Chapitre 41
Ecrit en écoutant notamment : Timo Maas - Die Herdplatte [HardTrance]
Après que nous avons finalement passé la quasi-totalité du trajet à parler de sport, la mère de Renan se montre plus curieuse quant à mes origines, et je lui parle un moment de ma région sous ses yeux attentifs, presque envieux. Vu le nombre de kilomètres que j’ai parcourus à pied dans les sentiers des hauteurs d’Aubenas, et ceux réalisés sur les petites départementales du coin à vélo, je ne risque pas de tomber à court de détails plus ou moins intéressants concernant le paysage de ma région !
Alors que j’étais en train de me dire que j’évitais pour l’instant les questions sur ma vie affective, elle me demande soudainement :
— Du coup, si j’ai bien compris, tes parents sont aussi très cools avec toi par rapport à ta relation avec notre Renan ?
Je comprends que mon copain lui a sûrement parlé de nos quelques jours en Provence – enfin seulement la partie racontable bien sûr !
— Ah… oui, c’est vrai !
— Tu veux savoir comment on a su tous les deux que notre fils aimait les garçons ? reprend-elle en essayant de masquer un franc sourire.
— Oh oui, je te laisse raconter, tu le fais super bien ! s’écrie son mari.
Pour ma part, je réplique, fronçant les sourcils :
— Mais il vous avait juste présenté son copain de l’époque, quand il était en Terminale, non ?
Elle semble de plus en plus radieuse :
— Ahah ! C’est la version officielle, ça ! Mais vu que notre Renan est évidemment trop fier de lui pour te l’avoir dit, c’est moi qui vais le faire !
Bon, si elle tient tellement à me le raconter, c’est que ça doit être plus cocasse qu’un simple historique qu’il a oublié d’effacer !
— Alors c’était il y a quatre ans, nous étions partis à Anglet, dans les Pyrénées-Atlantiques, avec lui et son frère. Les deux cocos voulaient apprendre à faire du surf, enfin ce n’est pas le plus important, mais j’aime bien rajouter du contexte ! Le dimanche matin, donc le lendemain de notre arrivée, comme il était déjà impatient d’aller voir à la plage s’il y avait de belles vagues, je lui ai proposé d’aller acheter du pain en même temps. Il en est revenu trois quarts d’heures plus tard ravi, en agitant en même temps l’édition du jour de l’Équipe, sachant que ça allait aussi plaire à son père. Jusque-là, rien d’anormal ! Sauf qu’il n’a pas été très malin de laisser traîner le ticket de caisse du vendeur de journaux sur la table du salon. Je t’avoue que j’ai été un peu surprise quand j’ai vu la ligne ‘Têtu’ en dessous de celle du magazine sportif ! Même si c’est assez révélateur, je n’étais pas sûre à cent pourcents non plus ! J’ai néanmoins commencé à faire plus attention, et c’est rapidement devenu évident qu’il portait un intérêt certain aux beaux représentants de la gente masculine, au détriment des belles filles qui lui passaient parfois sous les yeux sans qu’il ne lève un sourcil. Bien évidemment, je n’ai pas voulu me montrer trop intrusive, alors je me suis dit que s’il ne me le disait pas avant, je ne le lui demanderais en tête à tête seulement lorsqu’il aurait au moins dix-huit ans. Comme tu le sais, je n’ai pas dû attendre trop longtemps, et ce qui m’a le plus frappé quand il m’a expliqué qu’il sortait avec ce garçon, c’est la maturité et le contrôle qu’il dégageait. C’est ça qui m’a définitivement convaincue que son orientation ne serait jamais un souci, ni pour lui, ni pour nous. Et ce n’est que quelques mois plus tard, lors d’un repas de famille, que j’ai sorti mon anecdote ! conclue-t-elle en rigolant.
Je ris intérieurement du fait que Renan ne m’en ait jamais parlé, mais comme j’aurais sûrement agi à l’identique dans sa situation, je ne peux certainement pas lui en vouloir !
Ses parents m’indiquent ensuite que leurs obligations professionnelles en ce samedi les obligent à me laisser seuls, mais ils m’ordonnent néanmoins de faire comme chez moi, le temps que Renan arrive. Heureusement, vu l’heure qu’il est, je n'aurai pas à me tourner les pouces trop longtemps, et j'en profite seulement pour vérifier si j’ai des nouvelles de Mila concernant Laszlo, ce qui n’est pas encore le cas.
Je frissonne de plaisir en entendant la porte d’entrée s’ouvrir, et cours étreindre mon amoureux sans retenue. Après avoir étanché ma soif de contact rapproché, je lui demande :
— Alors, quel est le programme de la journée ?
— Bah alors moi je pensais faire un tour en ville, et puis, en milieu d’après-midi, je pense que tu ne seras pas contre une petite sieste, non ?
— Ouais carrément, ça va être sympa !
Il ne fait certainement pas chaud, mais les larges éclaircies qui rayonnent sur la préfecture brétillienne suffisent largement à notre bonheur. Nous passons voir le parlement de Bretagne en centre-ville, magnifique édifice du dix-septième siècle, puis nous longeons la Vilaine sur un peu plus d’un kilomètre jusqu’au stade de foot de Rennes, le désormais dénommé ‘Roazhon Park’.
— Bon, ce soir Rennes se déplace à Strasbourg, mais on essayera quand même une fois de se faire un match ici.
— Ouais, bien sûr ! réponds-je, déjà conquis par la façade splendide du stade.
Nous retournons ensuite en centre-ville vers le parc du Thabor. Mis en confiance par la sérénité que dégage ce lieu coquettement entretenu, j’attrape la main de Renan sans m’en rendre compte au départ, et nous flânons à la recherche d’un banc libre.
Nous nous installons finalement sur une pelouse en léger dévers, et tandis que je m’allonge dans l’herbe rase, il s’installe perpendiculairement en laissant reposer sa tête sur ma taille, ce qui ne tarde pas à provoquer une violente réaction physiologique quelques centimètres plus bas ! Remarquant que quelques dizaines de mètres plus loin, un jeune couple de lycéens ne se prive pas pour s’embrasser langoureusement, je n’ai aucune gêne à me redresser et à m’allonger le long de Renan afin de faire de même. Mon petit ami, qui a le don de démarrer au quart de tour, commence déjà à vouloir vérifier à la main l’effet qu’il a sur moi, et jetant un rapide coup d’œil tout autour de moi pour vérifier que nous ne sommes pas observés, je le laisse poursuivre son opération, qui est par ailleurs des plus agréables.
Il se raidit pourtant soudainement, et se rassois à mes côtés à la vitesse de l'éclair. Je comprends son attitude lorsque je vois débarquer un employé du parc qui s’approche dangereusement de nous. Je deviens de plus en plus rouge à mesure que je comprends qu’il est effectivement bien décidé à venir nous voir.
— Alors les amoureux, comment se passe cette journée ?
— Très… bien… bredouille Renan à son encontre.
— Eh pas d’inquiétude, je viens juste vous rappeler que vous êtes dans un lieu à la vue du public, donc faudrait pas exagérer, hein ! Je vous rassure, vous n’êtes pas les seuls, mais ce n’est pas une raison ! termine-t-il le sourire aux lèvres.
— Oui… oui… on a compris, répondons-nous légèrement désemparés.
— Mais rien ne vous empêche de vous embrasser, je vous rassure sur ce point !
Il ôte sa casquette, nous faisant mieux remarquer qu’il n’est pas beaucoup plus âgé que nous, et se présente :
— Je m’appelle Aymeric, si vous avez le temps, ça vous dirait qu’on aille boire un coup à seize heures quand j’ai fini ma journée ?
Avec Renan, nous entamons une rapide négociation à base de haussements de sourcils et d’épaules, avant de donner notre accord.
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