Épilogue

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La lune était pleine. Postée au-dessus du lac, elle ne put s’empêcher de minauder devant son reflet. Ce n’était pas dans ses habitudes, mais elle avait le cœur léger.

Plusieurs années étaient passées, depuis la dernière fois qu’elle s’était trouvée là. Porteuse d’une fabuleuse nouvelle, elle trépignait d’impatience à l’idée de la partager avec sa plus précieuse amie. Mais elle eût beau passer la forêt au crible, attentive au moindre signe qui la mettrait sur la piste de l’araignée, il n’y eût rien de probant avant longtemps. Déjà, le soleil pointait le bout de son nez quand elle discerna les résidus d’une toile, qui flottait au gré du vent. Recroquevillée sur elle-même, l’araignée se confondait avec l’écorce de l’arbre. Elle n’avait plus rien à voir avec la créature téméraire de ses souvenirs.

— Tisseuse, te souviens-tu de moi ?

Avec une infinie lenteur, l’araignée leva ses huit yeux vers la lune. La plupart d’entre eux n’y voyaient plus rien.

— Tisseuse, quel malheur t’est-il arrivé ?

— Les ans pèsent plus lourd sur nous que sur vous autres, qui brillez dans le ciel ! Je suis vieille, et je suis fatiguée de vivre.

La lune se tût, désolée. Pas une seule seconde elle n’avait pensé au fait que le temps ne s’écoulait pas de la même manière, sur la terre.

— Inutile de venir jusqu’ici pour me tourmenter. J’ai failli à la mission que tu m’avais confiée, et je ne comptais pas mourir en paix.

— Tisseuse, je ne suis pas venue jusqu’ici pour te tourmenter, je suis venue jusqu’ici pour te dire que ce que tu as fabriqué va plus haut, plus loin que l’univers ! Tu as mis au monde l’amour.

L’araignée, qui ne tenait plus tout-à-fait sur ses pattes, se redressa tant bien que mal pour faire face à la lune. Elle n’osait pas en croire ses oreilles.

— Est-ce bien vrai ?

La lune, émue, opina du chef. L’araignée regarda une à une ses pattes chétives, celles-là même qui avaient changé le destin du monde. Elle poussa un soupir de bonheur, son dernier avant de s’éteindre. Alors, la lune versa une larme qui recouvrit le corps de l’araignée. Mais au lieu de rester là où elle était tombée, la larme remonta jusqu’au ciel pour former l’étoile la plus brillante de toute la galaxie.

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