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Sur la route de Sézegnin, Hans et Alice rejoignirent, le convoi de dix véhicules de la brigade spéciale d'intervention de la ville de Genève. Les Falquets n'avaient aucune chance de leur échapper. 22 chemin de la Plantée. Nom prédestiné. Quelle plantée ils allaient se prendre! Bien fait pour eux! Le convoi passa devant le terrain de moto-cross de Sézegnin où tout le monde se tournèrent pour regarder l'incroyable convoi. Ils durent tout de même réduire l'allure en entrant dans le village. Malheureusement un bus articulé des transport public genevois, passait à l'instant et devait, péniblement effectuer une manœuvre de recul. Cela retarda quelque peu l'arrestation des Falquets. Hans y croyait dur comme fer. Il se voyait déjà retourner à Amriswil. Encore un virage à gauche et tout le monde déboula au chemin de la Plantée! La brigade s'échappa des véhicules: trente hommes armé de mitraillette dernière génération! Casques, gilets pare-balles, les villageois regardaient, hébétés. On se croyait en Irak, ou en Syrie, ou en Afghanistan, bref, un endroit dans le monde où la guerre sévissait. La brigade encercla complètement la maison du 22. Une coquette demeure. Un jardin que l'on devinait magnifique en été. Une Citroën Xantia parquée devant. Hans reçut une nouvelle par SMS qui confirmait ce qu'il avait déjà pensé: « E » avait enlevé la puce électronique du chien.

- Ah la salope! lâcha-t-il.

Alice fut surprise. Hans n'était jamais vulgaire d'ordinaire. Mais là, elle le comprenait. Il était sur le point de conclure l'affaire « E », la tension était à son comble, et puis tout de même, « E », c'était vrai, était une sacrée salope. Elle pensa à Sylvie et à son mari. Quelle perverse était donc « E » pour perpétrer un crime aussi diabolique. On apporta un porte-voix à Hans et celui-ci annonça la couleur:

- ATTENTION! ATTENTION! ALAIN ET ÉVELYNE FALQUET! VOTRE MAISON EST CERNÉE! VOUS N'AVEZ AUCUNE POSSIBILITÉS DE VOUS ÉCHAPPER! RENDEZ-VOUS! SORTEZ TRANQUILLEMENT PAR LA PORTE PRINCIPALE, LES MAINS SUR LA TÊTE! JE RÉPÈTE!

Et Hans répéta l'ordre. Tout les soldats avaient leurs armes pointées sur la maison. Mais pas un bruit. Pas un mouvement ne venait de la petite maison. Alice regardait cette maison, son jardin, la voiture. Et eut un doute. Et s'il se plantait. 22 chemin de la Plantée ?! Mais en même temps, c'était ça. Ça devait être ça. Le message de « E » sur le collier du chien lui revenait:


Vous sautez les obstacles sur votre cheval, c'est bien! Faites-en de même dans votre travail de politicienne! Affrontez les obstacles! Ne les contournez pas!
E

Et les Falquets avaient donc été chercher ce chien à la SPA. Sûrement un chien à problème. Un chien battu? Agressif? Qu'ils avaient envoyé sur le cheval de la conseillère. En prenant bien soins d'enlever la puce. Mais ce à quoi ils n'avaient pas pensé, et c'est cela qui chicanait l'inspectrice, était que la personne de la SPA se souviendrait à qui elle avait donné ce chien en adoption. Comment avaient-ils put négliger cette possibilité? C'était un peu énorme quand même.

- JE COMPTE JUSQU'À DIX, SI VOUS N'ÊTES PAS SORTIS, NOUS ENTRONS PAR LA FORCE, fit Hans dans le mégaphone.

Des badauds se tenaient non loin, on leur donna l'ordre de reculer :

- Risques de tirs, risques de tirs, veuillez reculer !

Un jeune homme se mit à rire, incrédule :

- Les Falquets ? Risque de tirs ? Non mais vous plaisantez ?

Les soldat ne répondaient pas, et réitéraient leur ordre :

- Risques de tirs, risques de tirs, veuillez reculer !

Les badauds reculèrent.

- Non mais, ils savent quel âge ils ont ?! Ils savent qui habite cette maison ?

Hans avait fini son décompte et donna l'ordre d'entrer. Par la force.

Trois soldats, se postèrent devant la porte principale. L'un d'eux essaya de pousser la porte. Verrouillé. Il fit deux pas en arrière, et tira une rafale. La porte céda. Le soldat s'avança prudemment, entra. À l'intérieur, une pièce pas très grande, une petite table à manger, un petit salon, une commode sur laquelle était posée une télévision, éteinte. Deux fauteuils dans lesquels étaient assis un vieil homme, une vieille femme, tout deux tremblant de peur, les mains sur la tête comme l'avait demandé Hans. Le soldat baissa son arme, ôta son casque, et demanda :

- Vous êtes monsieur et madame Falquet ? Les deux hochèrent nerveusement la tête de haut en bas. Le soldat prit sa radio :

- C'est bon, vous pouvez venir inspecteur, il n'y a pas de danger.


Dix minutes plus tard, les époux Falquets se trouvèrent dans la BM de Hans avec Alice. Personne ne parlait. Hans était d'une humeur massacrante. Et il ne fallait pas, on n'avait d'ailleurs aucune envie de le faire, lui adresser la moindre parole. Toutefois, quand ils arrivèrent à l'entrée de Bernex, Hans leur demanda de le guider :

- C'est à droite ?

- ...euh...oui, fit monsieur Falquet.

Et il continua à lui montrer ainsi le chemin jusqu'à ce qu'ils arrivent devant le refuge de la SPA. Il était 16h56. Ça fermait à 17h00. Tout le monde descendirent. Les chiens aboyaient, ça sentait l'animal, la ferme. Ils se rendirent à la réception. Une jeune femme s'y trouvait. Blonde, les cheveux attaché en queue de cheval, elle leur tournait le dos, occupé à faire des rangements dans le bureau.

- Mademoiselle ! Police ! Je peux vous parler un instant, s'il vous plaît ?

Hans s'était calmé. Cela ne servait à rien de s'énerver. Il le savait. Mais. Quand tout à l'heure, il s'était rendu compte qu'il avait merdé sur toute la ligne et que les Falquets n'étaient pas « E », et qu'il s'était fait roulé dans la farine, il n'avait pas put s'empêcher de pousser une gueulante : « Putain ! Elle commence sérieusement à me faire chier, « E » ! », et Alice l'avait très bien senti, il avait du se retenir de ne pas prendre une des chaises de la table à manger des Falquets et la balancer à travers leur salon. Alice n'était pas intervenu quand il avait placé ses deux mains sur le dossier de la chaise, parce que elle savait qu'il n'allait pas le faire. Il en avait une énorme envie, mais il ne le ferait pas.

- Oui, bonjour, fit la jeune femme en se retournant.

- C'est vous qui avez téléphoné tout-à-l'heure suite à la mise en ligne de la photo d'un de vos chiens.

- Ah non ! C'est Béatrice. Je vais l'appeler. Elle est juste derrière.

Elle passa la porte qui menait dans une pièce à l'arrière et appela sa collègue. Béatrice ne tarda pas à apparaître.

- Bonjour , fit-elle, un peu surprise de tout ce monde. Que puis-je pour vous ?

- Oh, c'est très simple. Reconnaissez-vous ces deux personnes ?

Elle regarda monsieur et madame Falquet.

- Alors non ! Je suis désolé. Je crois bien que je ne les ai jamais vu...

- Ce n'est donc pas Alain et Évelyne Falquet, les deux personnes que vous dites être venus chercher un chien nommé César, samedi dernier.

-Ah non ! Ce n'est pas eux ! J'en suis sûr.

Hans soupira et regarda Alice :

- Qu'est ce que t'en penses, lui demanda-t-il.

- Que « E » a emprunté l'identité des Falquets pour ne, évidemment pas donner sa véritable identité...

Hans se tourna vers Béatrice :

- Vous ne demandez pas une pièce d'identité aux personnes qui adopte un chien ?

- Non.

- Hum...bon, mais est-ce que vous pourriez me décrire le couple qui est venu chercher César samedi dernier ?

Elle réfléchit une seconde :

- Ben oui...mais... ils étaient très emmitouflés. Ils portaient des bonnets, des lunettes de soleil, une écharpe leur cachait la bouche. Et l'homme se tenait à distance. C'était la femme qui négociait...

- Qui négociait ?

- Oui enfin, façon de parler. C'est-à-dire que César était le chien le plus difficile que j'avais. Et je craignais un peu qu'ils ne se rendent pas compte des problèmes qu'il allait pouvoir leur poser. Je tenais à les mettre bien en garde, mais elle a insisté. Elle voulait vraiment ce chien. Et puis voilà ce qui est arrivé...ils n'auraient pas du le prendre, c'est bien ce que je leur disais...

- Mais vous n'y pouvez rien, madame, ils le voulaient ce chien. Dans un but bien précis. Mais essayez quand même de me les décrire.

- Euh...ils étaient tout les deux minces, tailles moyenne, normale quoi, blanc...

- Un accent ? Une voix particulière ?

- Non...rien de spécial...disons qu'ils étaient d'ici, sans avoir pour autant le gros accent genevois.

- Avez-vous vu leur voiture ?

- Euh...non...d'ailleurs...j'ai presque l'impression qu'ils sont venus à pieds. Mais pourquoi vous dites qu'ils le voulaient dans un but précis ?

Hans avait été un peu trop prolixe.

- Mais c'est un accident, n'est ce pas ? insista Béatrice.

De toute façon, toute la république allait être au courant :

- Non. Ce n'est pas un accident, madame. Le chien a été intentionnellement envoyé pour attaquer le cheval de madame Nathalie Luck.

-...c'est...E... ?!?

- Oui.

- Mon Dieu ! C'est horrible ! C'est ma faute !

- Non non non, calmez-vous ! Vous n'y pouvez rien.

Béatrice s'assit sur un tabouret. Et Alice prit le relais.

- Ce n'est en rien de votre faute, madame, la rassura-t-elle. Par contre nous sommes venus pour que vous nous donniez la description la plus précise possible de « E »...

- Mon Dieu ! Et dire que j'ai eu cet assassin devant moi, là où vous vous tenez...j'en ai la chair de poule.

- Madame, il va falloir que vous nous accompagniez au poste pour faire votre déposition et nous aider à créer un portrait robot des usurpateurs des identités des Falquets.

Alain et Évelyne Falquet s'étaient assis sur des chaises qui se trouvaient à la réception. Ils avaient retrouvé des couleurs et étaient presque flattés que « E » les ai choisi comme bouc émissaire. Et même s'ils avaient vécus la plus grosse frayeur de leurs vies, le bruit de leur porte d'entrée explosé à la mitraillette résonnait encore dans leur oreilles et leurs êtres, ils en avaient des choses à raconter à leurs petits-enfants, qui ne manqueraient pas de leur demander de raconter encore et encore ce qui s'était déroulé cet après-midi là du 23 février 2019.

Hans leur demanda:

- Mais vous, avez-vous remarqué quelque chose de bizarre dernièrement. Une impression d'être surveillé ?

Le mari hésitait, puis :

- ...euh...non...pas particulièrement...et toi Évelyne ? T'as remarqué quelque chose ?

Hans insista :

- Une voiture par exemple. Une voiture stationnée vers chez vous mais que vous n'aviez pas l'habitude de voir.

La vieille dame ne savait pas quoi dire. Mais on sentait qu'elle avait envie de dire quelque chose. Elle avait une furieuse envie d'être utile à l'enquête sur « E ». Et elle leur dit alors :

- J'ai vu une dame devant notre boîte au lettre, ça devait être, je dirais il y a deux ou trois semaines. J'étais assise dans mon fauteuil, je buvais un café et prenais une petite pause. Je venais de faire le ménage, et je vois cette femme par la fenêtre. J'ai crut qu'elle distribuait des publicités. Mais après, le soir , Alain est rentré, et il regarde toujours si il y a quelque chose dans la boîte au lettre, et il n'a rien emmené. Je n'y ai plus pensé. Mais maintenant que vous me le demandez, ça me revient...

- Pourriez-vous faire une description de cette dame ?

- Ah non. Elle portait un K-way noir je crois, avec un capuchon. Je pense qu'elle devait être en vélo.

- Mais vous avez quand même put voir que c'était une femme !?!

- Euh...oui...parce que elle avait...comment dire...une manière de bouger...féminine...

- De bouger féminine ?

- Oui. C'est difficile à expliquer. Mais je suis sûre que c'était une femme.

- Oui, Hans, je vois ce qu'elle veut dire, intervint Alice.

- Est-ce qu'il pleuvait ce jour-là ? demanda Hans en passant outre la remarque de sa collègue.

- Euh...ouulala...c'est difficile de me rappeler. Mais je dirais que non. Mais le temps était frisquet et humide en tout cas. Il n'y avait pas de soleil.

- On l'emmène aussi au poste, Alice ?

Celle-ci regarda Hans en lui souriant ironiquement.

- Non mais, ça va pas, Hans. Tu lui bousillé sa porte, tu l'as trimballé jusqu'ici, et puis maintenant tu veux l'emmener au poste... ?

- Mais pour faire une déposition...

- Non Hans ! Arrêtes ! Laisse-la tranquille. On n'a pas besoin d'une déposition...tu notes dans ton carnet ce qu'elle t'a dit et puis basta !

- Basta ?

- Ouaips ! Faut pas déconner quand même...


Le temps de charger tout le monde dans la BM, elle était grande, les Falquets et Béatrice arrivèrent sans trop de mal à se caser à l'arrière. Ils ramenèrent d'abord le vieux couple, puis se rendirent au boulevard Carl-Vogt avec Béatrice. Nicolas et Abdel étaient là, prêt pour le portrait-robot.

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