Baladin des brumes
C’est tôt le matin.
Les rues sont désertes.
Seul un maigre chien
Renifle la puante crête
D’un tas de poubelles.
Sortant d’un immeuble,
Regardant la nuit cruelle
Décliner et la terre meuble
Reprendre sa place,
Il marche sans savoir
Ou il va. Traversant une place,
Il voit des fantômes boire
Au goulot de bouteilles,
Dont le liquide, telle la bile,
Ronge les gorges pareilles
A l’acide sur une veine fébrile.
Continuant sa déambulation,
Les senteurs de cafés,
De viennoiseries, de thés,
L’enveloppent, douces radiations.
Baladin des brumes,
A son passage le monde
S’éveille. Le sol fume
Sous la pression des ondes
Brulantes d’un soleil
Larmoyant. Les bleus
Du céleste océan réveillent
Les moineaux fiévreux.
Les pluies de la veille
Ont laissé place aux miroirs
Et autres merveilles.
Le froid, rude rasoir,
L’assène de ces coups,
Lorsque s’arrêtant,
Prenant un instant,
Pour voir un enfant qui joue,
Il sort ses mains imprudentes
De ces chaudes poches.
La semelle battant la latente
Terre, il croise un passant, brioche
A la main. Lui n’avait rien
Mangé depuis le jour
Ou il avait laissé les siens
Qu’il avait quitté pour toujours.
De leur nid, des pigeons
S’envolent, le sortant
De ces tourmentes visions.
Autour de lui, lentement,
La foule s’embourasque
A présent. Devenant pigeon
A son tour, mettant son masque,
Il se fondit dans la masse de pions.
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