Chapitre 50
Ecrit en écoutant notamment : Azax Bliss Remix – Mindf**K [Psytrance]
Effectivement, la file d’attente est très courte et nous rejoignons les visiteurs qui ferment la marche au niveau d’un panneau indiquant : ’10 minutes’. Curieusement, Morgan me paraît moins enthousiaste que tout à l’heure... Qu’ai-je pu dire de travers ? Ses traits laisseraient presque transparaître… une certaine tension. Serait-ce possible que… Bah non, pas un mec comme lui, il en a déjà vu d’autres ! La montée et la redescente, ça le connaît ! Oh… c’est méchant de penser ça en fait… mais terriblement bien adapté comme comparaison ! De fait, je m’enquiers de son état :
— T’es sûr que ça va ? T’as pas bien dormi cette nuit ?
— Si je te rassure !
Il se rapproche de moi et me dit doucement pour ne pas être entendu des autres :
— En fait... euh... ça me fait carrément peur de monter là-dedans...
— Ah mais si tu veux on n’est pas obligé d’y aller !
Je n’en reviens pas qu’un mec aussi extraverti et sûr de lui puisse être effrayé par quelques pauvres vrilles. Bon après, moi, j’ai un peu peur des gens en général, et comme c’est légèrement plus gênant dans la vie de tous les jours, j’évite de faire le malin si je ne veux pas me planter dans le prochain ravin que je croise…
Il tente de se redonner du courage :
— Si, j'ai pas envie de passer pour un faible devant toute ta famille ! Tu vas me trouver con, mais quand je devais avoir 8 ou 9 ans, mes grands-parents m’avaient emmené à la fête foraine du village, et j’avais vu en direct un wagon dérailler et se crasher. Ça m’avait vraiment marqué, et en fait, j’ai jamais remis les pieds dans un parc d’attraction…
— Bah pourquoi tu ne me l’as pas dit avant ? On aurait pu trouver autre chose à faire !
— Je me suis dit qu’à 16 ans, j’avais pas de raison d’être encore effrayé, mais faut croire que si…
Je laisse les trois autres prendre un peu d’avance ; ils ne s’en soucient pas, supposant que je souhaite simplement disposer d’un peu d’intimité avec mon petit ami – enfin une intimité toute relative, puisque nous sommes cernés par une foule jacassière prête à tout pour gruger quelques places –.
A mesure que nous approchons de l’embarquement, il est proche de se mordre les ongles, mais son honneur semble l’empêcher de faire demi-tour.
Lorsque les dernières barrières s’ouvrent pour nous permettre de prendre place dans le train, il a encore un moment d’hésitation mais j’arrive à le faire monter en le tirant par la main. Nous nous installons dans les sièges, et il tient toujours fermement ma main, bien que je le sente trembler comme une feuille morte. Je constate que ses yeux, qui scannent les alentours à l'aide de mouvements rapides, expriment vraiment une anxiété importante, et je lui passe ma main sur l’épaule :
— Essaye de te détendre, sinon tu ne vas pas profiter ! Regarde, pose tes mains sur la zone métallique, ça t’affiche ton rythme cardiaque, c’est amusant !
Il s’exécute en me souriant, et alors que mon cadran affiche 65 bpm, il est lui à 120.
— Au moins, maintenant, je suis sûr que tu ne me fais pas une blague !
— Ah non, je te garantis que c’est pas du tout le cas !
Il sursaute quand le train démarre, bien que nous avancions pour l’instant au rythme de la marche pour nous positionner au-dessus du moteur linéaire qui va nous propulser à 100 km/h en deux secondes et demie. Alors que les autres passagers attendent impatiemment le lancement, mon amoureux me compresse le bras encore plus fort qu’un tensiomètre.
Nous démarrons enfin, et j’entends à peine son cri de terreur étouffé par le vacarme des rails et du vent. Il s’agrippe toujours fermement à moi, en resserrant sa prise lorsque nous passons le looping et les vrilles. Il semble particulièrement soulagé, mais très fier de lui, quand le wagon freine enfin avant d’arriver au niveau du quai.
— Euh, je crois que tu peux me lâcher, tu vas finir par avoir une crampe au bras à force !
— T’aimes pas que je te tienne ? Ah non, j’ai compris ! En fait, tu préférerais que je m’use le bras et le poignet sur autre chose !
— Pas faux ! Tu me remontreras ton talent ce soir, hein !
Nous rejoignons les autres, et Alexis se tord de rire en nous voyant arriver :
— Alors cousin, t’as vu la tête de ton ami sur la photo ?
— Quelle photo ? , réplique Morgan en m’adressant la question.
— Il y a un appareil automatique au niveau de la dernière vrille, je pense qu’il ne t’a pas raté !
Nous suivons Alexis, qui, très fier de sa trouvaille, nous désigne mon amoureux sur les écrans sur lesquels défilent les photos des passagers de l’attraction.
— Oh la honte ! s’écrie Morgan en se voyant.
Je lui frotte amicalement le dos en lui chuchotant que même comme ça, il reste toujours aussi magnifique à mes yeux.
Nous enchaînons ensuite quelques attractions plus tranquilles, voulant réserver le meilleur pour la fin. Ayant nettement manqué de temps ce matin pour manger, nous décidons de nous asseoir à une table sur les rives d'un étang à onze heures et demie pour déballer nos vivres, faire le débriefing de la matinée, et constituer le planning de l’après-midi. Nous préférons notamment éviter toute activité susceptible de nous mouiller si nous ne voulons pas trembler de froid pendant la demi-heure qui suit.
Morgan semble heureusement bien plus à l’aise que tout à l’heure lorsque nous embarquons dans le Silver Star. Nous sommes tractés à 73m de haut sur une pente tellement raide que nous nous amusons à faire une séance d'abdos dans les sièges. Je suis rassuré de voir qu’il lâche les mains de la barre dans la première descente, qui nous emmène à 127 km/h à un angle proche de la verticale. Après que nous avons débarqué, il me glisse :
— Ce soir, si t’arrives à me procurer autant de sensations que ce foutu manège, t'es vraiment fort !
— Je vais essayer… et je vais surtout ne pas te laisser t’endormir comme un gros tas !
— Ah ouais, désolé pour hier soir, j’étais vraiment fatigué de la semaine… j’essaie de bosser un peu plus les cours que d’habitude… mais je te jure que je vais me rattraper ! J’ai déjà ma petite idée !
Je ne vous détaille même pas l’état d’excitation qui m’a habité tout l’après-midi ! Surtout que dès que nous n’étions que deux par rangée sur une attraction, il profitait outrageusement de mon incapacité à fuir pour me caresser l’entrejambe ! J’avoue que je manque clairement d’assurance, ou peut-être d’un peu de folie, pour faire de même dans un lieu public…
Finalement, la journée s'est malgré tout terminée un peu trop vite à notre goût, et après être montés une dernière fois dans le Silver Star à la nuit tombante, il est temps de quitter les lieux pour reprendre la navette retour.
Nous décidons d’échanger les places par rapport à ce matin, et je fais donc le trajet à côté d’Alexis.
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