Chapitre 24 :

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Ils nous font sortir. L’homme aux dreadlocks ne fait rien, je l’ai un peu trop amoché. Il s’éloigne autre part. Une sorte de village se dresse devant nous. Ce sont des maisons en bois basiques, des personnes jardinent, d’autres reviennent avec des gibiers. Je vois un chien à deux têtes, un chat à six pattes, un humain à quatre bras même. Je me demande si je ne suis pas dans un rêve mais tout cela paraît bien réel. C’est… totalement différent des bunkers. Philippe est porté précautionneusement par le chauve mais éloigné de nous. Gérard tente de protester, mais c’est une mauvaise idée. Césars nous enferme dans un bâtiment vaste. Il y a des mottes de foins, le sol est la terre marron qui s’effrite lorsqu’on la prend dans les bâtiments. Les habitants de la surface doivent avoir un problème avec la luminosité car on est presque plongé dans le noir. Gérard commence à s’énerver et tape contre le portail.

Cela ne sert à rien ! Ils sont beaucoup plus nombreux que nous, on ne peut pas risquer de se faire tuer avant l’heure, arrête Nathanaël en hurlant.

Tu n’as qu’à provoquer une faille pour les faire flipper, propose Gérard.

C’est vrai que cela pourrait les distraire…

Philippe ne sera pas en état de fuir, lâché-je.

Je ne veux pas les désespérer mais malheureusement c’est la triste vérité. Puis, je ne pense pas que Gérard soit prêt à abandonner son ami dans cet état-là. Pas après tout cela.

Il pensait qu’ils te tueraient, Philippe et toi, continué-je dans un calme que je ne trouve pas très approprié. Ils voulaient tuer Nat. Mais je pense qu’ils veulent qu’il travaille pour eux.

Et toi ? s’inquiète le jeune homme en s’approchant.

Je crois… qu’ils attendent de moi que je fasse comme les géniteurs.

Je crache ses mots que je déteste. Je me demande souvent pourquoi cela me dégoûte autant. Au début, j’ai toujours pensé que c’était parce que ce n’est pas fait pour moi et que rien que d’imaginer cela ça me donne envie de vomir. Cette partie-là est juste, mais je me rends compte aussi que cela ne me plaît pas car cela se rattache irrémédiablement à ma mère. Et on ne peut pas dire que ce soit le grand amour entre nous. Nathanaël sent mon malaise. Il encadre mon visage de ses mains et je le regarde dans les yeux.

On ne laissera pas faire cela, je te le promets, assure-t-il énervé. Je pourrais les déstabiliser en faisant une faille, mais cela ne règle pas le problème de Philippe.

Je peux vous aider.

Je sursaute. Je reconnais la voix de Césars mais il débarque de l’autre bout du bâtiment. Je ne suis pas rassurée. Néanmoins, avec Nathanaël, on se dresse devant Gérard car on peut le défendre. J’ai fait mal au chauve, Nathanaël pourrait le faire chuter dans les entrailles de la terre jusqu’à sa mort. Mais lui aussi est dangereux. Est-ce que je tente une nouvelle intrusion dans l’esprit de quelqu’un et risquer deux crises en une journée ? Gérard et Nathanaël ont besoin de moi. À la place, je sors le bijou que le prisonnier m’a donné et lui tend. Il se décompose en le prenant et finit en pleurs à genoux. Ce n’est pas vraiment la réaction que j’attendais. Je regarde mes compères, gênée, puis je me baisse à sa hauteur sans un mot. Que pourrais-je dire ? Absolument rien.

C’était à moi, et mon père a dû le ramasser avant de se faire attraper, murmure-t-il en serrant l’objet encore plus fort.

Il est mort, annonce Gérard.

Il me soulage de cette partie. Je ne connais pas Césars, et je ne l’apprécie pas mais ce n’est pas évident de se pointer et dire « oh ! En faites, ton père est mort il y a quelques semaines ! ». Il ne nous explique rien, mais le puzzle s’assemble petit à petit dans ma tête. Il a parlé de prisonnier. Son père a été attrapé par des membres des bunkers sûrement spécialisés pour attaquer les habitants de la surface. Les hauts-dirigeants font des expériences sur les descendants des survivants. Des survivants qui n’ont pas eu la chance d’atterrir dans les bunkers et qui ont dû survivre avec le reste des ressources disponibles avant qu’elles se régénèrent. L’homme décédé qui est le père de Césars, Césars et ses alliés : ce sont des descendants de ses survivants. Je ne sais pas pourquoi les gens du bunker font des expérimentations sur eux. C’est injuste et incompréhensible. Mais ils ont sûrement une idée en tête.

Césars redresse la tête, ses yeux clairs sont brillants et je pince la lèvre. Non, je ne peux pas le prendre dans mes bras. Ce n’est pas mon ami, je n’ai pas à le réconforter. Peut-être s’il nous aide comme il vient de le prétendre, mais je ne peux pas me permettre d’être sympathique.

Qui êtes-vous réellement ? Il faut venir des personnes qui ont survécu à la surface pour obtenir des capacités. Vous ne venez pas des bunkers, affirme-t-il en se relevant lentement.

Si, on vient des bunkers, commencé-je en me redressant. On ne sait pas pourquoi on a cela et on ne sait pas non plus les maîtriser. On est dans le flou.

On nous a injecté quelque chose, ajoute Nathanaël qui me rejoint.

Césars soupire, il vérifie si personne n’arrive et s’appuie contre le portail. Il ne paraît pas très emballé à l’idée de nous expliquer, néanmoins il le fait quand même. Il explique donc qu’après l’apocalypse, l’homme tel qu’on le connaît s’est mis à changer. Certains naissent avec des capacités, d’autres sans parties du corps mais avec des capacités pouvant remplacer ses pertes, mais l’humain a changé. Peut-être que les savants en cherchent les raisons de cette évolution, mais mon instinct me pousse à croire que ce n’est pas le cas et qu’il y a autre chose. Peut-être que je me trompe aussi… Césars aurait pu être plus méchant avec nous puisqu’il sait qu’on vient de l’endroit où son père est décédé, mais il nous ramène à manger.

Je n’ai pas une grande place dans notre société pour influencer votre destin… mais je vais essayer de ne pas vous envoyer vers la mort, déclare-t-il.

Et… connais-tu des gens qui… qui pourraient contrôler le sol ou avoir une sorte de télépathie ? risque Nathanaël alors qu’on lui lance un regard noir avec Gérard.

Césars éclate de rire en voyant nos têtes mais reprend un air sérieux. Il ralentit les moments de Gérard avec un regard espiègle puis se tourne vers Nathanaël qui attend une réponse, inflexible.

Je devine bien pourquoi tu demandes cela. Des personnes ont la même capacité mais pas forcément à la même échelle. Puis, si vous venez de les découvrir, vous ne pouvez pas encore juger d’où elle se situe sur l’échelle. Fissurer le sol te pose-t-il autant de problèmes que cela ? dit Césars en croisant les bras, un peu méfiant quand même.

Ce n’est pas pour moi que je demande cela mais pour Constance, hasarde l’ancien occupant de l’asile en posant son regard sur le sol comme s’il a l’envie d’explorer un peu ses fils qui s’étendent sous ses pieds.

Césars met du temps à comprendre que Nathanaël parle de moi. Il ne connaît pas nos prénoms, on ne les lui a pas dits. Ensuite, il s’approche de moi.

Les crises arrivent très souvent chez les personnes qui ont la même capacité que toi. Mais la tienne a l’air plus… brouillon on va dire, explique-t-il avant de poser deux doigts sur ma tempe. Les gens se raccrochent à un objet ou une personne importante pour calmer la crise. Il y a un point d’accroche, souvent marquant dans la vie.

Et le sien, c’est Damien, élude Gérard avec surprise.

La crise peut se calmer d’elle-même mais après un très long moment. Il est préférable de garder son accroche près de soi sauf si tu trouves un moyen alternatif.

Et savez-vous ce qui est arrivé à Philippe ? se renseigne Gérard.

Il n’a pas reçu de coup. Une personne morte qui a la même capacité que Constance a dû « débrancher » son esprit, informe Césars.

Il me propose de me faire introduire là où il est pour tenter quelque chose, mais même si je peux faire quelque chose, je ne sais pas si j’en suis capable. Je ne maîtrise rien. Pourtant, il semble penser que je peux peut-être le faire. Je ne le contredis pas et il compte organiser cela. Il s’en va et je m’assois sur une motte de foin.

Je ne sais pas si je peux le sauver… je ne comprends pas comment tout cela fonctionne, soupiré-je la tête baissée.

Gérard s’approche, je le reconnais à ses pas. Il s’agenouille en face de moi et je relève la tête. Je voudrais m’excuser pour Philippe, lui dire que quelqu’un pourrait le… réparer. Mais je n’en ai pas la certitude, donc je n’ai pas le courage de lui dire cela.

Je ne l’ai pas promis à Grégoire… mais je te ramènerais vivante à lui.

Cela fait bizarre d’entendre parler de mon père avec ce prénom. Mais je suppose que je vais devoir m’habituer.

On est incapable de dormir même si les heures sont longues. On organise plusieurs plans pour s’échapper mais on ne peut inclure Philippe dedans. Je m’endors un peu, les garçons aussi car lorsque je me réveille ils ne sont pas conscients. La faim commence à se faire savoir mais ils nous ont pris toutes nourritures. On attend. Césars apparaît et nous donne… je ne sais pas ce que sais. Il dit que c’est du poisson… on n’en avait pas dans les bunkers. Puis il me fait signe de venir. C’est le moment.

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