La Mort D'Aspasie
Sur son lit sanglé d’un matelas ambré, l’indigne Aspasie, connue pour ses complots flamboyants, ses trahisons violentes, était fatiguée, fatiguée des amours futiles du printemps, des cantilènes d’un automne blême et sans fin, fatiguée, enfin, d’avoir subi cette vie ordinaire et pompeuse que ses parents rêvaient pour elle depuis les jardins en enfance, cet éden merveilleux, soleilleux et sans pluie, qui l’avait tant dégoûté des promesses de la vie et qu’elle s’acharnait, vipérine et altière, à assombrir ; enfin aux portes de la mort, son tombeau aux soies d’ambre, humide de sa miction, se transforma en barque et elle glissa, glissa lentement, glissa telle une ondine sur les eaux moirée du Léthé pensant qu’elle irait aux confins de l’Enfer par la voie sinistre du Styx ; hélas, l’absence de Charon la chagrina jusqu'à l'acrimonie : la destination de cet autre fleuve ne faisait l'ombre d'un doute - dans un déluge de couleurs virulentes, de parfums languides mais féroces, entêtant à en frémir, les fleurs de l’Élysée dardaient leurs pistils comme des lances, des flèches cruelles ; elle souffrirait, l’indigne Aspasie, transpercée de toute part par cette horrible béatitude !
Annotations