10 octobre 2018, 13h30, commissariat Bld Carl-Vogt

Une semaine après le meurtre de Georges Pendal, la police reçut la visite du premier témoin porteur d'un indice susceptible d'avoir le poid d'un véritable indice : le témoignage de George Bidon.

C'était un homme dans la mi-quarantaine, un ventre rond de buveur de bière, qui s'était trouvé le mercredi 3 octobre fatal au président du conseil d'Etat, sur une terrasse à boire une bière, justement. Il était un fin connaisseur de tout ce qui touchait au monde de la moto, et il avait vu le deux-roues à la hauteur de la voiture du président. Et la moto, il était formel là dessus, était une Kawasaki ER 6 de 2005 de couleur noir. Son regard était tombé sur le motard qui semblait converser avec la personne dans la voiture, puisque la fenêtre était abaissée. Il s'était même dit qu'ils devaient peut-être parler de la plaque de la moto. Celle-ci en était dépourvue. Mais Georges Bidon ne le savait que trop bien. Il était très fréquent de perdre sa plaque de moto si l'on se contentait du système de verrouillage du support de plaque d'origine. Il fallait rajouter des vis soi-même si l'on voulait éviter la petite mésaventure. Mais George Bidon avait alors replongé la tête, assis à la terrasse du bistrot, dans le journal 20 minutes, et n'avait donc pas vu la moto repartir au feu vert et la voiture ne pas le suivre. Ce n'est que suite aux klaxons des voitures dans la file qui ne cessait de se rallonger qu'il avait relevé la tête et vu la voiture toujours à l'arrêt et deux personnes autour l'air préoccupé par quelque chose.

Hans et Alice qui avaient été appelés au bureau par Abdel Chentali suite à la tournure de l'interrogatoire qu'il effectuait, lui demandèrent quasi simultanément :

- Mais pourquoi n'êtes-vous venus témoigner qu'aujourd'hui, une semaine après les faits ? Un appel à témoin a été transmis à tout les médias l'après-midi même du meurtre... ?

- Ecoutez...j'ai pas envie d'être mêlé à des histoires, et puis je me suis dit que de toute façon il y avait sûrement plein de gens qui en avait vu bien plus que moi, alors...

- Alors quoi !?, dit Hans légèrement agacé. Figurez-vous que vous êtes le premier témoignage réellement intéressant que nous ayons eu jusqu'à présent...

Alice renchérit :

- Et plus de temps passe moins il y a de chances d'obtenir un témoignage consistant c'est-à-dire qui apporte des éléments constructif.

Georges Bidon était gêné, et s'excusa presque :

- C'est ma femme qui a insisté pour que je vienne vous parler...

- Il faut toujours suivre les conseils de sa femme, sourit Alice. Voulez-vous boire quelque chose ?

- Euh...un café, volontiers !

- Une Kawasaki ER 6 noire, vous disiez, demanda Hans.

- Oui. Sûrement de 2005. J'en suis sûr.

- Sûr de quoi ? Que c'est une ER 6 noire, ou qu'elle est de 2005 ?, pressa Hans.

- Que c'est une ER 6. Et presque sûr qu'elle de 2004 ou 2005...

- Ok !

Hans se leva et sortit en croisant Alice qui avait un café à la main.

- T'as vu Nicolas ?, demanda-t-il.

- Il est à l'informatique...

- ça tombe bien !

- Tu t'y connais en moto ? demanda presque brutalement Hans.

Nicolas sursauta presque, tellement concentré sur ces textos :

- Bof...pourquoi ?

- Kawasaki ER 6, ça te parle ?

- Mmmh...je crois que mon frère en a une...

- De quelle couleur ?

- Pff...je sais pas...gris ou peut-être noir...

- De quelle année ?

- Non mais ! J'en sais rien, Hans ! Pourquoi ces questions ?

- Il faut que tu recherches toutes les motos ER 6 noires qui ont été immatriculées à Genève depuis, on va dire, 2003, ça nous fait un peu de marge, non, année 2000, par rapport à ce que nous a dit George Bidon.

- Ok !