Le couloir que Madelina emprunta dont le tapis épais avait étouffé son pas était très peu éclairé. Elle se hâta. Le séjour offert par le comité d'entreprise dans ce vieux manoir ne l'intéressait pas. Nouer des relations plus étroites avec ses collègues non plus.
De grands tableaux encombraient les murs ternes et leurs ombres pointues tombaient vers le sol. Des visages sombres, prisonniers de cadres usés qui semblaient par endroit vermoulus, la suivaient d'un œil inquisitif que seul le temps avait figé. Deux sculptures, vieilles et patinées, des hommes forgés dans le bronze se faisant face et s'affrontant du regard, venaient alourdir l'entrée de l'escalier principal qui plongeait vers le rez-de-chaussé baigné de lumière et de vie.

En bas, on riait. Madelina fut soulagée.

Quand Lucas sortit de sa chambre il était dix-neuf heures. Il prit son temps. Pouvoir faire le point sur sa carrière et son entourage professionnel dans ce magnifique endroit le réjouit au plus haut point. Le couloir offrait une agréable sensation de calme. Les murs, aux couleurs chaudes, décorés des portraits des propriétaires et autres visiteurs de prestige dont le bois sculpté laissait apparaitre quelques dorures anciennes, semblaient si frêles devant ces imposants personnages aux sourires énigmatiques. Pour descendre au rez-de-chaussé deux bustes de David, façonnés au dix-neuvième siècle, imposaient un style le visage tourné l'un vers l'autre dans une parfaite entente amicale.

En bas le brouhaha fit sortir Lucas de son rève.