Unique
Je suis là assis en tailleur face à une bougie qui éclaire mal ce grenier de mon enfance, j'attends avec impatience mon invité je l'attends lui et personne d'autre, je regarde le velux qui donne sur une pleine lune éclairant les alentours, tout d'un coup j'entends un :
-Désolé du retard mec, quelques petites choses à régler.
Il est arrivé sans un bruit lui et sa nouvelle canne flambant neuve, je suis riche ! Tout son être le hurle à quiconque poserait son regard sur son polo hors de prix et sa rolex dernier cri, tout en oubliant pas sa somptueuse canne, il s'est même permis de bronzer, j'ignore cependant si son bronzage est naturel, je lui réponds en souriant :
-Ne t'en fais pas nous avons toute la nuit devant nous.
Il s'assoit en tailleur lui aussi, il me demande rêveur :
-Ce vieux grenier poussiéreux me rappelle des souvenirs ! Te souviens-tu de toutes les bêtises que nous avions pu faire ?
-Oh si je me souviens ! Nous nous croyions tout puissant à l'époque, nous étions invincibles.
-Malheureusement la vie d'adulte nous a rattrapés aussi vite que nos fantaisies.
Il se met à regarder la lune et soupir :
-Tu te souviens on voulait recréer le monde, combattre toutes les injustices, tant de temps perdu et pourtant tu continues aveuglément à poursuivre cette utopie dont on a tant rêver.
-Que veux-tu je ne suis pas devenu un capitaliste qui aime exhiber sa richesse en broutille.
-Autres temps, autres mœurs, que veux-tu ? C'est la règle si je veux survivre dans ce monde de brute.
Au moment où il me dit cette phrase j'ai l'impression de ne plus le connaître, je lui demande amer :
-Pourtant tu as l'air de t'y plaire dans ce jeu dangereux, n'est ce pas ? Toute cette douleur, toute cette vigueur, cela en valait-il vraiment la peine ? Je me demande qu'est-ce que ça fait de savoir que tout cela n'a servi absolument à rien ?
Il me fusille du regard et me dit cinglant :
-Sais-tu depuis combien de temps je m'immole ? Sais-tu depuis combien de temps je me déteste ? Sais-tu ce que ça fait d'arborer chaque parcelle de ce corps ? De ton âme ? Les atomes de l'énergie qui continue à faire battre un cœur désert, futile et frêle, de jeter un regard furtif dans le miroir de peur d'être repousser par la vision d'horreur qui s'y trouve répugnante et écœurante et corruptrice.
-Je me rappelle du temps où nous nagions à contre courant, c'était dur mais la victoire était des plus satisfaisantes, tu as maintenant décidé de te laisser porter par ce courant qui t'a emmené au plus haut de l'échelle sociale, si le monde entend ne serait-ce qu'un mot de ton discourt, les faux prophète affluerais en fulminant devant une telle abomination en prétextant une folie, une affaire familiale ou que sais-je encore.
-Ils fuient les fluides fétides que j'exhale, mais ma fringale est féroce, je changerais le monde à ma façon tu verras !
-J'en suis sûre, tandis que les autres seront abreuvé des mensonges fondateurs de cette farce, ils enjoliveront les horreurs de tes songes.
-Totalement et quand tout sera détruit, les amas de débris formeront des petits monticules pathétiques conséquences de la passivité silencieuse des humains.
-Tu es humain, je te le rappelle, mais tu as raison les splendeurs de jadis se sont évanouies, tout semble dépouiller de chaleur, les vestiges du monde seront un linceul pour l'espoir.
-Nous en arriverons toujours au même point très chère moi.
-Et oui, car nous en sommes arrivés au même point il y a bien longtemps de cela, nous avons la même foi.
-Qui est...
On prononce les mêmes mots simultanément :
-Le doute comme vecteur de l'humanité.
Il se relève et me dit amicalement :
-Merci à toi mon ombre de toujours me remettre dans le droit chemin.
-Je serais toujours là quand tu auras le plus besoin de moi, chère moi.
-À un de ces jours.
Et nous disparaissons tous les deux sous la lumière éblouissante de la lune.
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