Une fois de retour chez lui, Max aurait pu s’effondrer sur son canapé, mais se ravisa en repensant à la scène qu’il avait tournée dans la journée. Il opta alors pour une simple chaise, dans la salle à manger. Posé sur la table, juste sous ses yeux, se trouvait le pot de pâte à tartiner qu’Abby avait englouti la veille. Il sourit, ouvrit le couvercle et découvrit que, par chance, il en restait un fond. De son doigt, il racla le tout et, juste avant de le glisser dans sa bouche, en lécha une partie. Bizarrement, aucune pensée perverse ne lui traversa l’esprit à ce moment, et il ne se rendit pas même compte qu’il venait de sexualiser un simple geste, tout comme ce matin dans sa douche. En fin de compte, c’était juste son quotidien… Ça faisait partie de ce qu’il entreprenait chaque jour, filmé ou non.

Il venait de passer le verre désormais vide sous l’eau chaude, profitant de se laver les mains, lorsque la sonnerie retentit. Il ne put s’empêcher d’imaginer qu’il s’agissait peut-être d’Abby, et repensa au scénario d’hier : les baffes, le quiproquo, leur discussion… Soudain, ses propres mots lui éclatèrent en pleine figure : « Si tu as envie de parler ou besoin de quelque chose, je suis là. »

Alors, il se dirigea vers le hall d’entrée, inspira profondément, afficha son plus beau sourire et ouvrit la porte.

— Oh la vache ! J’y crois pas !

C’était comme si, tout d’un coup, son monde s’effondra de ne pas voir Abby, mais un mec tout à fait lambda.

— Mais t’es Xam Alle ! Purée, j’suis un grand fan ! J’ai vu tous tes films !

OK, l’entendre utiliser son nom d’artiste n’était peut-être pas le scoop le plus fou… Faire face à sa notoriété le mettait plutôt mal à l’aise.

— J’ai adoré ton film où tu t’es tapé cette prof de droit mariée ultra bonne pendant une retenue, et que…

— OK, OK c’est bon ! Euh, t’es qui au juste ? Tu fais quoi ici ?

Le jeune fan lui montra une boîte en carton et un sac en plastique.

— J’suis livreur. J’ai une commande pour l’appartement d’en face, mais elle répond pas, alors j’me suis dit que j’pouvais sonner ici Dis… Tu m’files un autographe, s’te plaît ?

— Ouais, bien sûr… Si tu me promets de rien dire à personne.

— J’suis tenu au secret professionnel, mon pote, t’inquiète pas !

Max roula des yeux, partit chercher un bout de papier qu’il signa à la va-vite, et revint.

— C’est pas non plus une raison pour me… harceler. Je compte sur toi, OK ?

Si un jour il aurait cru dire une chose pareille…

— Aucun souci, mon pote ! Ah et si tu penses à commander chez nous un de ces quatre, j’te ferai le tout gratos ! Cadeau de ton plus grand fan !

Merveilleux. Il en trépignait tant c’était la joie... Alors qu’il lui tendait son autographe, il rajouta :

— Ah euh, t’as bien dit que c’était pour l’appartement d’en face ?

— Ouais, mon pote ! Tu sais quand elle va arriver ? Faut que j’retourne bosser, même si j’aurais adoré plus discuter avec toi.

Encore un seul « mon pote » de sa part et il lui ferait bouffer la pizza AVEC le carton.

— Aucune idée… mais tu peux me laisser sa commande, je la lui donnerai moi-même à son retour.

— Ooooh ! C’est pour t’entraîner pour un de tes prochains films, c’est ça ?

— Euh… ouais, ouais. Si tu veux…

— Cool ! J’ai le droit de regarder ? Tant pis pour les livraisons hein, y a plus important dans la vie que de distribuer des pizzas !

— Quoi ?! Non !!

Oh. Mon. Dieu…

— OK, tu sais quoi ? Si tu te casses maintenant et que tu gardes le silence jusqu’à la fin de ta vie, je te promets un accès illimité et gratuit sur notre site, et des photos dédicacées de qui tu veux. Ça marche ?

— Waouh, trop la classe ça ! C’est le plus beau jour de ma vie !