Prologue
Je marche sur la route en trainant des pieds. Déjà treize ans, treize de vie, un de mort. On me le répète souvent; "essaye de sourire", "tu as l'air triste", "tourne la page"... Ces gens-là sont des abrutis. Ils parlent sans savoir et sermonnent sans comprendre. Je crache sur leur innocence et les envie tout autant. Je secoue doucement la tête et reprends mon errance, j'essaye de repousser mes pensées. Tu. As. Quatorze. Ans... mais elles reviennent aussitôt, elle avait quatorze ans . Chaque chose est un chemin menant à eux. À la personne que j'étais, à la personne que je suis devenu.
Un passant regarde sa montre et me bouscule, il balbutie un vague pardon et marche d'un pas pressé, le regard sautillant de son poignet au chemin, le regard nerveux. Je souris tristement. Avant, moi aussi, je regardais les heures, les minutes. Je voulais que le temps s'accélère, qu'il ralentisse, qu'il s'arrête. Maintenant, je regarde le tressautement de l'aiguille avec ennui, et ma vie s'écoulant devant moi ne provoque que mon indifférence. Mon temps passe mais je suis déjà passé. Trois horloges ont explosés, la mienne ne s'en est jamais remit. Les secondes sont marquées, les minutes comptées par un corps inanimé. La différence entre un humain vivant et un humain mort est que le premier a toujours une trace d'ambition alors que le second n'a rien. Je me considère comme enterré. J'ai perdu mon âme le jour où ils ont perdus la vie. Je ne suis pas un mort-vivant mais un vivant-mort.
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