L'audace de l'oisillion

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Je décrochai mon portable à la troisième sonnerie. J’avais la voix éteinte, triste de ne pas avoir eu de nouvelles de Gabrielle. Ma directrice était partie en voyage d’affaire à la capitale sans prévenir personne. Toute l’équipe avait été surprise mais moi, je savais l’origine de cette fuite improvisée. Je crispai la mâchoire de frustration. Finalement, hommes, femmes, on était égaux dans l’indifférence qu’on donnait à nos amants d’un soir.

- Sacha Line, rédactrice adjointe du Photograph Art Magazine, j’écoute.

- Bonjour Sacha ! C’est moi, Lou !

Entendre la voix de la photographe me remit de bonne humeur. Je me rappelai en pouffant le shooting photo audacieux qui m’avait conduit à coucher avec Fred de l’accueil. Mais ce souvenir s’accompagna de la vision amère du beau visage de Gabrielle juste après notre baiser si fugace et pourtant si fort. Chassant mentalement cette image, je me concentrai sur la conversation en cours.

- Voilà, j’ai un nouveau projet et j’aimerai que tu y participes. Je n’arrête pas de penser à tes seins et comment tes courbes harmonieuses ressortaient parfaitement en noir et blanc.

Je m’étouffai à ses paroles. Je savais Lou très cash, mais je n’étais pas encore habituée à ce qu’elle parle aussi facilement de mon anatomie.

- Donc, en gros, c’est une série de nus, tu t’en doutes bien et j’aimerai que le shooting se fasse dans vos locaux, dans ton bureau si possible. Tu penses que ce serait faisable ? Le thème serait « les femmes aux pouvoirs ». J’ai envie de photographier une femme charismatique, qui en impose et montrer qu’on peut avoir un corps hyper sexualisé mais avoir tout de même une légitimité à la tête d’une grande entreprise. Et pour ça, Sacha, tu serais parfaite avec ta petite bouille d’ange.

- Euh... très bien. Je suis partante.

- Parfait ! Olala, je suis toute excitée ! Bon je te laisse, Marko vient d’arriver.

Elle raccrocha sans un mot de plus. Je me doutais bien de ce que ces deux là allaient faire et une pointe de jalousie me pinça le cœur. Et moi, j’en étais où sentimentalement parlant ? Je me faisais enculée par un collègue et je tombais amoureuse de ma patronne, nan mais le grand n’importe quoi ! Je m’arrêtai un instant. Amoureuse ? J’avais utilisé le mot interdit sans même m’en rendre compte. Comment pouvais-je être amoureuse d’une égoïste pareille ? Qu’elle s’amuse avec son toutou de Fred, moi j’allais vivre ma vie d’hétéro, sans plus me laisser séduire par ces fantasmes sans lendemain. Mon téléphone sonna à nouveau et sur les nerfs, je décrochai d’une voix sèche.

- Oui, quoi ? Sacha Line, j’écoute.

- Et bien ma colombe, c’est comme ça qu’on me salue ?

Cette voix sensuelle aux sonorités hispaniques me transporta sous la chaleur de l’Andalousie. J’oubliai instantanément ma rancœur et me fit douce comme une agnelle.

- Pardon Madame Ticaz, euh … Gabrielle.

- J’aime quand vous prononcez mon nom, ma petite Sacha. Mais nous n’avons pas le temps pour ces bêtises alors prenez votre carnet et notez.

Le retour au vouvoiement me pris de court. Il y a de ça à peine deux jours, cette femme m’appelait par des noms dégradants, caressant mon corps de milles façons différentes et maintenant on était de retour aux formalités froides ? J’en étais écœurée. Je l’écoutais sans enthousiasme me lister toutes les tâches urgentes que je devais faire à sa place et quand vint le temps de raccrocher, j’eus presque envie de le faire sans un aurevoir.

- Voilà, vous me faites ça pour lundi en huit. J’espère vous revoir très rapidement, Sacha.

En insistant sur ce mot, elle me fit presque lui pardonner son comportement de goujat mais je répondis sobrement et raccrochai sans plus attendre. J’étais énervée et une idée germait doucement dans mon esprit. Ni une, ni deux j’appelai Lou mais sans succès. Je patientai une dizaine de minutes et tentai de nouveau. Elle décrocha enfin, et je sus au son de sa voix qu’elle était occupée. Je pouvais presque entendre le rythme des pénétrations de Marko à la façon qu’elle avait de saccader ses phrases. Nullement surprise ni gênée, je lui exposais mon plan. Elle exprima son enthousiasme un peu trop bruyamment à mon goût en hurlant à mon génie, et laissa tomber le téléphone à en croire le bruit mat qui précéda la fin de l’appel. Il était à peine midi et la journée promettait d’être chargée.

Lou Frelet arriva aux alentours de neuf heures du soir. Son chemisier légèrement transparent laissait deviner sa poitrine menue et son jean brut boyfriend mettait parfaitement en valeur la courbe de ses fesses. Je m’extasiai encore une fois sur cette magnifique chute de reins puis, reprenant mes esprits, je lui montrai le chemin du bureau de la directrice.

- Tu es sûre qu’elle est d’accord hein ?

Bien entendu, Gabrielle n’était au courant de rien, mais Lou ne devait pas le savoir. Je la fis entrer dans la pièce si familière, presque déçue de la trouvée vide. Tout le monde était rentré, même Fred. Lou pris place dans le canapé de cuir et je m’assis sur le fauteuil derrière le bureau.

- Bon, si j’ai bien compris, tu incarnes la femme de pouvoir et on utilise le bureau de ta patronne pour faire plus réaliste. Ton bureau de rédactrice adjointe est si pourri que ça ?

Je ris pour cacher mon jeu. L’unique raison de notre présence ici était ma vengeance. Je préparai à Mme Gabrielle Ticaz une petite surprise qui sera, sans nul doute, à son goût. Je positionnai la webcam en direction du sofa, vérifiant sur l’écran que l’angle était bon et je la rejoignis sur le canapé.

- Lou ? Je peux te demander quelque chose ?

La jeune femme acquiesça sans hésitation et ses pommettes arrondies soulevèrent son grain de beauté dans un sourire.

- J’aimerais que tu sois aussi nue pour le shooting.

Un ange passa. J’attendais la réaction de ma nouvelle amie et j’espérais ne pas m’être trompée sur sa future réponse.

- Tu veux que je sois nue pour te sentir plus à l’aise, c’est ça ? Pas de problème ! Tu aurais quand même pu me prévenir, j’aurais choisi de plus jolis sous-vêtements !

- Arrête de me charrier, tu portes même pas de soutif !

Elle éclata de rire en enlevant sa chemise, dévoilant des petits seins fermes sur un torse musclé au ventre plat. Elle avait désormais les cheveux tout ébouriffés ce qui la rendait encore plus mignonne. Elle ôta son jean aussi rapidement que le haut et sautilla d’impatience, ce qui fit rebondir la chair de ses fesses, habillées d’une culotte de coton simple. C’était une vraie beauté, solaire et naturelle. Perdue dans mes pensées, j’en oubliai d’enlever mes propres habits. Elle me rappela à l’ordre en riant de plus belle, m’accusant de vouloir simplement la mater.

Quand je fus moi aussi nue, l’ambiance de la pièce changea quelque peu. J’eu l’impression que le regard de Lou sur mon corps était différent de celui de la photographe habituelle. Elle se racla la gorge et la magie du moment se dissipa.

- Alors, on va commencer par une photo où tu es sur le fauteuil, jambes croisées sur la table. Garde bien tes escarpins.

Je m’exécutai. Le cuir du siège était chaud et je me laissai prendre au jeu, comme lors du dernier shooting, obéissant aux requêtes de l’artiste. Après deux heures, j’étais épuisée. Lou s’affala sur le sofa et je la rejoignis, ne portant toujours que mes escarpins.

- Tu as un sacré talent Sacha. Je suis impressionnée.

Je rougis au compliment et elle me caressa la joue tendrement. Ce geste me fit monter les larmes aux yeux et de but en blanc, je lui dévoilai toute l’histoire. Gabrielle, Fred, tout. Elle m’écouta avec attention et quand vint la fin de mon récit, elle ne sut que dire. Elle me prit alors dans ses bras et me caressa la nuque de sa main douce. Cette étreinte était si spontanée, qu’on en avait toute deux oublié notre nudité. Je sentais mes seins pressés contre ses petits tétons, son souffle à mon oreille, la chaleur de sa paume sur mon cou. C’était si différent que lorsque Gabrielle me touchait et pourtant, j’en ressentais un immense plaisir mêlé de bien-être et de sérénité.

Je mis fin à notre câlin et d’un geste lent, j’ôtai ses grosses lunettes. Je découvris de magnifiques yeux mutins d’un vert-bleu peu commun. Sans plus attendre, je pressai mes lèvres contre les siennes. Elle me rendit mon baiser avec passion. Nos langues s’entrelaçaient avec délice, voraces, affamées. J’attrapai ses fesses à pleines mains et la souleva pour l’assoir sur mes genoux. Ainsi à califourchon, je découvris son sexe rose ouvert et humide. Encore innocente, je tentais une caresse timide. Elle gémit et je trouvai rapidement son bouton durci. J’entamai des mouvements circulaires, observant ses réactions. Chacun de ses petits gémissements étaient à croquer et elle mouillait abondamment sur mes doigts. Je lui mordis les seins un peu fort, lui arrachant un cri et de mon autre main, lui enfonça mon pouce par derrière. Rendue folle par cette pénétration, elle fut prise de spasmes de plaisir et en se mordant les lèvres, elle jouit en me regardant dans les yeux. Essoufflée, elle s’agrippa plus fortement à mes épaules et vint nicher ses mèches blondes dans le creux de mon cou. Elle resta ainsi un long moment, reprenant son souffle. Puis, elle m’embrassa avec fougue, quitta mon étreinte et sortit en trombe, ses vêtements roulés en boule dans ses bras, sans un mot.

Mon histoire de vengeance, Gabrielle, la soumission sans sentiment, tout semblait sans importance maintenant. Je pensais maintenant qu’aux yeux malicieux de Lou, révulsés par le plaisir sous ses cils blonds. Son regard triste quand elle avait mis fin à notre baiser. Je me rhabillai lentement et quittai le bureau, laissant allumée la webcam vengeresse dont j’avais totalement oublié l’existence.

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