CHAPITRE 10 : THOMAS 25 ANS PLUS TÔT, UN MERCREDI DE SEPTEMBRE 1988

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"La musique est une loi morale. Elle donne une âme à nos coeurs, des ailes à la pensée, un essor à l'imagination. Elle est un charme à la tristesse, à la gaité, à la vie, à toute chose. Elle est l'essence du temps et s'élève à tout ce qui est de forme invisible, mais cependant éblouissante et passionnément éternelle. "

Platon

 Julian et moi, nous nous connaissons depuis de nombreuses années, nous sommes dans la même école depuis une dizaine d'années, une école artistique. En effet, je joue du piano et Julian est un guitariste hors pair. Il tapote aussi sur piano et s'essaye au violoncelle, mais la guitare c'est sa moitié. Nous nous sommes connus dans un couloir de l'école, il transportait son violoncelle et je l'ai bousculé. Depuis, nous ne nous sommes plus quittés et aujourd'hui ne déroge pas à la règle, nous arpentons les couloirs du lycée. J'essaie de me concentrer sur ce qu'il me dit, mais rien à faire, je suis attiré par un joli brin de fille toute perdue, elle a les cheveux châtains clairs et de grands yeux verts. Elle doit être nouvelle, je ne l'ai jamais vue ici.

— Je te laisse, tu me raconteras cela plus tard.

— Mais attends, je viens de trouver un mot aux valves et...

— J'arrive mec, mais je vais d'abord aider cette fille qui me paraît bien seule. À plus !

— Mais Thomas, merde, écoute-moi !

— Plus tard, je reviens.

 J'avoue que je laisse tomber Julian et je me dirige vers cette fille que je ne connais pas, mais je vais changer cela.

— Bonjour, je m'appelle Thomas, tu as l'air perdue, je peux t'aider ?

— Bonjour, Sarah, enchantée. Oui je suis perdue, je cherche le local d'art et culture. J'y ai cours, et je ne sais pas où c'est, me dit-elle en se retournant vers moi et en souriant.

 Je n'ai jamais vu de sourire plus beau que celui-là, mon cœur vient de faire une fausse note. Elle me parait douce, calme et je lui réponds :

— Je t'y conduis, j'y ai cours aussi. Regarde, c'est simple, le premier chiffre représente l'étage, le deuxième le groupe de locaux et le troisième le numéro du local. Je t'accompagne, tu vas adorer ce cours. Robinson est génial comme prof, il connait tout sur tout en art. Aucun tableau, aucun peintre, aucune statue, aucune musique ne lui sont inconnus. Il est vraiment extraordinaire.

 Tout en parlant, je lui montre le chemin et nous arrivons dans notre local. Monsieur Robinson est un homme âgé d'une trentaine d'années, il a de petites lunettes rondes sur le bout du nez et il a toujours quelque chose à nous raconter. Il ne donne pas cours, il nous instruit. Il nous transmet sa passion. Nos journées avec lui sont faites de visites d'exposition d'art divers, de concerts de musique le soir ou le week-end. Maintenant il est vrai que nous sommes une classe réceptive à son cours, ce qui peut paraître bizarre pour des ados de dix-sept, dix-huit ans. On l'adore et c'est réciproque. Cela fait la sixième année que j'ai cours avec lui et je n'ai jamais autant appris que durant ses heures de classes.

— Bonjour Thomas, comment vas-tu ? me questionne-t-il quand nous entrons.

— Bonjour Monsieur Robinson, bien je vous remercie et vous ? Je vous présente Sarah, elle est nouvelle dans l'école et elle cherchait votre local, alors je l'ai accompagnée.

— Tu as bien fait. Bonjour Sarah, bienvenue, dans mon cours et au lycée. Installe-toi auprès de Thomas. Il y a une place à sa gauche, à sa droite, tu trouveras Julian son frère. Bienvenue !

 Nous allons nous installer, elle fait la bise à Julian et puis s'installe. Julian lui fait du charme, comme à son habitude, avec toutes les filles qu'il rencontre. Jeune, plus âgée, blanche ou de couleur, catholique ou protestante, aucune ne lui résiste et Sarah à peine assise est prise d'un fou rire suite à une blague idiote qu'il vient de raconter. Robinson parait pensif et une fois de plus, il bouscule son cours, s'assied sur son bureau et commence :

— Sarah, tu me fais penser à Sarah Brightman, je vous en ai déjà parlée ?

 Nous répondons tous un "non" et c'est vrai, nous ne la connaissons pas. Mais voilà ça c'est Robinson, une encyclopédie à livre ouvert. Après quelques minutes, nous savons que Sarah Brightman est une artiste anglaise née en 1960 et qui vient de sortir son premier album dont le nom est "The Trees They Grow So High", elle a joué dans diverses comédies musicales et elle est à l'affiche de "The Phantom of the Opera" , et c'est ainsi que quelques jours plus tard, nous serons tous réunis au théâtre afin d'assister à cet opéra remarquable. Robinson nous donne cours trois après-midi par semaine et il nous transmet son savoir, ses connaissances, sa passion. Il aime l'art et il veut partager cet amour. Je l'observe et il m'interrompt :

— Thomas, il y a quelque chose qui ne va pas ? dit-il en descendant de son bureau et en se dirigeant vers moi.

— Non, Monsieur, pas du tout, mais je me disais que votre métier était votre passion. Vous avez la chance de faire ce que vous aimez, vous ne nous donnez pas cours, enfin si techniquement on est assis à un banc dans une école, mais ce n'est pas cela, vous nous transmettez ce que vous aimez, vous parlez de tout, de rien. Sarah arrive et vous parlez de Sarah Brightman, qui n'avait je suppose rien à avoir dans le cours ? Vous voulez nous donner quelque chose, vous êtes un passionné et en vous voyant je sais que moi aussi je veux faire de ma passion mon métier, et ça c'est grâce à vous. Vous me l'avez transmis et je vous en remercie.

— Ton métier, ta passion. C'est comme cela que tu vois ce que je vous enseigne ?

— Oui, tout à fait.

— Et bien mon garçon si j'ai su mettre cela dans ton cerveau ou dans ton cœur, ou les deux, j'ai fait du bon boulot. C'est ce que je veux vous donner. Je ne veux pas vous interroger en vous demandant quelle est l’année de naissance de Sarah Brightman, tout le monde s'en fou et en plus on ne donne jamais l'âge d'une femme, ce que je veux, c'est vous faire réfléchir comme tu viens de le faire ! Je suis fier du travail que l'on fait ici en classe. Je veux que vous vous posiez des questions sur vous, votre job, votre avenir, sur ce que vous voulez faire et si chacun d'entre vous ici présent revient dans dix ans en disant "et Robinson, merci je fais ce que j'aime car je me suis posé les bonnes questions", j'aurais fait mon job, un bon job.

— Et Monsieur, vous parlez de notre job, moi je ne sais pas ce que je veux faire, ajoute Terence.

— C'est normal Terence à votre âge, cela viendra et c'est en te questionnant que tu vas trouver la réponse. Julian, dis-nous que veux-tu faire, toi ?

— Gigolo avec le physique qu'il a ! répond Terence.

— Bonne idée, mec, allongé sur un lit toute la journée, je vais y penser ! Moi, Monsieur Robinson je veux m'installer et écrire des chansons avec Thomas. Je veux que nos chansons soient connues dans le monde entier. Je veux qu'elles suscitent des émotions ! Je veux une réaction face à ce que l'on écrit, en positif ou en négatif, mais je veux que les gens qui écoutent les chansons que l'on a composées se mettent dans un fauteuil et disent "wow, je n'ai jamais rien entendu comme cela, ou se disent, tiens je me souviens de..." en écoutant notre chanson. Je veux que des couples se créent sur les slows que l'on écrits. Je veux remplir des stades avec Thomas et entendre des milliers de personnes chanter à l'unisson. Voilà ce que je veux.

— Et toi Thomas ?

— Nous avons la même vision des choses, Monsieur Robinson. Bon, je suis plus réaliste que Julian, si on remplit déjà des bars dans lesquels on se produit tous les week-ends, je suis content.

 Des rires fusent dans toute la classe !

— Mais Julian a raison, je veux susciter quelque chose chez les gens. Vous savez, on est branché rock, métal et on écoute de plus en plus un groupe américain qui se nomme Bon Jovi. On les a déjà vus quelques fois et lorsque le chanteur, Jon chante "Living on a Prayer" et que le public reprend cela en chœur, c'est cela que je veux. Les gens dans la salle sont aussi concernés que Tommy et Gina qui sont les personnages principaux de la chanson. On veut susciter de l'émotion, des sentiments et je pense honnêtement que l'on se débrouille plutôt pas trop mal. Il nous manque un batteur et un bassiste, mais une fois que nous serons au complet, on fera un bon job.

— Si tu ne m'avais pas planté pour retrouver Sarah, je t'aurais dit que j'ai trouvé un mot aux valves et qu’Hector et Hugo cherchent un guitariste et un pianiste, mais bon ma belle, tu as plus de charmes que moi....

 J'ai regardé Julian avec un air interrogateur. Il me transmet le mot des valves :

Bonjour, Hector et Hugo cherchent un guitariste, un piano, un parolier pour faire un bout de chemin ensemble. Si cela vous dit, on est dans le bloc A. Bonne journée, Hector.

Note  : sources concernant Sarah Brigthman : www.google.com, www.sarahbrightman.com

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