La rencontre des rois - 3° partie

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Ma tante fit une courte apparition. Nous étions attendus. Soudain, je réalisai mon incapacité à descendre les escaliers. Je lui fis signe mais elle disparut précipitamment. William perçut mon trouble et proposa de me porter. Je précisai le danger que cela représentait, si nous tombions, ou si ma jambe cognait un mur. Cette situation me ramena quelques semaines plus tôt, dans les bras de Krys. Il m’aurait transporté sans faiblir. Je me tournai vers William. Il avait la carrure de Krys, toutefois cela ne représentait pas une garantie.

— On va te porter à deux, me rassura-t-il, n’est-ce pas Owen ?

— Oui, bien sûr.

— Mais il y a des endroits où on ne passera pas à trois, fis-je remarquer.

— Ça ira, assura William, ça ira.

Je me laissai emmener. Arrivée près des premières marches, ils me soulevèrent. Roger et Robb portaient la chaise. Les autres nous avaient précédés.

Aux endroits délicats, William fut seul à me porter. Owen lui passait délicatement ma jambe handicapée. Je le sentais plus fébrile que Krys quoiqu’il avançât d’un pas régulier. Décidément, je ne cessais de les comparer, tous les deux.

Finalement, nous atteignîmes le niveau du sol sans dommage. William et Owen continuaient de me porter le temps que Roger et Robb apportent la chaise. Le temps que chacun récupère de l’exercice, nous rejoignîmes le groupe des nobles de haut rang. Discrets, des protecteurs assuraient notre sécurité.

Si la ville s’étalait tout autour du château, sur le devant, la face sud, les différents souverains qui s’étaient succédé avaient toujours désiré qu’un espace important le sépare des premières habitations. L’esplanade était recouverte d’une pelouse restaurée régulièrement du fait des nombreuses manifestations qui s’y déroulaient. Aujourd’hui, des comptoirs de toutes sortes la peuplaient : buffets, bars, jeux, compétitions, théâtre, animations en tout genre, vente de babioles et objets bradés.

Mes compagnons et moi avions faim. Nous commençâmes par nous servir, tout en observant ce qui se passait autour de nous. Je demandai :

— À quelle activité désirez-vous vous engager, messieurs ?

— Je suis inscrit à la compétition de tir à l’arc, répondit William.

— Je lui préfère celle d’équitation, déclara Owen.

— Je vais goûter aux spécialités locales, annonça Robb.

Chacun se trouva une occupation. Pour ma part, j’allais me contenter de regarder, mais cela me convenait. Avant que nous nous séparions, attirés par telle ou telle activité, nous déambulâmes au milieu des comptoirs. Parti en éclaireur, Owen nous appela de loin. Parvenus à son niveau, il déclara :

— Nous sommes dans l’espace escrime. Regardez qui je vois sur la liste : Hugo est inscrit.

— Il va encore écraser la compétition, supputa Robb.

Promis au trône, il restait le favori de mon père. S’il se blessait lors de la compétition, je ne serais pas la dernière à regretter l’événement.

— Qui sont les autres ? demandai-je.

— Il en reste beaucoup. Il y en a que je ne connais pas : Hector, Thomas, Noah, André, Gustave et Markus. Des nouveaux apparemment. Ils ont débuté tout en bas de l’échelle et progressent en direction du haut du panier.

— Alors Hugo a des soucis à se faire, dis-je. Il y a là des gaillards capables de lui donner du fil à retordre.

— Hugo est imbattable, me contredit Robb.

— Je ne dis pas qu’il va perdre. Je dis qu’il risque d’être surpris.

— Tu les connais ?

— Parmi eux, il y a les trois immortels. Quant à Noah, j’ai cru entendre qu’il était encore plus fort qu’eux. Est-ce que tu vois Krys dans la liste ?

— Non. Pas de Krys, répondit Owen.

J’aurais tant aimé le rencontrer. Ce domaine où, pourtant, il excellait, ne l’avait pas attiré. J’essayais de me mettre à sa place. Je suis sûr de gagner, allais-je pour autant montrer ma force au monde entier ? Non, pas lui. Il ne semblait rechercher ni gloire, ni reconnaissance. Je le comprenais. Il avait déjà gagné tant de combats en tant qu’esclave.

— S’il avait concouru, Hugo perdait, ajoutai-je.

— C’est qui Krys ? demanda Robb.

— Le premier des immortels.

— Les quatre immortels, ce n’est pas l’expression employée lors des reproductions de la bataille de l’Isthme ? demanda William.

— Elles sont jouées chez vous ?

— Les ménestrels n’ont pas de frontière.

— Je leur ai collé cette étiquette en les voyant se battre. Je n’imaginais pas qu’on puisse les atteindre.

— Tout le monde sait qu’il s’agit d’une légende ! claironna Robb.

— Qui dit cela ?

— Les ménestrels enjolivent leurs histoires afin de les rendre croustillantes, surenchérit Robert.

— Comme ils font en permanence, ajouta Antoine, le frère de Robb.

— Je vous dis ce dont j’ai été témoin, vous n’êtes pas obligés de me croire.

— Les différentes compétitions vont reprendre. Je vous laisse, annonça William.

Tous les princes se dispersèrent, selon affinités. Nous nous retrouvâmes entre princesses. Je m’approchai de la liste en me demandant si un nom avait échappé à Owen. Non, visiblement, pas de Krys.

— Pourquoi les garçons ont-ils besoin de s’échiner ainsi, demanda Ingrid ?

— C’est leur truc, la compétition, répondit Léa.

— Ça leur apporte de la gloire, ajouta une princesse dont j’ignorais le nom.

— Ils jouent les coqs. Celui qui gagne s’imagine que nous tomberons follement amoureuses de lui.

— C’est Hugo le plus fort.

— Depuis longtemps.

— Alors pourquoi ne le voit-on pas ? demanda Ingrid.

— Ceux qui ont beaucoup de points peuvent très bien commencer à concourir à partir d’un niveau proche de celui qu’ils ont atteint lors de compétitions antérieures, expliquai-je. Par exemple, au regard de son niveau, Hugo peut se permettre d’arriver sur le tard et emporter la mise. D’ailleurs, il a suivi les grandes réunions entre souverains et ne pouvait concourir jusqu’à maintenant. Mais ça ne devrait pas lui poser de problème.

J’aperçus de loin Markus approcher de l’aire de combat. Il inspecta les listes de résultats.

— Regardez, dis-je à mes amies, voici Markus, un des immortels.

— Pas mal, s’extasia Léa.

— Et musclé, ajoutai-je.

— Un grand mâle !

— Il y a du beau monde qui arrive derrière lui.

— On dirait que la compétition va reprendre.

L’adversaire de Markus était en place et s’échauffait. Les juges se positionnèrent, puis donnèrent le signe du départ. Après quelques joutes, Markus adopta une position plus offensive. Décontenancé par la puissance des coups, son adversaire reculait sans cesse, finit par perdre son épée et leva les mains.

— Waw, s’exclama Léa, il est fort !

— Et tu n’as encore rien vu, affirmai-je.

— S’il est si fort, pourquoi son nom apparaît sur les listes depuis tôt ce matin ?

— Parce qu’il n’est pas connu, dis-je. Il est obligé de se bâtir une réputation depuis tout en bas de l’échelle.

— Il devrait être très fatigué, alors ?

— Oui, ajoutai-je, ça pourrait lui porter préjudice quand il affrontera quelqu’un de sa catégorie.

Pressée d’échapper à Hugo, je proposai de nous promener au travers des allées. Léa poussait la chaise. Je cherchai Krys discrètement. Nous revînmes près de l’aire de combat deux heures plus tard. J’inspectai les listes. La finale avait été remportée par Hugo. Noah n’avait pas accompli de miracle contre lui. Le troisième, Duncan, un officier qui suivait Hugo dans tous ses déplacements, avait battu Markus, quatrième. La fatigue, sans doute. N’empêche, ils s’étaient tout de même élevés jusqu’au sommet. Si ma tante m’en laissait le temps, je les féliciterais tout à l’heure.

William nous rejoignit. Il avait atteint la demi-finale. Mais qui avait gagné ? Hugo bien sûr ! Il était partout.

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