38/ Kros et Le Tunnelier

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 La cinquième et dernière forteresse fut éprouvante, mais bénéfique pour Kros. Elle ne différait en rien des quatre autres, si ce n'est qu'elle abritait le chef des tunneliers. Lorsque le jeune général, qui vérifiait les galeries pour s'assurer qu'il ne restait plus rien, se retrouva seul face à lui, il ne parvint à discerner aucune ressemblance avec ses sujets, ni avec quoique ce soit qu'il avait déjà observé. Une énergie étrange se dégageait de lui. Sa voix était mielleuse et caverneuse.

 — Oh, bien le bonjour, avait entamé le supérieur aux formes monstrueuses.

 — Bonjour, avait répondu Kros, tentant de chasser son effroi.

 — Sais-tu qui je suis ?

 — Oui, vous êtes le chef de ces êtres que nous avons éradiqué jusqu'au dernier. Vous êtes l'obstacle final à la réussite de notre mission.

 — Eh bien, eh bien, tous morts vous dites ? Dans ce cas c'est mon plan qui s'en retrouve tout capoté. Vous avez gagné cette manche, bien joué !

 La confusion s'empara du général.

 — Vous vous rendez ?

 — Non, j'en suis désolé. Je compte bien gagner la prochaine fois. La vie continuera sur ce monde, pour l'instant, mais je la ferai disparaître sur d'autres en attendant qu'une nouvelle occasion se présente.

 — Qu... Qu'est-ce que vous voulez dire ?

 — Eh bien, exactement ce que j'ai dit, enfin ! Maintenant, si vous me le permettez, j'aimerais bien vous tuer sans trop de douleur.

 Kros se raidit, l'expression défigurée par la terreur. De cette chose en face de lui émanait un grand pouvoir. Elle semblait bien trop sereine, comme le témoignait son discours verbeux plein d'assurance, se permettant même d'user de formules de courtoisie envers son ennemi. Elle insista :

 — Vous me semblez être un bon guerrier, et je ne peux me permettre de vous laisser vivre. Vous contrecarrerez peut-être d'autres de mes futurs plans. Mais, voyez-vous, je ne peux anéantir mes victimes que dans d'atroces souffrances, et étant donné la cordialité de notre échange et la vigueur avec laquelle vous vous battez, je n'ai nulle envie de vous infliger cela. Je vous invite donc à prendre cette pierre juste ici et à vous fracasser le crâne avec.

 Le jeune général, paralysé, n'arrivait pas à prononcer sa réponse ni à préparer sa posture de combat.

 — Voyons, ne m'obligez pas à faire la sale besogne moi-même. Je suis assez pressé, veuillez vous dépêcher. Voici, je vous l'apporte.

 Sans même bouger, le tunnelier à l'aura sombre rapprocha la roche jusque dans les mains du serviteur. Kros s'en saisit fermement, puis la lança de toutes ses forces vers l'ennemi. Elle lui passa au travers.

 — Voilà qui m'indispose au plus haut point. Vous refusez de coopérer.

 — Venez vous battre, ordure ! cria finalement Kros, méconnaissable.

 La monstruosité soupira.

 — Eh bien... Il semblerait que soit venu le moment des révélations. En réalité, je ne possède pas la faculté de mettre un terme à votre existence de mon propre chef. J'ai tenté un coup de bluff mais vous l'avez merveilleusement bien déjoué !

 — Qu'est-ce que cela signifie ? s'énerva le général.

 — Mais exactement ce que ça signifie ! Quand cesserez-vous avec vos questions sottes de la sorte ?

 — Je peux donc vous tuer sans que vous ne ripostiez ? D'ailleurs, vous savez quoi ? Je vous laisse le faire vous-même, prenez cette roche !

 — Je crains n'avoir nullement prévu de mettre fin à ma vie. Et ce n'est pas ce caillou qui pourrait venir à bout de ma personne. Vous, oui, peut-être, mais si vous essayez quoique ce soit, je n'aurais plus qu'à me volatiliser dans un autre monde.

 — Un mensonge, encore ? Il est impossible de changer de dimension depuis cet endroit ! 

 — Pour vous, sans doute, mais pas pour moi. Allez, je vous l'avoue : je vous aime bien en fait ! Mais l'univers n'est pas tel que vous l'imaginez. Que diriez-vous d'effectuer avec moi un petit voyage ?

 — Hein ? C'est encore une ruse, pas vrai ? Arrêtez vos pitreries sur le champ !

 — Absolument pas, ce n'est que la stricte vérité. Approchez-vous, n'ayez crainte. Touchez ma surface et acceptez cet inestimable présent que je vous offre ! Vous ne le regretterez pas !

 La curiosité de l'homme de guerre prit le dessus et il finit par accepter l'invitation. Une vive douleur parcourut son corps, puis un apaisement total lui parvint quand il atterrit au milieu d'un paysage infernal. L'excitation du maître des lieux était palpable.

 — Bienvenue dans mon antre !

 — Puisque nous en sommes aux confidences, répliqua le général, laissez-moi être honnête... Que c'est moche !

 — Vous direz-ça à Belz si ça vous chante, c'est lui qui s'occupe de la déco ! Moi j'aime bien.

 — Chacun ses goûts, comme dirait l'autre...

 — Bien, trêve de mondanités ! Laissez-moi tout vous révéler à propos du monde que vous croyez connaître et des "dieux" que vous vénérez sans en comprendre la raison...

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