Bazilus, le marchand du quartier des Trois Fèves, brayait et meuglait alternativement, en entrechoquant son bidon rempli de gnôle sur les fesses de sa paie. L’arrière boutique avait des arrières goûts de dégorgeoir à limande. Elle gardait ses lèvres collées sur une table poisseuse qui puait l’œuf pourri, les yeux grands ouverts, le visage neutre. Son bassin tressaillait aux rythmes des coups portés par le Démon à tête de bélier qui vagissait avec extase, la langue pendante, les joues bien rouges et les paluches bien cramponnées. La table tremblait à rythme régulier ; un radis noir et une racine de gingembre tombèrent au sol. Elle attendait, passive, que son paiement soit accepté par le marchand. Juste une banale affaire à régler pour une Subsculia sans âmes à échanger. La routine. Avec le temps, elle avait appris à ignorer ses émotions et ses pensées vagabondes. Oui, ses pensées… Ses pensées ignoraient cette chose qui s’enlisait en elle. Cependant, aujourd’hui la routine avait une sensation nouvelle. La routine avait un but différent que celui de survivre. Aujourd’hui, elle devait le faire pour Malakh.

Et c’était là tout le dilemme qui lui torturait l’esprit un peu plus à chaque intrusion.

Elle les comptait. Elle savait, qu’en moyenne, environ quatre cents suffisaient. Mais ce gros joufflu semblait mieux résister que les autres.

Cela n’a rien d’une trahison… 325… Non… Cela n’a rien d’une trahison… 326… Je ne le trahis pas… Non… 327… Cela n’a rien d’une trahison… 328… 329…

Elle n’utilisait aucun de ses pouvoirs de Subsculia. Elle n’était qu’une belle tranche de viande immobile, offerte pour payer le marchand qui se ruait sur son dos.

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