J'écris depuis que j'ai sept ans. Je le faisais parce que j'aimais raconter des histoires dans lesquelles je modifiais la réalité : je rendais tout plus joli. Je le faisais parce que cela me procurait la sensation d'être dans une bulle, et que cette bulle était positive et douce. Pas comme le quotidien à l'école, avec les adultes et les autres. Je n'aimais pas les mathématiques, la maîtresse me faisait rougir et me laissait pleurer. J'ai écrit en commençant par cela, l'échappatoire. Fuir car il y avait mieux ailleurs. Et ensuite, j'ai pris plaisir et passion à apposer les mots de façon un peu plus poétique.

Je ne me sens pas particulièrement architecte de l'écriture. Je ne bâtis rien, du moins rien de solide dans les fondations car tout est construit sur mes émotions. Il arrive qu'elles dévorent les mots, et parfois c'est l'inverse. En général, je ne fais pas de brouillon, j'écris comme cela vient. Je ne relis pas, du moins cela est dommage car ça m'éviterait bien des fautes, mais si je relis, je n'arrive plus à écrire et la concentration s'abîme. Je préfère quand c'est brut, que ça s'écrase sur la page blanche. Les mots se posent comme ça, ils viennent en moi et sont déposés là, comme si j'étais tellement habitée par ceux-ci que plus rien ne pouvait stopper cela. J'écris comme je suis, les étages se bâtissent doucement mais sûrement, la seule chose que je travaille ce sont quelques fois les rimes, les synonymes et la façon dont je vais appuyer plus ou moins fort l'émotion que je souhaite transmettre.

Mais je ne me mets pas la pression. Parce que sinon, les fondations s'effondrent. Si je réfléchis trop à la façon dont j'écris, c'est ici que tout s'arrête. Il n'y a plus le brut que j'aime, plus l'âme qui s'éponge, plus la pulsion du cœur qui passe d'un chuchotement à un cri. C'est comme ça. L'écriture est un jardin secret, le mien, dans lequel pousser la porte grinçante et rouillée est aussi agréable que les soirs d'été. J'écris comme je suis.