Chapitre 70 : Elle vous ressemble
La porte s'ouvrit doucement, laissant passer Alex. Luna venait de refermer les pans de la moustiquaire autour du lit de Myriam. Elle ne dormait plus dans le berceau, devenu trop petit, mais dans un lit bas, presque à ras du sol. Luna tourna la tête et sourit à Alex alors qu'il faisait quelques pas dans la chambre pour se rapprocher d'elles. Il s'accroupit près du lit et contempla sa fille, endormie.
- Elle est magnifique, souffla-t-il, un air heureux s'affichant sur son visage. Je vous savais en sécurité, mais j'avais tant hâte de vous revoir, de voir comment elle avait grandi, changé...
La main de Luna se glissa sur son épaule, il tourna légèrement la tête pour y déposer un baiser.
- Elle vous ressemble, dit la jeune femme. Plus les jours passaient et plus je la voyais prendre vos traits. Et elle a vos yeux, aussi. Maintenant, c'est très net.
- C'est vrai, dit-il.
Il demeura encore un moment ainsi, à s'emplir les yeux de la sérénité qui émanait de la petite fille, de son sommeil profond.
- Se réveille-t-elle encore la nuit ?
- Non, juste au petit matin. Mais Roy, lui, réclame encore...
- C'est un petit gourmand, rit doucement Alex. S'il devient costaud comme son père, ce n'est pas étonnant...
Il eut un dernier regard pour sa fille, puis se redressa et prit Luna dans ses bras. Elle lui rendit son étreinte, puis demanda :
- Alex ?
- Oui, mon amour ?
- Est-ce que... Est-ce que nous allons encore être séparés ?
- Non, répondit-il avec assurance. Je ne peux vous le promettre totalement, bien sûr, mais normalement non. Comme je l'ai dit au cours du repas ce soir, nous disposons William et moi de quelques semaines de permission et nous allons donc pouvoir organiser tranquillement votre retour à Lucknow. Will a demandé à y demeurer en poste, avec son régiment, et cela lui a été accordé sans réserve. Quant à moi... Même si Sir Lawrence ne reprend pas son poste de gouverneur, j'ai demandé à rester aussi à Lucknow et à poursuivre le travail engagé pour la pacification et l'administration de la province. De nouvelles règles vont se mettre en place, nous travaillerons maintenant pour la Couronne britannique et non plus pour la Compagnie des Indes. Cela va changer beaucoup de choses. Il y aura beaucoup à faire et je veux y prendre ma part. Et pour moi, c'était normal de demeurer à Lucknow. Avant tout pour y vivre avec vous et aussi parce que je connais bien la province.
Le visage de Luna était toujours caché contre l'épaule d'Alex, mais elle sourit, soulagée.
- Nous allons donc pouvoir rentrer chez nous ? demanda-t-elle encore.
- Oui, je vous l'assure.
Il posa doucement sa main sur sa nuque et plongea son regard dans le sien. Dieu qu'elle lui avait manqué ! Il se pencha alors et l'embrassa longuement. Puis il sentit la main fine de Luna glisser sur sa chemise et en défaire les premiers boutons.
- Mon amour, lui murmura-t-il à l'oreille. J'ai tant envie de vous retrouver...
Luna lui répondit en se blottissant plus encore contre lui. Il entreprit alors de lui ôter son sari, puis il l'étendit sur le lit, retira ses vêtements et vint s'allonger tout contre elle. Le visage de Luna était rayonnant et toute attente. Ils firent l'amour sans réserve, profitant de la sérénité et de la liberté qui leur étaient enfin offertes.
**
Ce furent les pleurs de Myriam qui réveillèrent Alex. Luna bougea légèrement, mais il était déjà assis et écartait un pan de la moustiquaire. Il attrapa sa fille, la prit contre lui un instant, ce qui la calma quelque peu.
- Elle a faim, dit Luna. C'est son heure.
Machinalement, Alex jeta un regard par la fenêtre : le jour pointait à peine. Il tendit Myriam à Luna qui la prit aussitôt contre elle. Quelques secondes plus tard, elle tétait goulûment.
- Elle vous a réveillé, dit-elle encore.
- Ce n'est pas un souci, répondit-il. Je suis heureux d'assister à son premier repas de la journée.
Luna leva les yeux et le fixa. Il lui sourit. Ses joues rosirent légèrement sous son regard : elle n'avait plus l'habitude de la présence d'Alex alors qu'elle accomplissait des gestes du quotidien, et certains assez intimes comme allaiter leur fille. Elle reporta son attention sur Myriam.
- Elle a bien grandi, reprit Alex. On ne dirait pas qu'elle a vécu les premiers mois de sa vie durant un siège long et difficile.
- En effet, dit Luna. Je suis heureuse qu'elle aille bien. Elle n'est pas malade non plus et pleure rarement. Elle est vraiment facile. Je crois que Roy est déjà plus capricieux.
- S'il hérite du caractère de son père, je promets des moments bien compliqués pour Sophie !
- Alex...
- Oui ?
- Vous ne regrettez pas d'avoir une fille ?
Il s'étonna un instant de sa question, puis répondit :
- Pas du tout. Beaucoup d'hommes aspirent à avoir un fils, c'est ainsi. Moi, je suis juste heureux de vous avoir toutes les deux, que ma mère soit avec nous et que Myriam aille bien. Je n'ai pas le moindre regret.
- William est très fier de son petit Roy ! ajouta-t-elle en souriant.
- C'est vrai. Pour ma part, je suis heureux que nous ayons cette enfant. Ses sourires me ravissent, sa bonne humeur m'enchante. Et de vous voir toutes les deux...
Il tendit la main vers Luna, lui frôla la joue. Elle lui sourit en retour. Puis ils gardèrent le silence. Quand Myriam eut terminé son repas, Luna se leva pour la changer et la recoucher.
- Se rendort-elle aisément ?
- De moins en moins souvent à cette heure, fit Luna. Mais elle dort encore dans la matinée et l'après-midi aussi.
- Laissez-la moi un peu. J'aimerais la bercer, fit Alex.
Luna sourit : elle pouvait comprendre qu'Alex ait envie de profiter de leur fille, il l'avait si peu vue ! Et les derniers mois avaient dû être très longs pour lui. Ils avaient tant espéré que le siège de Lucknow ne durerait pas, que la ville aurait été reprise avant la fin de l'année et qu'ils auraient pu se retrouver avant la Noël. Dire que Myriam fêterait bientôt son premier anniversaire ! Luna était heureuse qu'Alex soit de retour, qu'ils soient désormais tous réunis pour le fêter ensemble.
**
Myriam ne manifesta guère d'envie de se rendormir, quand bien même Alex l'avait bercée un bon moment, et Luna finit par la rallonger dans son lit. Elle se mit à babiller joyeusement, faisant de petits bruits qui semblaient l'amuser beaucoup. Luna referma soigneusement la moustiquaire autour d'elle, puis se tourna vers Alex. Il était demeuré assis en tailleur et lui tendit les bras, la regardant avec tendresse. Elle vint se blottir contre lui et il retira rapidement le voile dont elle s'était entourée.
Elle noua ses bras autour du cou d'Alex alors qu'il faisait glisser ses mains sur ses reins. Puis ils s'embrassèrent longuement. La douce caresse de la pointe des seins de Luna sur son torse le fit frémir.
- Je vous veux encore, mon aimée, lui souffla-t-il.
- Moi aussi, lui répondit-elle contre ses lèvres. Aimez-moi, Alex... Aimez-moi...
Il ne répondit pas, l'allongea sur le lit et laissa courir ses mains, ses lèvres sur tout son corps avant de la prendre avec passion et de la mener vers le plaisir.
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