Dans une forêt luxuriante éloignée du royaume, au cœur d’un large territoire contesté entre les humains et les démons, se fait entendre le trot de chevaux parcourant les sentiers accidentés. Le soleil venant tout juste de se lever teint d’une couleur orange vif les feuilles des végétaux et réchauffe l’atmosphère. Le chant mélodieux des oiseaux, aussi paisible soit-il, ne suffit pas à apaiser la tension discordante dans l’air.

Enfourchant les équidés, un groupe de chevaliers en armure étincelante escorte un carrosse somptueux marqué de l’emblème de la famille royale: un corbeau bleu déployant ses ailes. Les hommes sont nerveux et confus, mais ils suivent loyalement leur meneur à travers ce territoire dangereux. Ils sont au service de la couronne et n’ont pas tendance à contester la volonté de leurs souverains, mais ils ne peuvent pas s’empêcher d’être préoccupés par la décision du prince de s’aventurer dans une zone hostile accompagné seulement d'une dizaine de gardiens. Alors que la cadence ralentit, un membre du groupe cède à la tentation et pose la question qui brûle aux lèvres de tous.

• Capitaine Dufort, pourquoi sommes-nous si peu nombreux ? Je comprends que nous venons pour des fins diplomatiques, mais les démons sont des sauvages. Nous serons vulnérables si les négociations tournent mal.

Le capitaine est à l’avant de la formation et mène le convoi. C’est un grand homme chauve dont les traits sévères du visage reflètent sa position d’autorité. Il se distingue avec une épaisse moustache noire surmontée d’un nez pointu. Il répond à la question en grommelant.

• J’ai conscience que le prince a réfléchi longuement avant de prendre l’initiative d’entrer en pourparlers et il doit avoir des arguments solides s’il a le courage de les rencontrer. Je lui ai recommandé d’être accompagné par un escadron, mais il m’a assuré que cela entraverait le bon déroulement du dialogue avec ces maudites créatures.

Il crache par terre à la mention des monstres détestables qui ont envahi leur monde. Il fait signe aux autres de garder le silence. Puis il ajoute à voix basse et avec mépris.

• Les démons ne sont pas aussi bien organisés que nous. Même si certains d'entre eux ont accepté de s’entretenir pacifiquement, une attaque de leur armée est probable. Restez aux aguets.

Continuant le trajet en silence, les chevaliers ne se doutent pas qu’un individu supplémentaire a rejoint le groupe en secret depuis le départ du château.

L’intérieur du carrosse est peu éclairé, d’épais rideaux blancs couvrent les fenêtres et un léger parfum fleuri flotte dans l’air. Le prince discute calmement avec l’intruse assise sur un siège confortable. Devant lui, la jeune fille au physique très similaire au sien se mord nerveusement les ongles. Elle est habillée d’une robe bleue. Son cou est entouré d’un châle vermillon qu’elle porte comme un foulard lui tombant des épaules jusqu’aux hanches. Ses iris sont d’un vert scintillant et son visage pâle est identique à celui du prince. Il en va de même pour la couleur de leurs cheveux blonds polaires, courts pour le frère, mais s’allongeant dans le dos pour la sœur.

Prenant note du comportement nerveux de sa jumelle, le prince maintient une attitude confiante et relaxée en dépit de son propre malaise. Il ne l’a pas invitée à le suivre dans cet environnement dangereux, mais il est tout de même heureux d’être en sa compagnie. Habillé d’un costume de style militaire, mais conservant une allure élégante, le garçon a pris la responsabilité monumentale de se mesurer aux diplomates de l’empire démoniaque. N’importe qui serait paralysé par l’angoisse et refuserait une telle tâche, mais pas lui. C’est bien pour cette raison que malgré son jeune âge, il a choisi d’endosser ce rôle.

Le prince attrape la main de sa sœura afin de la rassurer.

• Il ne faut pas t'inquiéter, Vivi. Tout va bien se passer. Nos messagers sont revenus sans problème. Il n’y a aucune raison de croire que ce sera différent pour nous. Au contraire, réjouis-toi car nous allons faire le premier pas vers la fin de cette guerre ignoble !

S'efforçant à sourire, la princesse inspire profondément pour reprendre son calme. Elle n’avait pas l’intention de causer de problèmes en s'immisçant dans cette affaire. Elle ne peut pas s’empêcher d’être tendue en engageant le dialogue d’une articulation bredouillante.

• Je sais qu’ils ne sont pas tous méchants. Enfin, je ne sais pas, mais Nil, si tu as confiance en eux, alors moi aussi et je veux t’aider !

Le prince sourit en considérant l’offre.

• De toute façon, tu ne m'as pas vraiment laissé le choix. Tu t’es caché dans le carrosse juste avant notre départ, quelle idée saugrenue ! Père serait blafard s’il l'apprenait.

Les poings serrés et les yeux humides, la princesse défend ses actions en haussant la voix.

• Moi aussi j’en ai marre de cette guerre ! Tout le monde a peur, même dans le château. Ils disent que ça ne finira que quand les humains ou les démons seront anéantis. Père dit pareil.
• Et toi, comment penses-tu que la guerre se terminera ?

Vivi reste silencieuse un moment. Elle a déjà réfléchi à cette question, mais y répondre reste difficile. Avec une confiance vacillante, elle s’exclame.

• Je pense que c’est toi qui as raison. Ils ont déjà accepté de négocier. Ils font preuve de bonne volonté. Sans doute qu’eux aussi espèrent que nous arrivions à un arrangement et qu’un jour nous n’aurons plus à craindre de perdre les gens qu’on aime.
• Merci d’y croire, Vivi. Avec ton aide, je suis certain qu’on peut y arriver.

Ravie de la réaction positive de son frère, la princesse affiche un sourire radieux et se met à balancer les jambes avec énergie. C’est durant ces moments que Nil réalise que malgré les problèmes auxquels le royaume fait face, il peut toujours compter sur sa sœur. Incluant cet instant historique alors que le carrosse s’arrête.

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Notes de l'auteur :

- Présentation de Nil et Vivi, les protagonistes. Ils ont peut-être besoin de plus de personnalité dès le début pour bien les établir.

- Exposition de l'objectif à atteindre : La fin de la guerre entre les humains et les démons.

- Leadership douteux : Les décisions du prince sont contestables. À quoi pense-t-il ? C'est en partie le thème pour le chapitre 1.