Une haine de fer
La haine est un sentiment puissant, incontrôlable, récurrent, malfaisant. Une fois qu'elle vous a frôlé, elle vous tient dans ses filets de folie meurtrière. Il est impossible de s'en débarrasser, elle reste toujours là, cachée quelque part, dans les abysses les plus noires de votre âme, là où tous vos secrets les plus sombres sont enfermés et ignorés. Mais elle finit toujours par refaire surface avec votre plus mauvais caractère, et insidieusement envenime votre esprit pour le forcer à haïr, haïr profondément, dangereusement.
C'est ainsi qu’imperceptiblement, une rage sombre s'était aggripée à moi, le début de la haine, le frôlement qui fera dériver mes pensées, le commencement d'une histoire haineuse.
Tout commença avec une fille, une amie, nous étions proches, je l’appréciais beaucoup, c'était comme une soeur pour moi, pour elle je n'étais qu'une simple copine. Mais je ne l'appris que plus tard, beaucoup plus tard, trop tard. Durant quelques mois notre amitié perdura, mais je sentais au fil des jours qu'elle commençait à me rejeter. Rien de méchant, juste de l'éloignement. Je ne voulais pas la laisser partir, je m'accrochais, elle n'allait pas me laisser tomber comme ça, ce n'était pas possible. Puis un jour elle est partie, elle m'a laissée tomber. Aucune de ses explications n'avait de sens à mes yeux, elle fuyait, simplement et elle n'était même pas capable de l'admettre.
J'ai beaucoup pleuré après ça, elle m'avait blessée, violemment. La tristesse fut la première étape de mon ascension jusqu'à la haine. Ne supportant pas mes propres larmes, la tristesse se transforma vite en colère. Une colère maîtrisée, ma plaie n'était qu'au début de sa guérison, il me fallait un moyen de me défendre le temps de cicatriser.
Le temps avait repris son cours, je m'étais fait d'autres amis, je m'y suis moins attachée évidemment, je n'avais pas oublié la cicatrice qui ornait mon cœur.
Et un jour, elle revint tout gâcher. Ce n'était peut être pas sa faute, mais elle avait rouvert la plaie à peine refermée, c'est là que la rage remplaça la colère, une rage qui ne se contrôlait pas, celle qui précédait la haine, celle qui l'invitait à entrer les portes grandes ouvertes.
La rage faisant battre mon cœur rapidement, les mots s’échappant facilement, ma rage devint contagieuse. Les gens commencèrent à m'écouter et à me suivre, faisant augmenter ma certitude d'avoir raison, que le problème ne venait pas de moi. Des regards noirs lui étaient lancés régulièrement, des mots circulaient de la même manière que ma rage conduite par mes maux s'était éparpillée dans l'esprit des gens. Les bousculades devinrent fréquentes et sa solitude augmentait, me procurant une certaine jouissance ainsi qu'une culpabilité dévorante.
Mais elle n'était pas encore vaincue, et me vola un de mes rares amis. Là, ce n'était plus possible, elle le faisait exprès, son but était de me détruire. La vue de leur rapprochement rapide finit par terminer mon ascension, la haine m'avait engloutie entière, j'en avais oublié ma culpabilité, je voyais rouge jusqu'au bout.
Entourée d'une aura noire de haine, je l'écrasais, la bouffais. Elle disparut et seulement quelques semaines plus tard, une fois que la haine était repartie se blottir dans mon cœur emportant avec elle toutes pensées destructrice et négative, je me rendis compte de ce que j'avais fait. Je vis la douleur dans les yeux de ses rares derniers amis, ainsi que dans ceux de celui qu'elle m'avait volé. Un trou béant, plus grand encore que celui que j'avais mis tant de temps à reboucher.
Sa mort sur la conscience, la haine cachée dans mon âme, celle qui m'avait servie à assouvir ma douleur, se retourna contre moi même, et perdue dans une spirale vicieuse, insidieuse et sans fin, la haine m'engloutit aussi vite que j'avais détruit leurs vies et finit par mourir avec moi.
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