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Trois heures environ venaient de s’écouler. Jim ouvrit la porte, le visage visiblement préoccupé. Quelque chose n’allait pas. Il avait attendu trois heures chez la jeune fille qu’il avait sortie de l’annuaire, dans l’espoir que l’assassin vienne la trouver. Attente inutile en vérité, puisqu’il n’était pas au rendez-vous.


  Ce qui le frappa tout d’abord ce fut l’absence d’éléctricité : rien n’était allumé. Puis il se rappela qu’il n’avait pas utilisé sa clef pour ouvrir la porte alors qu’Amy avait fermé le verrou derrière lui, il en était certain. Il appela une fois. Rien, pas un bruit. Son coeur se mit à battre plus vite. Serait-elle partie ? Impossible, elle lui aurait laissé un mot et elle aurait fermé la porte. Alors… Se pourrait-il qu’il se fut trompé et que… Mais non voyons ! Pas Amy. Mais s’il ne lui était rien arrivé, pourquoi ne répondait-elle pas ? Il se rendit dans la cuisine, personne. Personne non plus dans la salle à manger. Anxieux il se dirigea vers la porte de la chambre. Sa main se posa sur la poignée. Soudain, il se refuse à la tourner. La main sur l’espagnolette se refroidit de plus en plus tandis qu’il sentait monter en lui des sueurs froides comme il en ressentait lors d’hypoglycémies. « Pourquoi ne pas ouvrir ? Elle est là en train de se déshabiller. Elle ne t’a pas entendu et ne pouvait te répondre. Et quand elle va te voir entrer avec ta tête de mort elle va s’inquiéter pour rien. Quant à la lumière, elle voulait faire des économies. Oui mais ce n’est pas son habitude d’éteindre la lumière d’elle-même. Bien au contraire. » Puis comme mut par un mauvais pressentiment il enfonça le chambranle et la porte sortit de ses gonds. L’obscurité qui régnait dans la pièce l’inquiéta. Il n’osait pas allumer, il avait peur de ce qu’il allait voir et pourtant, d’une façon presque machinale il ferma le circuit et la lumière éclaira la pièce comme des milliards de projecteurs aveuglants. Il était tellement accoutumé à ces ténèbres qu’il dut fermer les yeux pendant un moment. Il aurait préféré être aveugle plutôt que de voir ce qu’il vit lorsqu’il les rouvrit. Là, devant lui, sur le matelas était allongée son Amy avec entre les cuisses du sang qui avait séché. Son coeur fit un bond dans sa poitrine et il eut l’estomac au bord des lèvres. Il se précipita dans les toilettes et se pencha au-dessus de la cuvette.

  Il sentit alors un fil passer autour de son cou et se serrer. Automatiquement, il porta les mains à sa gorge dans l’espoir de desserrer l’étreinte. Puis sans qu’il puisse rien faire, il vit le mur du côté du lavabo se rapprocher tandis qu’il quittait la cuvette. Il se cogna la tête contre les carreaux de faïence. Le fil avait relâché son étranglement et la respiration lui revint comme si la vie emplissait de nouveau son être.

  Il se retourna et le vit, l’assassin, qui le regardait, son rasoir à la main. Il s’élança la lame vers l’avant mais Jim sortit de la salle d’eau avant qu’il ne l’atteigne. Cependant la chose quitta elle aussi la pièce et ils se retrouvèrent face à face dans la chambre où reposait le corps inerte d’Amy. La créature faisait de grands gestes pour essayer d’atteindre Jim qui esquivait du mieux qu’il le pouvait les assauts de la lame. Mais, mal coordonné sans doute, la lame vint le toucher au flanc gauche et Jim laissa échapper un cri. Il porta vivement la main sur le côté et sentit un fin filet de sang lui couler entre les doigts.

  Il recula vers la salle à manger, l’homme sur ses talons. Jim se jeta sur lui et sentit de nouveau la lame lui couper la chair. Il tenta d’étrangler cette créature. Il serrait tant qu’il pouvait. Il n’était pas bien musclé mais une poussée d’adrénaline vint en renfort.

  L’homme râla d’un râle de bête fauve sur le point de mourir. Ses mains agrippèrent les bras de Jim. Elles se désagrégeaient par le contact de cet être vivant. De leur poussière apparurent des vers qui commencèrent de ronger la peau de Jim. Pourtant celui-ci ne ressentait rien tant il était occupé de tuer ce monstre. Il serra de plus en plus ses mains autour de cette gorge pourrie. Il voulait tant en venir à bout que ce contact ne le répugnait même pas.

  Ils roulèrent sur la moquette, chacun tentant d’étrangler l’autre. Puis se redressant, Jim lui fit jeter le rasoir au loin et l’assomma d’un coup de poing sur la tête. La bête râla de nouveau et comme la première fois, ce râle n’avait rien d’humain. On aurait dit le cri du Démon.

  Jim courut jusques au bureau où il travaillait et s’empara du coupe-lettres. L’être était en train de se mettre debout et il lui planta la lame dans la poitrine par trois fois. Et par trois fois le sang l’éclaboussa. La chose s’écroula. Morte.

  Soudain Jim eut l’impression que, par les fentes qu’il avait faites dans le corps, une forme fantomatique s’échappait. Le temps qu’il cligne des yeux et elle avait disparu. Il conclut alors à une hallucination.

  Débarassé de l’homme, il retourna dans la chambre et vomit tout son saoul.


  La sonnerie de la porte d’entrée le tira de l’avalanche de souvenirs et une jeune fille entra.

  Il se rappela soudainement qu’il l’avait invitée à passer la soirée chez lui.

  Elle le rejoignit et s’assit sur l’accoudoir du fauteuil voisin. Il la regarda, la fit s’approcher de son fauteuil, lui caressa le cou… Et lui sourit.

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