Pris au piège
Le soleil se leva peu à peu dans le ciel, illuminant les façades des résidences. Lorsque l’un des travailleurs matinaux sortit de sa maison, il reconnut le corps déchiqueté du fils de l’un des artisans reposant sur une mare de sang. Horrifié à cette vison, il ne put réagir, encore moins agir en conséquence. Tandis qu’il sentit une certaine paralysie l’envahir, il entendit une femme s’écrier de terreur et de souffrance. Il leva les yeux, s’aperçut qu’il s’agissait de la maternel de l’enfant.
- Il faut avertir Héraklès, dit l’un des résidents. Il saura retrouver cette répugnante créature.
- Cela ne sera nécessaire, dit alors un homme qui mit la main sur l’épaule de l’artisan.
Celui qui avait omis l’opinion d’avertir le demi-dieu, se retourna, se retrouva face à un inconnu qui paraissait avoir quatre décennies. Il avait les cheveux courts d’un brun-roux, une barbe soigneusement taillée et ses yeux étaient de couleur sombre. Sans se poser de controverse, il savait que cet étranger ne provenait de la région. Le nouvel arrivant portait une veste à col d’une teinte métallique dont la partie centrale était d’un rouge sang ainsi qu'une cape d’un gris acier également élimé. Son armure était composée d’une tunique faite d’émail, d’un protège-bras en fer délicatement taillé en pointes de chaque côté dont le milieu était incrusté de rubis. Quand aux gantelets ayant une manufacture semblable, ils possédaient des émeraudes. La couleur de la protection des ses jambes étaient d’un vert sombre et des bottes accrochés à l’ensemble.
- Souhaitez-vous vous entretenir en compagnie de l’un des membres de la famille royale ? demande l’artisan.
- En effet, dit l’inconnu. J’avais prévu un entretien avec le plus jeune, il est inutile de montrer le chemin, je connais l’endroit où se situe la demeure.
Il regarda la maternel s’effondrer sur le sol pavé en ressentant une certaine compassion sans l’exprimer puis marcha vers sa destination. Quelques temps plus tard, il arriva dans le bois, proche de la résidence du prochain Chasseurs de Surnaturels. Il s’arrêta un instant, remarqua plusieurs gouttes de sang de nuances sombres sur les feuilles et selon le renseignement de Méléagre, la créature avait été attrapé. Il entra dans le hall, croisa un homme brun au regard froid et distant s’approcher vers l’extérieur de la demeure. Il attendit un instant et vit l’ancien hoplite avancer dans sa direction.
Naranwe qui resta proche du seuil de la porte sans se montrer, écouta la courte conversation jusqu’à ce que les pas s’éloignèrent. D’après ce qu’il retenu, le mortel n’avait voyagé seul. Il serra la paume sur la fiole qui contenait le remède, la teinte de ses cheveux redevint argentée. Malgré les cernes bordant ses yeux, il suivit les traces lugubres à grand pas. Il trouva bientôt Argos dans une situation périlleuse, ligoté par une corde à un tronc d’un arbre. Il voulut lui porter secours mais il était dans l’incapacité de faire un tel geste car il aperçu la grande carrure d’un homme armé d’une lance. L’àlfar remarqua que le jeune dieu ouvrit les yeux puis leva la tête.
- Je ne penserais que cette chasse soit de si courte durée, dit Héraklès.
- Soyez donc raisonnable, dit Iskhuros. Vous n’oseriez blesser un guérisseur qui souhaite sauvegarder la vie des nobles.
- Un guérisseur qui n’a guère besoin de soin pour se rétablir, dit Héraklès qui observa ses yeux d’un bleu électrique.
À ce moment, Argos eut conscience que son demi-frère avait été présent lors de son rétablissement de ses blessures. Il essaya de se remémorer ses agissements de la nuit précédente mais il n’eut aucun souvenir semblable au maléfice que le partenaire d’armes de Naranwe avait subi et ce sentiment d’incertitude le tourmenta. Il se sentit affaibli par la perte du liquide visqueux qui avait afflué avant sa guérison et le fait de rester éveillé devenait de plus en plus ardu tout en percevant les mots lointains de son interlocuteur.
- Je revenais de l’extérieur de la cité lorsque cela s’est produit, dit alors Héraklès. Deux horribles créatures qui se battaient pour un morceau de viande déchiqueté qui gisait à terre. À cet instant, j’avais compris ce que pouvais ressentir ces Chasseurs. En les voyant montrer leurs crocs, je me suis dis qu’il n’y avait aucune humanité à l’intérieur de ces monstres.
- Je m’en excuse, dit Iskhuros en ayant la gorge nouée. Si seulement je pouvais mettre un terme à cela. La première fois que cela s’est produit, j’étais effrayé à la conscience que je ne pourrais m’empêcher de blesser mes compagnons de voyage. Ce sentiment ne cesse d’envahir mon esprit.
Sans s’exprimer de nouveau, le demi-dieu s’approcha en lâchant la lance ensanglantée, prit le khiton du captif et renifla les tâches sombres encore humides. Il relâcha le vêtement puis croisa le regard d’Argos. Il prit tout à coup sa main contre son front, sentit soudainement son crane devenir fortement douloureux avant qu’un malaise l’emporta comme s’il a été assommé. Sans un signe avant-coureur, son corps s'écrouler au sol. Parvenant à peine à rester éveillé, le jeune dieu s’aperçut qu’il était enfin libre de se mouvoir. Il se rendit à peine compte qu’on lui versa un liquide dans sa gorge qui lui brûla atrocement et ne pouvant l’avaler, il s’abaissa au sol puis déversa le contenu sur les feuilles du bois. Lorsque sa vision revint peu à peu, il se releva en voyant Naranwe, le visage blême de stupeur.
En entendant subitement les bruits de pas qui provenaient de leur direction, ils n’eurent le temps de se dissimuler. Argos vit son compagnon se retourner face à un groupuscule de Chasseurs de Surnaturels.
- Le commandant fait vraiment preuve d’efficacité, dit l’un d’eux. Deux chiens galeux qui feront monter les enchères.
- Vous êtes actuellement en présence de nobles, dit Naranwe. Ayez donc un peu de respect lorsque vous vous adressez à nous.
- Ne soit guère si brusque, continue le Chasseur. Tu trouveras le respect au fond de la cale de notre navire.
L’àlfar qui ne put retenir davantage sa colère intérieure, frappa le mortel avec une si grande force que sa mâchoire se fractura et tomba à terre.
- Réfléchis donc avant de te prononcer, dit Naranwe avec hargne.
À la suite de son manque de sang-froid, Argos pensa que les désagréments allaient bientôt survenir.
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