Dans un futur lointain... très lointain...

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Prologue :

« Poussière, tu es poussière et tu redeviendras poussière. » L'humanité avait toujours évoqué cet adage pour braver l'éphémérité de sa vie en acceptant la mort. Une suite logique. Une certaine continuité. Mais nul n'était prêt à l'envisager à l'échelle planétaire, quand bien même tout l'annonçait.

La Terre est morte. Un amas de poussière sombre où ne survivaient que quelques individus traquant la moindre goutte d'eau, le moindre espace vert. Lorsque le compte a rebours avant l'éruption solaire avait commencé, l'Homme construisit malgré tout ce qu'ils appelaient des oxybulles : d'immenses serres protégeant de l'intense chaleur dégagée lors de l'instant fatidique, permettant la survie de ceux se trouvant en dessous.

Le temps passait mais rien n'y changeait. L'atmosphère lourdement fragilisé laissait toujours la chaleur du noyau s'échapper de la surface devenue glaciale. Petit à petit, la voûte céleste se reconstituait et la température extérieure aux oxybulles remontait progressivement jusqu'à ce qu'enfin, le monde puisse de nouveau être exploré.

Oxybulle 7 : France : Seine et Marne

La porte sas de l'oxybulle s'ouvrit dans un bruit de dépressurisation et d'articulation de vérins pour laisser sortir un quad et deux motos, sur lesquelles on devinait l'estampille de la Gendarmerie Nationale, chevauchés par trois silhouettes sombres. A vive allure, elles s'aventurèrent dans la plaine désolée qu'est devenue l'Ile de France à la recherche de denrées de valeur.

Après plusieurs kilomètres, ils s'arrêtèrent. L'une prit ses jumelles et scrutait les alentours tandis qu'un autre consultait une tablette tactile.

- Tu vois quelque chose Gab ?, demanda-t-il en glissant son doigt sur l'écran.
- Que dalle, répondit-elle en rangeant ses jumelles.
- On trouvera rien avant Mirty de toute façon, annonça la seconde femme les accompagnant. La zone a été pulvérisée jusqu'à Villeparisis,
- J'crois bien qu'Maé a raison, Noh, soupira Gabrielle.
- Logique, se contenta-t-il de conclure en rangeant sa tablette. On y va.

La longue route repris vers le nord et les heures s'écoulèrent avant que le petit groupe ne put enfin apercevoir les ruines de la dite ville. Ralentissant en y pénétrant, l'investigation des lieux commença, parcourant les vestiges de ses rues pour ne voir que pierre effondrée et murs sales.
Ils s'attardèrent sur une place où un ensemble de maisons semblait en moins piteux état et se séparèrent en vain puis reprirent leur traverser vers l'Est. Il ne fallut pas longtemps avant que Maëva ne s'exclame.

- Par ici !!, cria-t-elle avant que son rire ne s'élève.

Son frère et sa sœur arrivèrent vers elle en courant alors qu'elle sortait d'une bâtisse qui jadis devait être colossale vue l'ampleur des ruines.

- Venez m'aider, c'est incroyable !!
- Mais t'as trouvé quoi ?!, l'interroge Nohlan en entrant dans l'édifice et allumant sa lampe torche alors que déjà sa sœur cadette dévait des escaliers, Gabrielle sur leurs talons, trois lanières à ses épaules.
- Hey ! Attendez ! Les flingues !!

Nohlan s'arrêta à mi-chemin, se retournant pour tendre une main dans laquelle Gabrielle jeta un Famas, gardant celui de Maëva en bandoulière dans son dos avant d'armer le sien. Ils allumèrent leurs torches frontales et continuèrent à descendre l'escalier métallique.

- Elle est où la frangine?, lâcha-t-elle à voix basse.
- Par ici !, résonne alors la voix de l'intéressée.

Ils hâtèrent le pas pour la rejoindre et tombèrent des nues devant une installation de production à la chaîne automatisée visiblement vétuste et n'ayant pas tourné depuis des lustres.

- C'est quoi ce délire, souffla Nohlan d'un ton admiratif.
- Une salle de torture, peut être ?, se hasarda Gabrielle d'un air désabusé.
- Une salle de quoi ?, l'interrogea-t-il en s'approchant d'une machine pour en presser plusieurs boutons sans effet.
- J'ai entendu des histoires. Y paraît qu'à une époque des gens faisaient volontairement du mal aux autres parce qu'ils étaient puissants ou quelque chose comme ça.
- Pourquoi ils faisaient ça ?, levant la tête pour éclairer les hauteurs tout en marchant, ne révélant que maintes tuyaux et câbles.
- Pour s'amuser, j'crois... j'sais plus. Ils étaient p'tet parano.
- Ou complètement fous.

Maëva se pointe, enthousiaste.

- Bon vous faites quoi ?
- Prends ton fusil, Maé, dit Gabrielle avec un mouvement d'épaule pour lui montrer l'arme dans son dos.
- Attends, attends, j'vais avoir besoin de mes mains, dit elle en prenant l'arme et la plaçant dans son propre dos.

Elle escalade alors la chaîne de montage et plonge les mains dans une large trappe ouverte pour sortir un rouleau entouré d'une matière plastique. Habillement, elle saute en contrebas en serrant sa trouvaille contre elle et l'époussette rapidement.

- Woaaahhh !!, s’ébahit Nohlan. Me dit pas que c'est...
- Siiiii !! Du papier-bulle !! On est riiiiiche !!
- C'est pas possible..., souffla Gabrielle en posant la main dessus pour en retirer un peu plus de poussière dans un geste lent comme si la précieuse matière risquait de s’effriter si le touché était trop franc.
- Mais attends, reprit Nohlan, ça veut dire qu'ici... ils en produisaient ? Carrément...
- Mais, ouai ! C'est dingue hein ! Faut le remonter, on rentre ! On rentre !

Et sans attendre, elle s'élança pour rebrousser chemin et gravir les escaliers. Nohlan et Gabrielle s'attardèrent un moment en se regardant, échangèrent un sourire et lui emboîtèrent le pas. Nohlan arrêta subitement Gabrielle dans les marches du plat de la main sur son buste et lui fit signe de faire silence avant de désigner l'entrée d'un signe de tête. Lentement, sa jeune sœur gravit deux marches de plus et écarquilla les yeux en voyant son aînée dans l'encadrement de la porte, le mince rouleau de papier-bulle à ses pieds, les mains en l'air coudes à 90°.
Elle reporta son attention sur Nohlan et lui fit signe d'approcher de la porte en frôlant les murs. Ce qu'ils firent en remontant lentement leur Famas pour le placer dans le creux de leur épaule. Une voix masculine s'élèvea.

- Et bien, et bien, et bien. Deux jolis trésors que voilà. Sans compter vos bécanes. Y sont où tes compères, mh ?
- Tu connais pas la réponse universelle à cette question ? Elle date pas d'hier pourtant.
- Fais la maline tant qu'tu peux, ça va pas durer. Vous autres, allez m'les chercher pendant que j'discute avec notre nouvelle amie.
- Allez, sort de là, lui ordonna le type afin qu'elle s'avance ce à quoi elle ne répondit que par un sourire silencieux.

Pendant ce temps, Nohlan se mit en position, dos à la lourde porte bancale tandis que Gabrielle se hissait habillement pour gagner un contre-haut sans autre bruit qu'un léger cliquetis à peine audible lorsque son pied se posait sur la taule. Adossé au mur d'enceinte de l'usine détruit, elle osa un regard discret en bas et fit le chiffre quatre avec ses doigts à l'intention de son frère. Il acquiesça et se mit accroupie dans la pénombre, patientant.

- On t'a dit d'avancer, la môme, lui dit un deuxième en l'attirant vers l'extérieur.

Mais alors qu'il se baissait pour ramasser le rouleau, un tir de Gabrielle le toucha sur la nuque et le fit tomber au sol, raide, avant qu'elle n ai eu le temps de toucher le dernier celui-ci se mit à couvert derrière ls quad. Les deux autres entraient à ce moment là et prirent une rafale envoyée par Nohlan leur attribuant le même sort qu'au premier. Maëva essayait de se dérober, courant de côté, mais se figea alors que des tirs s'abattirent devant elle. Ne bougeant plus, son regard s'orienta vers la droite où le truand à couvert à une vue dégagée sur elle.

- Toi, tu bouges plus, lui dit il avant de hausser le ton pour être entendu. J'ai votre copine en ligne de mire. Soit vous vous rendez, soit j'lui mets une volée et j'vous garantis qu'elle se relèvera pas !!
- La loi interdit l'usage des armes létales même en dehors des oxybulles !
- Ah ouai ?! Et qui ira nous accuser hein ?! Pas d'témoins... pas d'crime !

Gabrielle du haut de son perchoir pesta entre ses dents et regarda son frère, attendant. Il baisse son arme et acquiesça pour répondre à sa question silencieuse. Elle le rejoignit d'un saut alors que son frère annonça.

- On s'rend, tout deux envoyant leurs armes en les faisant glisser au sol vers la sortie.

Puis ils sortirent les mains derrière la tête. Le type, prudent, sort de derrière le véhicule en braquant son fusil sur eux alors qu'ils s'avancent.

- Bah voilà, c'était pas compliqué, dit-il en ramassant les armes sans les quitter des yeux puis se saisissant de celle encore dans le dos de Maëva.

Subitement, elle lui envoya son coude dans le nez puisqu'il braquait sa fratrie. Par maladresse et surprit, leur agresseur pressa la détente et les tirs partirent au hasard. Gabrielle se jeta au sol tandis que Nohlan vint abattre un violent coup de poing derrière la tête du type alors sur le point de fusiller Maëva. Ramassant l'une de leurs armes, il lui tira dessus, l'entravant alors.

- Bien joué, Maé, gratifia-t-il sa cadette. On s'arrache ramasse le... raaaah !!

Il se précipita alors vers le papier-bulle dont les tirs avaient enflammé l'extrémité. De son pied, il y lança de la poussière pour y mettre fin.

- On en a perdu plus de la moitié !, pesta-t-il.
- Faut s'bouger avant que la paralysie les relâches, Noh !, puis s'avançant vers Gabrielle. Gab, tu peux t'rel'ver hein !
Ce qu'elle tenta de faire pour retomber assise, couverte de sueur froide, ses mains encerclant sa cuisse sanguinolente.

- J'suis touchée..., souffrante.

Nohlan ayant chargé et attaché le rouleau sur le quad revient vers elles.

- On va t'aider à monter sur le quad, ça ira mieux qu'à moto. On rentre... et vite. Tiens bon.
- Tu vois... c'est l'genre de type qui aurait aimé les salles de tortures...
- Mh, confirma-t-il. Ces armes sont censées avoir toutes été supprimées.

Ils commencèrent à quitter les lieux quand Maëva arrêta lentement sa moto.

- Tu fais quoi ?!, l'interrogea son frère d'un ton alarmé.
- … j'ai oublié un truc, répondit-elle particulièrement sérieuse.
- Grouille alors.

Elle fit demi-tour et fusa vers les restes de l'usine. Nohlan, redressé sur sa bécane, prit une gorgée d'eau et vînt en donner à Gabrielle. Tout deux échangèrent un regard stupéfait en entendant quatre coup de feu retentir à intervalle régulier. Leur sœur revint à leur niveau rapidement. Ils la regardaient interdits.

- Fallait pas blesser Gab, dit elle en haussant les épaules.
- Pas d'témoins... pas d'crime, conclut son frère simplement.

Puis ils reprirent leur route et rejoignirent le sanctuaire de l'oxybulle 7 où ils purent échanger leur précieux butin contre du savon, de l'eau et des rations. Le papier fort abîmé hélas ne leur rapporta pas autant qu'il l'espérait, beaucoup de bulle affectées par la chaleur des flammes n'émettant qu'un faible « pop ».

Leur épopée à la surface des terres sombres de la planète ne faisait que commencer.

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