Prisonnière
Le bas de sa robe ressemblait à un tas de torchons et le corsage déchiré laissait apparaître la fine dentelle de ses dessous. La peau était blanche, parsemée de taches de rousseur et une énorme ecchymose violacée teintait son bras dénudé. Les cheveux en bataille, les yeux hagards, la lèvre fendue. À ses côtés, deux corps inertes : étaient-ils morts ? Elle n'en savait rien... L'air était humide, le sol froid et l'unique lampe de la pièce grésillait de façon aléatoire. Les flashs lumineux élcairaient par saccades son épiderme meurtri. Le goût métallique de son propre sang emplissait sa bouche et ses membres lui faisaient atrocement mal. Ses mains ligotées fermement dans le dos lui bloquaient les bras dans une position inconfortable. À genoux, elle essaya une énième fois de se libérer. Chaque mouvement n'était qu'agonie. La corde râpeuse lui brûlait les poignets et lui coupait presque la circulation. Elle avait perdu toutes sensations au bout de ses doigts mais tout ce qui importait désormais, c'était de s'échapper d'ici avant qu'il ne revienne. Prise d'un frisson incontrôlable, elle s'évanouit juste après s'être disloqué les pouces.
Elle reprit conscience, étalée sur la faïence glacée, des cheveux coincés entre ses lèvres sèches. En se redressant, une toux déchira ses poumons et elle cracha du sang coagulé. Une, peut être deux côtes cassées, compta-t-elle dans sa tête. Ses pouces avaient enflé le temps de son inconscience, une heure sinon plus. Elle tortilla ses mains dans son dos, ignorant les éclairs de douleur, jusqu'à les libérer. Ses liens tombèrent mollement sur le sol. Elle essaya de bouger les jambes, en vain. Un gémissement brisa le silence. A la périphérie de son champ de vision un des prisonniers reprenait ses esprits avec difficultés. Ses traits de se figèrent d'horreur : les commisures des lèvres de l'homme avaient été cisaillées en un sourire macabre. Un œil gonflé finissait de rendre l'individu à la fois pathétique et effrayant. Le troisième corps était toujours inerte. L'homme défiguré ne semblait pas avoir noté sa présence. Diane se tourna pour défaire la corde nouée autour de ses chevilles. Sans pouce valide, l'entreprise prenait du temps et sa vision se troublait quand la douleur devenait trop intense.
Obnubilée par sa tâche, Diane n'entendit pas la porte s'ouvrir dans un raclement métallique. En revanche, elle revint à la réalité quand une poigne de fer agrippa sa chevelure et la tira violemment en arrière. Sa tête heurta le sol et elle aperçut le visage de son agresseur dans un flou de lumière vacillante. Ses yeux papillonnaient. On la traîna comme une vulgaire poupée. Toutes les aspérités du carrelage lui rappelaient ses os brisés. Elle pleura en silence, du moins essaya, mais aucune larme ne coula. Son bourreau la balança sur un fauteuil de bois et se délecta de saisir ses mains par les articulations enflées, avant de verrouiller des entraves rouillées autour de ses poignets. À cet instant, Diane savait qu'elle allait mourir. Elle ferma les yeux et pria. La lame du couteau toucha sensuellement sa paupière droite, puis glissa lentement sur la gauche. Elle n'eut aucune réaction. Lorsque la pointe s'enfonça dans sa peau, elle hurla.
Malgré ses yeux pleins de sang, Diane ne pouvait échapper au spectacle monstreux qui se déroulait devant elle. L'homme tenait entre ses doigts ses paupières découpées, son excitation visible déformant un pantalon de cuir crade. Il tournait sur lui même, un sourire béat aux lèvres, des gouttes vermeilles tâchaient l'entièreté de son visage. Il approcha les lambeaux de chair sanguinolant à sa bouche et les embrassa tendrement, puis les positionna sur ses propres paupières. Sa main descendit le long de son torse. Révulsée, Diane se vomit dessus. Pris dans sa transe sexuelle, le psychopathe s'affairait. Au moment de la jouissance, il poussa un cri rauque, presque animal, et resta un moment sans bouger, sa virilité encore parcourue de vagues de plaisir. L'homme se rhabilla, comme dégouté de lui-même, jeta les paupières au loin et se mit à sangloter. Il se roula en boule sur le sol, la tête entre les mains.
« Non, père, non ! Je t'en prie... »
Il criait, le regard dément.
« NON ! »
Il hurlait, ses larmes devenues rouges du sang de Diane. Il oscillait en va-et-vient incessants, visiblement prisonnier d'un cauchemar. Puis, il s'arrêta net, se releva et s'approcha de sa prisonnière. L'odeur acide du vomi emplissait la pièce, couvrant celle répugnante de sperme. La tête de la jeune fille pendait sur son torse, apathique.
«La race humaine me dégoûte. »
Ce furent les derniers mots entendus par Diane, avant que le monstre ne l'achève d'une balle dans le crâne.
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