Quand un mur se dresse sur mon chemin, j'ai la certitude qu'il existe uniquement pour que j'aie le loisir de l'abattre. Dans le fond, il est vrai qu'un obstacle n'en est un que lorsqu'on se contente de croire qu'il est insurmontable. Une fois que l'on est passé au-dessus, on se retourne et cette difficulté devient une fierté, un épisode qui enrichit nos souvenirs.

Une chose facile n'a aucun intérêt. La beauté d'une chose simple ne peut être qu'éphémère, le plaisir qu'on en tire uniquement spontané. Si on a nul besoin de se battre pour obtenir ce que l'on veut, l'objet du désir ne nous procurera jamais de véritable satisfaction. Celui à qui tout arrive sur un plateau d'argent trouve l'opulence si commune que rien ne l'émerveille ; son existence est d'un monotone absolu. Celui qui doit agripper la vie à mains nues et lutter pour en extraire le moindre grain de sable trouvera la poussière magnifique. Lui seul sera capable de voir la beauté partout où elle est. Seul celui qui s'acharne à gravir les obstacles et qui endure les pires souffrances pour y parvenir, seul celui qui se nourrit de ses douleurs et prend le temps de les déguster saura apprécier l'éclat de la lumière au bout du tunnel. Sans jamais connaître le véritable malheur, comment être capable de distinguer son opposé ? Lorsque je me blesse, je regarde le sang couler de mes plaies pendant longtemps avant de chercher à stopper l'hémorragie : je me remplis d'une vision de torture pour pouvoir, lorsque je la croiserai, reconnaître la douceur. Je n'essuie pas les pleurs qui coulent sur mes joues : j'incarne la tristesse pour mieux saisir la joie.

Je répète en boucle les mêmes erreurs en espérant que le destin me sourira. Et si je m'effondre, peu m'importe ; je ne cours plus après mon bonheur. Chaque nouvelle chute m’endurcit, chaque cicatrice me porte un peu plus loin. Fais-moi mal, catin de Vie ! Plante-moi le poignard entre les omoplates ! Arrache-moi le cœur et plante-y tes griffes ! Bouffe-moi ! Bouffe-moi tant que je suis encore tendre ! Car bientôt tu te briseras les crocs sur ma carapace et c'est moi qui te baiserai, car je ne baisse jamais les armes et je ne perds jamais espoir ! L'espoir, ni la vie ni la mort ne peuvent l'altérer. L'espoir a fait de moi une entité immortelle.