Le Changement
Le soleil annonçait le midi sur Taanab et la circulation entre la ville et les zones agricoles extérieures était bien plus fluide qu'à l'accoutumé. Tharkan, Thrian et B-4, assis dans le landspeeder, regardaient au loin la route se rétrécir au fur et à mesure qu'ils s'écartaient de Pandath. Aux abords de la capitale, se trouvaient des champs et quelques pâtés de forêt ressemblant bien plus à de la jungle ; regorgeant de créatures sauvages en tout genre. Le trajet fut plus court dû à la vitesse de l'engin qui traversait la campagne à vive allure. Le véhicule métallique laissait derrière lui une traînée de sable se soulevant vers le ciel rose de midi et retombant sur les bordures métalliques servant à indiquer l'emplacement de la route. Le secteur où habitait la famille Vohsk n'était pas si peuplé, du moins, il y avait de nombreuses fermes dans les parages, mais les champs servaient à délimiter les résidences agricoles éloignant de fait les habitations. Une seule ligne de bus rejoignait la capitale et les quelques grandes villes alentour, mais les habitants de cette zone n'eurent pas le droit à l'implantation d'une ligne rapide de transport qui était réservée uniquement aux grandes agglomérations. La maison de Thrian était typique d'une architecture Taanabienne. Circulaire, regroupant quelques bâtisses en son sein, de sorte à ce que celle-ci forme presque un petit château vu de l'extérieur. Ces maisons avaient généralement un petit jardin à l'intérieur, héritage de l'architecture millénaire des anciens colons aristocrates qui avaient peuplé cette planète. Après une quinzaine minute de trajet, une fois sortie de l'axe principal, la ferme fut en vue et Thrian put voir sa mère sortir de la maison, celle-ci avait entendu le véhicule se rapprocher et venait à leur rencontre. Lorsque Tharkan eut enfin arrêté les moteurs, Lola qui avait aperçu le robot à l'arrière du landspeeder, serra les poings contre ses hanches et bascula de la tête vers la silhouette inconnue. L'ombre de métal sortit de la voiture portant dans ses mains les quelques affaires de Thrian, ce qui fit ricaner Tharkan qui avait remarqué l'air énervé qu'arborait sa femme, en fait, il savait très bien ce qu'elle pensait. Regardant son mari rire de la situation, elle lui envoya un regard cinglant et haussa la voix.
- "Au lieu de rire, tu peux m'expliquer pourquoi ce Droïde vous a suivi ?"
Tharkan fit taire immédiatement son petit ricanement, s'étranglant presque lorsqu'il entendit la remarque cinglante. Il leva les mains en signe d'apaisement regardant son fils qui s'était arrêté entendant le grondement sévère que venait de terminer sa mère. Le père de Thrian vint embrasser sa femme sur la joue et répondit.
- "Tu n'as qu'à demander à ton fils, voilà qu'il se met à faire des surprises. Essaye d'être reconnaissante tout de même bien que nous n'en ayons pas besoin."
Soufflant à cette réponse, le baisé qu'avait apposé Tharkan sur sa joue vint la calmer et elle s'approcha de son fils qui avait un air triste. Celui-ci voyait que sa création n'était pas aussi appréciée qu'il ne l'aurait voulu. Lola s'avança vers le jeune homme et, tout en déposant sa main sur son épaule, regarda des pieds à la tête le robot qui se tenait stoïquement face à elle.
- "Thrian, je pensais que nous avions été clairs, pas de droïde à la maison. Bon... je te remercie tout de même pour ta surprise, mais c'est la dernière d'accord ?" Thrian acquiesça et Lola vint se mettre devant le robot qui la regardait sagement et elle sourit. "Il a l'air tout de même en bon état. C'est quoi son nom ?"
- "B4-LD0" Répondit sans avertir le Droïde qui baissa la tête vers Lola, lui montrant ses yeux artificiels qui se mirent à clignoter.
Thrian, qui avait un peu perdu de son air déçu, fit les présentations et Lola finit par accepter qu'un nouveau membre se joigne à la petite famille. Celle qui fut la plus heureuse par cette arrivée fut Vilma, sautant de joie à la vue de B4. En effet, celle-ci détestait les travaux ménagers, et elle fut très ravie qu'une autre personne s'occupe de son débarras que représentait sa chambre. Cette situation fit bien rire Thrian, qui reçut de la part de sa sœur, un frottement de cheveux et un sourire plein de reconnaissance. La journée passa rapidement sur la petite ferme et un nouveau soleil se leva. Tharkan s'était levé tôt pour réparer les antennes et les câbles de communications reliant la bâtisse au commutateur principal se trouvant contre un pylône de 5 mètres de hauteur au beau milieu d'un champ. Pour les fermiers des environs, ces pylônes représentaient le seul moyen de recevoir les informations planétaires et galactiques chez eux. Mais des petites bêtes mangeaient régulièrement les câbles du grand poteau de fer, semblant attirées par l'énergie que l'installation demandait. Une fois que tout le monde fut à table pour le déjeuner, Tharkan activa la radio et se mit à écouter une chaîne de Pandath qui livrait les grandes informations annuelles.
Radio : ...Comme vous le savez peut-être déjà chers auditeurs, notre garant de la paix galactique, l'empereur Palpatine, récemment proclamé, a annoncé de nouvelles mesures que devraient suivre prochainement tous les secteurs sous contrôle impérial. Des projets de loi doivent être bientôt signés et rendus publics sur le changement d'anciennes lois républicaines toujours en vigueur. Le conseil impérial ainsi qu'avec l'accord du Sénat, envoie à chaque grande planète administrée, un gouverneur, qui devra suppléer la gouvernance déjà existante. Suite à la fin de la guerre, et à la recherche des traîtres Jedi, un détachement armé viendra suppléer la police planétaire de Taanab. Le Sénat a aussi voté en urgence, la nationalisation des grandes sociétés agricoles et un communiqué sur le projet des codes d'identifications impériaux vous sera délivré. Nous reviendrons vers vous pour la suite des opérations énoncées...
Thrian coupa la radio sous l'ordre de son père et tous se mirent à table. Ils commencèrent le dîner dans le plus grand des calmes. Lola regardait Tharkan d'un mauvais œil, elle n'avait jamais ressenti autant de peur dans l'homme qu'il était. Généralement, tous deux discutaient de leurs affaires au calme sans se prendre la tête tout en cherchant un plan pour se sortir des problèmes dans lesquelles l'univers avait décidé de les jeter. Aujourd'hui, Tharkan semblait bien désarçonné par ces annonces qui ne semblaient pas, de prime abord, mauvaises. Lola qui avait resservi Vilma semblant demandeuse après avoir englouti son assiette, regarda une nouvelle fois Tharkan qui n'avait presque pas touché au plat.
- "Tous ces changements n'ont pas à t'effrayer, s'ils ont décidé de nationaliser les entreprises agricoles, c'est bien pour une bonne raison." Dit Lola, tout en regardant son mari qui semblait perdu dans ses pensées.
- "La douane, les clones qui vont bientôt débarquer ici... Tout va être plus cher. De nouvelles taxes vont être levées, c'est ce que les commerçants m'ont dit. Et le prix sur l'essence qui ne fait qu'augmenter... À croire qu'il va falloir payer la moitié du prix pour voir nos provisions quitter cette fichue planète."
Lola fit un regard presque noir à Tharkan qui comprit immédiatement pourquoi celle-ci lui fit pareille remontrance alors qu'elle n'avait rien dit. Thrian lui aussi avait aperçu le regard de sa mère et ne comprit pas immédiatement ce qu'il se passait. Du moins, le jeune homme n'arrivait pas à réfléchir calmement, car sa sœur, se trouvant à côté de lui, n'arrêtait pas de gigoter tout en mangeant. Lorsque la discussion des deux parents fut terminée, Vilma prit la parole.
- "Apparemment, il va y avoir un nouveau centre de recrutement de sous-officier à Pandath, je pense y déposer mon dossier."
À la grande surprise de la table, Tharkan décida de quitter du regard son assiette, et déposa ses yeux sur sa fille qui ne comprit pas pourquoi son père était aussi surpris par cette proposition. Soufflant, comme s'il fallait que celui-ci se calme subitement, il lui répondit.
- "C'est hors de question Vilma, tu n'iras pas à l'armée. Il y a beaucoup trop de choses à faire ici pour le moment."
- Mais Papa ! Tous mes amis de l'école supérieure vont y aller et puis j'aurais un salaire pour aider la ferme.
Thrian ne comprenait pas le fait que la ferme ait des problèmes, à vrai dire son père et sa mère lui cachaient toujours les faits en rapport avec elle, ce qui le mettait parfois de mauvaise humeur. Il sentait que quelque chose n'allait pas et avec ce nouvel Empire, il comprenait que tout irait dans ce sens.
- Je ne sais pas Vilma, on verra avec le temps ; mais je ne pense pas que t'engager dans l'armée impériale est une bonne idée. Regarde... Les séparatistes vivent leurs derniers jours et on m'a dit que les nouvelles institutions militaires commençaient à recruter en masse. Ils auront suffisamment de militaires pour s'occuper d'apporter la paix partout où ils le voudront.
Vilma soupira longuement et son sourire disparu sur-le-champ montrant son mécontentement. Tout faisait croire qu'elle voulait vraiment aller au bout de cette discussion.
- Papa... Tu n'as pas écouté la radio ? L'Empereur offre du travail, il n'y a plus de guerre, ça, je l'ai compris ; donc tout ira bien. Je veux juste un poste avec des petites responsabilités et de l'argent à la clé pour vous aider. Je ne vois pas ce qu'il y a de mal ?!
Bien qu'elle terminât sa phrase, Thrkan semblait ne pas vouloir entendre et ne prit même pas la peine de répondre. Alors qu'ils terminaient leur repas, le bracelet du père se mit à clignoter et les deux parents se regardèrent comme s'ils savaient ce que cela voulait dire. Lola se leva et se tourna vers ses enfants.
- Montez dans vos chambres et restez-y. Vilma, nous aurons cette discussion ensemble demain. Tout le monde au lit, oust !
Ils montèrent sans broncher dans leurs chambres respectives et Thrian se mit sur son lit, mais il n'arrivait pas à trouver le sommeil. Regardant le plafond de sa chambre, il décida de se lever et marcha vers sa fenêtre. Se posant contre le bord de celle-ci, il se mit à écouter attentivement le chant silencieux de la nuit. Thrian observait les étoiles à l'horizon ainsi que les lumières des petites habitations perdues dans la campagne l'entourant. Un bruit venant du bas de la maison le réveilla de sa douce rêverie. Effectivement, deux minutes plus tard, il y avait quelques bruits dans la cuisine. Des personnes parlaient tout en chuchotant. Thrian décida de sortir de sa chambre sur la pointe des pieds et se mit à genoux dans l'escalier. Il perçut ses deux parents en train de parler avec un homme inconnu assis sur un tabouret face à la table serrant un objet dans ses mains. L'étranger portait une longue cape bleu marine à capuche et de longs traits blancs parcouraient celle-ci de part en part. La cape, empêchait l'adolescent dissimulé dans l'ombre de l'escalier, d'apercevoir le visage de celui-ci. Tout ce qu'il voyait, était un étrange vêtement que l'homme portait. Un mélange d'armures et de toiles.
- Il n'y a pas à s'en faire Tharkan, l'homme qui arrive est apparemment inexpérimenté, il n'y verra sûrement que du feu.
- Sûrement ?! Il ne doit surtout rien voir ! Si je ne fais pas cette transaction, ma ferme est perdue. Que va-t-il advenir de ma famille, comment pourrais-je leur avouer cela ? Tu as pensé à mes enfants ?
L'homme rangea l'objet qu'il avait entre ses mains dans une petite poche de son ceinturon, puis se mit contre le mur essayant de trouver une position confortable sur ce petit tabouret.
- Je vais faire de mon mieux, mais il est vrai que la douane ne va pas arranger grand-chose.
Sortant un petit appareil, Lola s'approcha de lui et déposa l'objet électronique devant l'inconnu.
- Combien avions-nous déjà dit pour la transaction ?
- Les armes sont vieilles et de piètres qualités, avec la quantité... Je dirais 125 000 crédits pas plus.
Tharkan s'avança et se posa contre la table regardant l'appareil et ce qui se trouvait inscrit dessus.
- Tu comptes me dire un jour pourquoi ils en demandent autant ?
Faisant un signe de tête sous sa capuche, l'homme termina de pianoter quelques écrits sur le petit appareil holographique. Il se leva et se plaça face au père de Thrian.
- Il ne vaut mieux pas savoir la situation de là-bas pour l'instant. Tout est beaucoup trop complexe... Je dis ça pour vous, tu connais mieux que moi ces verdas ; ils ne sont pas amicaux.
- Tant que j'ai l'argent, tout ira bien.
- Vous l'aurez si le plan se passe comme prévu... Je dois partir, quand les armes auront dépassé le spatioport, je vous préviendrai.
Les deux hommes se serrèrent l'avant-bras et l'inconnu déposa sa main sur l'épaule de Lola. Elle se mit à sourire cordialement et déposa la sienne sur celle-ci.
- Je te remercie pour ton accueil Tharkan et je suis encore désolé pour le dérangement Lola.
Après ces mots, il passa la porte d'entrée et partit dans l'obscurité de la nuit. Thrian ne comprenait plus du tout ce qui se tramait dans cette maison. Lorsque ses parents se retournèrent vers les escaliers pour aller dans leur chambre, il se mit silencieusement à courir vers la sienne. L'adolescent était perdu dans ses pensées, ses parents cachaient des choses à Vilma ainsi qu'à lui. Pourquoi faisaient-ils cela ? Qui était cet homme ? Étaient-ils des criminelles ? Autant de questions qui l'empêcha de dormir. Le matin s'annonçait dur.
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