La Gêne occasionnée
Jess pendait du plafond.
Une glue épaisse l’avait transformée en étrange lustre organique, la maintenant bras et jambes écartées par un filin reliant chacun de ses membres au plafond voûté de la galerie dans laquelle ils se terraient. Parfois, ses globes oculaires s’agitaient sous ses paupières closes, signe d’une activité électrique induite par l’étrange tentacule grisâtre qui s’infiltrait par l’avant de son front à l’intérieur de son encéphale, afin d’y insuffler d’étranges rêveries électriques. Catatonisme forcé et onirique, permettant aux créatures d’étudier la jeune Jess sous toutes ses coutures, de la pulpe rougie de ses orteils à son entrejambe rasé de près, humectée par les visions plantées dans son cerveau, de la paume de ses mains ouvertes à ses longs cheveux ondulés pendant dans le vide. Dès que l’activité électrique de son cerveau titillait le nerf du tentacule, signe d’un réveil imminent, une nouvelle rêverie express se retrouvait propulsée dans ses méandres de son crâne.
- What… the…
Mais Clément ne termina même pas son interjection, tant il était choqué par la scène qui venait de faire irruption devant ses yeux tandis que le battant de la porte coulissa sur ses gonds. Le sac qu’il portait sur son épaule glissa le long de son bras, jusqu’à s’écraser au sol dans un bruit étouffé précédent un silence de plomb qui sembla figer toute la scène : la porte grande ouverte donnant aux éventuels passants nocturnes tout loisir de détailler cette étrange scène de vaudeville bien salée, le visage décomposé de Clément, Jess le cul planté en l’air surmonté de leur rachitique troisième coloc, Math, dont la position jambes écartées et bras vissés sur ses flancs de l’étudiante taillait un peu plus chaque bloc de muscle de son corps insoupçonnablement athlétique.
Le silence sembla durer un siècle, peut-être plus. Puis l’aiguille des secondes de l’horloge de la cuisine recommença à scander le temps qui parut embrayer à nouveau toute la scène dans son cours. Jess tenta de se redresser, les joues piquées de taches de rousseur désormais rougies par une honte qui chauffait toute sa face, mais Clément la maintenait dans sa position involontairement en pesant de son poids sur le bas de son dos. Puis, tandis que tout le monde s’attendait à un bref walk of shame alors que chacun des trois protagonistes rejoindrait sa chambre en silence, remettant au lendemain la discussion qui découlerait de cette étrange soirée, Math surprit ses deux colocataires en reprenant de plus belle les mouvements de balancier qu’il avait entrepris avant que la porte d’entrée ne s’ouvre. Désarçonnée par la reprise soudaine des pulsations de plaisir, Jess ne put s’empêcher de lâcher un long râle tout en laissant ses seins s’écraser contre le plancher.
- Clément, je suis désolée, on pensait que…
Sa voix tremblait. Elle reprit sa phrase.
- Désolé pour la gêne occ...
Mais à nouveau elle mourut dans sa bouche. Lorsqu'elle essaya de se relever, que ses seins humides de transpiration se décollèrent des lattes de bois du sol en un scroutch sonore et que ses yeux se relevèrent, ils rencontrèrent un Clément déjà à moitié déshabillé, son corps gonflé de muscles encore protégé d’un unique jeans qu’une main s’attelait déjà à déboutonner.
Tout se brouilla dans sa tête. Un instant, elle crût qu'elle rêvait. Que quelque chose allait céder en elle, qu'une couche de réalité allait enfin s'ouvrir à elle pour s'extirper de ces brumes libidineuses dans lesquelles elle semblait piéger - Dieu qu'elle aimait ça ! - mais cette sensation lui échappa immédiatement.
Lorsque Jess posa ses yeux sur les muscles saillants des pectoraux de Clément, deux carrés de chairs apposés au sommet de son buste en l’élargissant de manière presque obscène saupoudrés d’une pilosité qui réhaussait le hâle hispanique de sa peau, elle se sentit défaillir. La queue qui la pilonnait par derrière humidifiait d’autant plus sa chatte qu’elle sentait dégouliner sur ses cuisses tremblantes. Elle releva une seconde fois la tête, et cette fois-ci sa carapace d’abdominaux jusqu’à une dense touffe pubienne, couleur de jais. Le dernier bouton de son Levi’s céda, laissant les deux canons de l’habit glisser le long de ses cuisses aux quadriceps gonflés.
Jess vit enfin le morceau de chair d’elle convoitait tant, pas encore complètement durci, et entrouvrit la bouche pour l’accueillir.
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