Rendez-vous sous la plume

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J'avais pourtant soigneusement rangé ma cabine de jolie rouquine en me disant que si la croisière se décidait à s'amuser, alors je serais prête, ma plus belle lingerie à portée de main pour affrioler les passants égarés dans mon couloir de fond de cale (cabine que vous avez visiblement réussi à atteindre puisque vous êtes ici). Et parce qu'il en faut pour tous les goûts, j'avais aussi installé un juke-box vintage avec mes meilleurs tubes et, cela va de soi, une fontaine à absinthe.

J'étais très contente de la tournure que prenait mon voyage. Loin de la Croisette et des paparazzis, j'avais une chance folle et des invités géniaux (presque tous). Je citerai d'abord mon Lorenzo, le plus fidèle de tous mes infidèles ; le plus charmant aussi (même s'il cache très bien cette qualité). Et puis, bien évidemment, mes comparses des quatre cents coups : Carole, Julien, Kentyn, Etienne, Fred, Léa, Denis, Fanny, Bruno, Jean-Michel, Monalisette, Louise, Romero, Romogolus, Julen, Rose, Bocard, Vincent, un marcheur-walker, une chasseuse de rêves qui fait de l'acrobranche dans le coin et tant d'autres personnalités à l'humour parfois aussi grinçant que jubilatoire. On rigolait bien, passant d'une cabine à l'autre comme des ados se glissant dans les dortoirs d'en face en pleine nuit pendant les colonies de vacances. Que de bons moments !

Malheureusement, depuis peu, ma cabine ressemble à une déchetterie. Tout se passe comme si personne n'avait jamais réellement vidé la corbeille à papier et qu'elle avait soudain explosé, telle une bombe de cotillons et confettis lors d'un réveillon. Les vieilles pages se glissent dans tous les recoins, de la douche au juke-box en passant par mes draps, pourtant fraîchement changés. Le pire, c'est que ces revenantes sont vides et que je ne peux ni les remettre sur le bar ou dans le juke-box à disposition des amateurs de passage, ni les balancer par-dessus bord. Je me prends une décharge 404 à chaque fois que je les touche. On n'a pourtant pas heurté d'iceberg. Si ?

Dans les cabines alentour, c'est la panique. Certains parlent de tempête et font signer une pétition à l'adresse du capitaine. D'autres disent que le bougre s'est déjà barré avec la bonne et qu'on ferait mieux de se choisir un canoë de sauvetage avant de sombrer.

Tandis que mes fantômes flottent autour de mes genoux, je me rends à l'évidence et commence à considérer l'option "fuite vers des cieux plus cléments". Sauf que voilà : partir, O.K. Mais où ?

Après une brève revue des offres Plume&Vacances, je peine à m'emballer. Dépitée, j'appelle mon infidèle favori qui me rétorque :

  • Bah. On pourrait se faire un forum, mais... Côté jardin, c'est un camping avec des douches pleines de poux. Côté cuisine, c'est une usine à gaz à modérer. Et de toute façon, je n'écris plus.

Une usine à gaz avec des poux. Ce mec sait me faire rêver.

Tandis que l'eau monte, j'enfile mon gilet de sauvetage tout en regardant avec nostalgie ce joli bikini à ficelles prévu pour l'été. Etienne me crie :

  • Prends-le avec, ma fée ! Mais, grouille-toi ! On n'a pas le temps de se faire le coup du cric maintenant !
  • Etienne ? On va où ?
  • Mais, tu sais, ce n'est jamais l'envie qui manque !
  • Oui, mais… On va où ?
  • C'est quand tu veux ! Tu le sais, ça, hein ? Tu le sais ?
  • Etienne ! On va où ?
  • Exactement. Où tu veux, quand tu veux. Tu n'as qu'à claquer des doigts et je laisse ma vigne de côté le temps de te faire des galipettes dans la forêt.
  • Non, mais là, on va où ?
  • Ah. Je ne sais pas. Tu crois qu'ils vont où les autres ? Tu sais où est Fred ?
  • Je crois qu'il est allé trouver le capitaine.

À ce moment-là, Marsh sort de sa cabine en nous regardant bizarrement :

  • Vous faites quoi encore tous les deux avec vos gilets de sauvetage et vos palmes ? Venez, on va chez Bruno ! Il nous a sorti sa guitare ; vous n'allez pas louper ça ! Tu rangeras ta chambre plus tard, La Klandestine !

Bon, ok. Mais, est-ce que quelqu'un sait où est l'aspirateur dans ce foutu paquebot ? Comment on fait pour vider la poubelle ?

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