Cela est, en effet, frappant : les abeilles, dans cette fable, sont semblables en tout point aux hommes. Elles ont une société complexe, des castes sociales, une hiérarchie, elles font la guerre, ont une religion… Les hommes ne seraient-ils alors que des animaux comme les autres, ne serait-il pas cet « animal social » qu’a décrit Aristote ? La réponse est ici négative car il ne faut pas oublier une chose : La fable des Abeilles est ce qu’elle est, c’est-à dire une fable, et, bien que les abeilles ont une hiérarchie complexe où chacun a sa place, ce sont bien des hommes dont parle Mandeville, comme le ferait La Fontaine.

 Toutefois, cela questionne grandement les conséquences de la vie en société et de la Culture. Celles-ci sont surtout questionnées dans le texte complémentaire à la fable. Ainsi, dans Recherche sur l’origine de la vertu, Bernard de Mandeville s’interroge sur comment l’homme arrive à vivre en société, ce dernier étant « le seul Être que l'on puisse jamais civiliser » à condition d’exploiter sa faiblesse : son orgueil et son amour propre, d’où la naissance de la Culture et, ainsi, de la vertu et donc du vice.

 C’est ainsi une satire cynique et un modèle de ce qui deviendra le libéralisme que nous donne Bernard de Mandeville à travers sa fable dystopique. Mais elle ne fut pas la seule œuvre anglaise du XVIIIème siècle à être satirique, contre-utopique voire dystopique.

 En effet, une autre œuvre majeure est un roman dont la popularité n’est plus à prouver aujourd’hui ; elle est un roman écrite par l’anglo-irlandais Jonathan Swift ; et cette œuvre parle des aventures d’un certain Lemuel Gulliver.