu me dégoûtes. Je n’ai pas plus envie de te serrer la main que de sentir ta bite en moi.

Ogma grimaça devant sa vulgarité crasse et fit un petit rire gêné tout en levant les mains dans un geste qui se voulait apaisant.

- Oh voyons… On a eu de bons moments ensembles. J’ai su te faire jouir après tout… Je serais très gentil. Vraiment très gentil. Et tu apprendras à m’aimer.

Nashran l’observa un instant puis s’esclaffa. De sa bouche jaillit un grand rire, un fou rire ou peut-être un rire fou.

- Ce n’est pas parce que tu le répètes en boucle que ça va devenir vrai tu sais. Je crois que je me tuerais avant que tu réussisses. Mais soit, puisque tu me condamnes à être ton reproducteur, baises-moi, connard.

***

Une heure.

La porte s’ouvrit et il se glissa à l’extérieur, Date l’attendait déjà et il le prit immédiatement dans ses bras. Nashran s’accrocha à lui de toutes ses forces en sanglotant. Il détestait être comme ça, mais il ne maîtrisait rien, absolument rien de ses émotions. Date le serra fort, exactement comme il en avait besoin et l’entraîna avec lui pour rejoindre les quartiers de Visu.

Ils évitèrent une immense orgie pour se glisser dans la partie la plus intime de l’endroit. Visu les y attendait, en compagnie de ses amis. Zeyn se leva pour prendre son amour contre lui et caresser son visage.

- Enfin là… Est-ce que ça va ? demanda gentiment Visu.
- Ca… Non, ça ne va pas. Il est complètement fou.
- Les réceptacles ont obtenu de t’offrir une heure. Graan a le bras long, il s’est aussi débrouillé pour mettre Ogma en froid avec un certain nombre de reproducteur.
- Ca ne suffira pas à ce qu’il me relâche… Il ne le fera jamais. Est-ce que… Est-ce qu’on peut parler d’autres choses ? J’aimerai… J’aimerai ne pas y penser pendant quelques minutes sauf si vous avez une idée qui pourrait me sortir de là ?

Date hocha doucement de la tête comprenant son besoin de simplement se divertir et après autant d’isolement, il ne lui proposa pas de rejoindre l’orgie toute proche. Ca n’aurait de toute manière pas été sympa pour Never qui n’y participait jamais. A la place, ils chahutèrent, discutèrent de tout et de rien et ensemble ne virent pas le temps passer. Nashran s’était rarement senti aussi vite inclus dans un groupe d’ami. Il n’était pas simplement un spectateur. Date et Visu lui renvoyaient la balle à chaque début de blanc, Zeyn un peu moins mais il semblait entièrement tourné vers Date alors ça ne faisait pas grande différence et Never… Never était assez silencieux en faites s’il y avait quelqu’un qui semblait à part, c’était lui, alors Nashran tenta de temps à autre de l’inclure, le plus souvent en vain. S’il n’avait pas eu l’air aussi apaisé, ça l’aurait peut-être mis mal à l’aise.

- Vous avez vu la nouvelle boutique ?
- Le truc de souvenirs ?
- Euh… ouais, je suppose. Comment tu peux l’appeler le truc de souvenirs ? Ils vendent des maquettes animées !

Visu éclata de rire devant l’air profondément outré de Date envers son compagnon, puis reprit son sérieux devant le regard noir qu’ils lui jetèrent.

- Elle est située où ? demanda-t-il pour se sortir de ce guêpier.
- Sur l’ancien truc de force…
- Ah…

Visu passa une main sur son ventre un peu trop épais. Oui, ils étaient sans doute nombreux à ne pas aller dans les lieux destinés au sport qui auraient dû les aider à rester svelte comme sur les affiches.

- C’est quoi des maquettes animées ? demanda soudain Nashran en souriant doucement.
- Ce sont des miniatures qui représentent des lieux… voir des objets ou des personnes. Il y a des mécanismes à l’intérieur qui les font bouger pour donner l’impression qu’ils sont vivants.

Il y eu un instant de silence, c’était la première fois que Never parlait aussi longtemps de la conversation et en sentant les regards sur lui, il haussa d’une épaule et lâcha :

- Quoi ? C’est sympa à regarder.
- Je crois que tu serais capable de tuer le fun… soupira Visu faisant rire les autres.
- Oh. Murmura Date tristement. C’est l’heure.

Et sur cette simple phrase, Nashran se sentit mourir de l’intérieur. Il fallait qu’il y retourne. Il avait hésité quant à la conduite à tenir. Obtenir une heure de liberté, ça n’offrait rien de plus à Ogma, ce n’était pas un échange. Nashran ne promettait ni d’être sage, ni d’être obéissant, ni de ne pas tout casser ou de ne pas tout faire pour partir. Mais on lui avait conseillé de rentrer à l’heure malgré tout, pour qu’il n’ait rien à lui reprocher concernant le seul « cadeau » qu’il lui faisait.

- On a qu’à y aller tous ensembles… Si ça ne vous embête pas ? demanda doucement Nashran.
- Ogma ne va pas apprécier de me voir. Confia Visu.
- Raison de plus !

Ogma n’apprécia effectivement pas lorsqu’il lui ouvrit la porte. Il semblait avoir mordu dans un citron acide à souhait. Nashran lui offrit un très grand sourire puis se tourna vers Visu et lui souffla :

- Merci pour ce merveilleux moment.

A côté de lui, Date éclata d’un grand rire, colla un bisou sur sa joue et lui promit qu’il reviendrait le chercher demain. Un instant après, Ogma avait saisi son réceptacle par le bras et l’avait tiré à l’intérieur de ses quartiers avant de claquer la porte sans leur permettre de dire quoique ce soit de plus. Les quatre amis restèrent devant la porte close, un peu abasourdi par la manière de faire.

- Je crois que lui, je ne l’aime vraiment pas. Avoua soudain Never, les surprenant un peu plus encore.

Date eut un petit sourire crispé en pensant que Never était vraiment le mieux placé pour sortir Nashran de là, mais il ne le lui demanderait pas. Il ne le lui demanderait jamais sachant à quel point ça lui coûterait. Quelle tristesse !

- Et si on essayait de penser à autre chose pendant quelques heures et demain… Demain, on l’emmènera rencontrer du beau monde !

***

Aller et venir dans un corps immobile, devant un visage rageur, lorsque l’on a connu la douceur d’une étreinte volontaire était assez peu satisfaisant trouvait Ogma. Il n’avait pas réussi à obtenir davantage de drogues, plus personne ne voulait lui en vendre. Foutu réceptacle bien-pensant ! Alors depuis, il faisait l’amour à Nashran sans ce type d’artifices. C’était un calvaire d’essayer de faire naître l’envie au milieu de ses insultes et ses « encouragements » parvenaient à le faire débander régulièrement.

- Allez ! Active-toi et jouis, putain ! Tu pourrais au moins être capable de faire ça correctement, connard, mais non… Non ! En plus, il faut que tu sois à moitié impuissant !

Ogma encaissait en grimaçant, cherchant la prostate de son réceptacle pour le faire taire. C’était très difficile quand l’autre n’envoyait pas les signes pour lui indiquer qu’il avait trouvé et bougeait de manière à rendre le coït mécanique plus qu’agréable. Le plus frustrant c’était de se souvenir de Nashran avant ça… Là où ils avaient grandi, Nashran faisait parti de ces personnes adorables prisent dans plusieurs petites orgies quotidiennes. Il avait alors un sourire pour tous, un mot doux, une attention quelconque -il semblait très doué pour savoir où toucher chaque partenaire- et le tout était sublimé par un déhanché de tous les diables. Il ne l’avait pas sélectionné pour rien. Il ne l’avait pas choisi simplement pour son joli minois et ses fesses toutes douces. Non, il l’avait pris pour un ensemble de critères et s’il était honnête avec lui-même, il l’avait pris parce qu’il en avait le pouvoir.

Nashran n’était pas d’accord ? Oui, mais lui, il avait le pouvoir de le baiser là où il le voulait et quand il le voulait. Cette seule pensée le fit jouir et éclater d’un rire cynique. Sans même sortir de lui, il se pencha contre l’oreille de son réceptacle et lui chuchota :

- Si tu savais à quel point tu m’es précieux… Ne bouges pas. Ne bouges pas, ce n’est pas fini. C’est le moment où l’on récolte le miracle.

Prit d’une inspiration soudaine, il saisit les chevilles de Nashran, sortit de son intimité sèchement en le faisant gémir et souleva ses jambes sans s’occuper de ses cris.

- Chuuut. Regarde, comme ça, tu ne vas pas en renverser une seule goutte. Un vrai petit réceptacle très performant.
- Arrêtes tes conneries et lâche-moi, Ogma !
- Non, non regarde… Tu vas rester comme ça jusqu’à la fin de la collecte. Mmm… Je crois que ça me donne juste envie de recommencer en faites. Est-ce que tu crois que je pourrais te suspendre et te remplir à raz-bord ? Tu pourrais déborder de moi.
- Je déborde déjà, connard ! J’en peux plus de toi !
- Je suis sûr qu’on peut faire mieux.

Et il passa une partie de la nuit à essayer aux dépends de Nashran.

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