La Rouge meurtrière

Nous allions à vau-l'eau sur cette terre aride vers une destination incertaine. Dix aventuriers en file indienne épuisés. Un vent glacial et violent frappait nos corps tordus qui languissaient après une oasis d'accalmie. Nos ombres s'aplatissaient sur le sol et formaient comme une mangrove de jambes arquées par l'effort. Nous avancions péniblement souvent surpris par des gouffres entravant notre route et aussi profonds que le néant. Ils étaient d'un noir absolu, prêts à nous engloutir à la moindre erreur. Chaque geste, trop peu fluide dans cette course pour la vie, semblait nous faire ruisseler d'espérance. Une ondée de foi nous traversait l'échine à chaque fois que nous passions une crête ou qu'une lueur inédite se profilait sur l'horizon. Puis, comme un plouf presque attendu, nos espoirs périssaient et la peur de mourir nous gagnait comme la gangrène. Ce spectre, spitant sur nos rêves, épuisa nos dernières forces.

J'ai été le dernier à survivre. Un à un mes compagnons sont tombés. Maintenant, je suis allongé sur le dos, les yeux rivés vers un ciel vide. Dernier coucher de soleil.

Je ne suis plus qu'une aquarelle dans vos télescopes.

Bienvenu sur Mars.